Tous leurs discours, dont un grand nombre
ne vaut pas la peine d’ëtre cités, pou voient
faire connoître leur position. Dès que les Ja-
ponois. supposèrent que nous attaquerions
leur village, ils menacèrent les Kouriles de
les punir du dommage que nous pourrions
commettra. Ceux-ci avoient donc un puissant
m otif de s’occuper de nous, par la crainte
de perdre leur tête. Pour la sauver, s’il étoit
possible, ils préféroient rester avec nous, et
sacrifier les deux femmes et l’enfant leurs
compagnons; voilà pourquoi ils nousprioient
de les emmener. Je m’efforçai de les convaincre
qu’ils n’avoient rien à craindre des
Japonois, à qui nous ne souhaitions ni ne
voulions faire le moindre mal, et je leur conseillai
de retourner à terre. J’envpyai en présent
au chef japonois quatre bouteilles d’eau-
de-vie de France, ayant appris que cette liqueur
lui avoit fait très-grand plaisir. Quand
les Kouriles nous quittèrent, je demandai si
l ’un d’eux ne consentiroit pas à rester à bord
de la corvette pour nous montrer un bon
mouillage à Ouroup, et nous servir d’interprète
dans le cas où nous irions à Ourbitsch.
Tous voulurent rester ; mais comme c’étoit
une chose impossible, il fut décidé qu’A lexis
demeureroit seul à bord , et que les autres
retourneroient à terre. Ces gens étoient encore
si fermement convaincus de notre projet d’agir
hostilement contre les Japonois, que l’un d’eux
nous dit en confidence, avant de partir, qu’il
avoit appris qu’à Ourbitsch on avoit monté des
canons pour tirer sur les Russes aussitôt qufiïs
se présenteroient. Un instant après, un autre
observa qu’il n’y avoit qu’un canon à Ourbitsch.
Vers midi, le temps étant serein, le vent se
mit a souffler du sud avec assez de force. Afin
d’en profiter pour examiner la côte orientale
d’Ouroup, je renvoyai nos hôtes, et je fis route à
l ’est, toutes v o i l e s dehors. Mais à peine étions-
nous éloignés d’un demi-mille, ou d’un verste
du baïdar, que nous y aperçûmes les Kouriles
debout, les mains levées au ciel, nous faire des
signes, et nous appeler à grands cris. Je pensai
que peut-être le baïdar couloit à fond, et je fis
aussitôt mettre en travers. Les Kouriles se
rapprochèrent de n ou s , simplement pour
nous répéter qu’ils craignoient que les Japonois
né les fissent -mourir dans le cas où nous
tenterions une attaque. Il nous fallut encore
une fois employer toute* notre éloquence
pour les tranquilliser; ils se décidèrent enfin
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