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deration les circonstances qui pouvaient serv
ir à notre justification , et de soumettre à
son gouvernement notre demande d’être
rendus à la liberté et renvoyés dans notre
patrie. La traduction de cette requête nous
coûta aussi beaucoup de peine ; enfin, après
une infinité de questions, d’explications,
d’observations, d’additions, etc., qu’il fallut
faire conformément aux désirs des officiers ou
magistrats qui examinèrent la traduction ja-
ponoise de notre écrit, nous l’achevâmes; alors
on nous annonça que nous ne tarderions pas
à être présentés de nouveau au bounio, qui
nous interrogerait en personne sur nos
mémoires et vérifierait l’exactitude des traductions.
Tandis que nous étions occupés de cette
besogne, Alexis avoit la permission de se
trouver seul avec nous, même dans l’absence
de Koumaddjero. Mais comme nous soupçonnions
beaucoup sa bienveillance à notre
égard,nous nous servions dans nos conversations,
quand nous le jugions nécessaire,
d’expressions inusitées et même étrangères ,
qu’il ne comprenoit pas. Alexis s’en aperçut
bientôt, et nous dit d’un air très-touché
combien il était chagrin de ce que notre déc
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fiance pour lui alloit au point de chercher à lui,
cacher nos pensées : « Je suis aussi bon Russe
«que vous, ajouta-t-il, et je sers le même empereur.
» A cette occasion, il nous raconta que
les Japonois avoient transporté à Kounaschir
une partie des Kouriles q u ’ils avoient fait
prisonniers à Itouroup; que ce que ceux de
cette dernière île racontaient que les captifs
avoient été envoyés par les Russes vers e u x ,
était une fable imaginée à plaisir ; les prisonniers
avoient persisté à la nier, jusqu’à ce
que les Japonois les eussent menacés de les
mettre à la torture ; leur promet tant la liberté,
et même des récompenses, s’ils vouloient
convenir de tout; néanmoins ces mal heureux
n’appuyèrent pas le mensonge. « A, présent,
« dit Alexis en continuant, je suis résolu
« de découvrir toute l’imposture desKouriles,
« de souffrir, s’il le faut, les tortures et la
« mort, et de montrer par là que je vau x
« autant que tout autre Russe, e t que je conte
nois Dieu, Vivre encore dix ans ou vingt
« ans n’est rien; mais il seroit affreux qne
« mon ame n’entrât pas dans le ciel , et
« fût condamnée à la damnation éternelle.
« Je vous prie donc d’insérer dans votre
« écrit cette circonstance comme je l ’ai