à partir, mais ce ne fut qu’en montrant la
plus grande crainte, car ils ne pouvoient
abandonner leurs idées sinistres. Notre séparation
de ces êtres' réellement à plaindre me
toucha extrêmement. Etant dans leur baïdar,
ils nous dirent adieu,nous promirent de pêcher
du poisson, de ramasser de la saranne et de
l ’ail sauvage pour nous, et de nous attendre
si les Japonois ne les tuoient pas.
En partant d’Itouroup, nous fîmes route
pour la côte orientale d’Ouroup, dont l’examen
nous occupa trois jours. Ayant voulu
ensuite retourner à Ourbitsch, les vents contraires
ne nous permirent pas de passer par
le détroit de Yries ; nous portâmes donc
au sud, le long de la côte orientale d’Itouroup,
afin de visiter aussi cette île. Cependant la
nécessité me mit dans le cas de confirmer les
soupçons de notre Kourile, que nous tramions
quelque projet contre les Japonois.
Je saisissois toutes les occasions de chasser
ces idées de son esprit; mais les mesures que
nous étions obligés de prendre pour notre
propre sûreté détruisoient l’effet de mes e x hortations.
Chaque fois que le temps le per-
mettoit, je faisois faire l’exercice à mon équipage,
et tirer à boulet. Notre Kourile 11®
pou voit cacher son étonnement quand il
voyoit mes hommes sous les armes ; une division
armée d’espingoles, une autre de fu sils,
une troisième de pistolets et de piques.
Nous tâchions de lui persuader que nous-
mêmes nous craignions d’être attaqués par les
Japonois; qu’en conséquence nous nous tenions
prêts à nous défendre, mais qu’ils n’a-
voientrien à redouter de notre part, s’ils nous
traitoieot amicalement. Alexis faisoit signe
de la tête comme ajoutant foi à nos discours,et
sans doute il pensoit tout différemment. Quelquefois
il lui arrivoit de nous révéler tout-à-
coup des choses qui lui causoient un grand
embarras : quand nous lui adressions des
questions relatives à ce qu’il nous disoit, il
refüsoit de s’expliquer. Il ne voulut pas d’a-^
bord, par exemple, faire une réponse positive
quand nous l’interrogeâmes sur la conduite
des Japonois envers les Kouriles; ensuite ,
dans le courant de nos conversations, et surtout
quand nous étions à prendre le th é , il
nous raconta de lui-r-même que les Japonois
avoient payé à ses compatriotes telle ou telle
somme pour une certaine quantité de marchandises,
ne réfléchissant pas. qu’il nous
confioit un secret que précédemment il avoit