des propriétaires. Nous répondîmes que, d’après
le rapport du commandant du lieu, ils
de voient connoître tous les moyens que nous
avions employés pour lui faire comprendre
nos besoins; mais il avoit renfermé tous,les
habitans dans le fort: les villages étoient restes
deserts ; et aussitôt que nous nous étions
approchés de la forteresse , ou avoit tiré sur
nous à boulets. L’espérance que nous avoit
fait concevoir l’officier japonois à Itouroup,
que nous obtiendrions à Kounaschir tout ce
dont nous avions besoin, nous avoit empêchés
de retourner dans un port russe ; et c’est
le parti que nous eussions bien décidément
pris, si nous n’eussionspas eu la lettre. Notre
long séjour à la mer avoit consumé nos provisions
; et, comme nous n’avions aucun dessein
de commercer avec les Japonois, le besoin
étoit le seul motif qui nous avoit engagés
à prendre une petite quantité de bois et de
riz , et à laisser plusieurs marchandises d’Europe
pour paiement. Nous avions mis aussi
de l’argent monnoyé et d’autres choses dans
le petit baril ; et dé plus , lorsque les Japonois
commencèrent à nous parler, et même dans
la forteresse, nous avions insisté pour payer
le prix qu’eux-mêmes fixeroient. Alors le
commandant en chef me demanda s’il existoit
en Europe une loi qui permît, dans un cas
semblable, de toucher au bien d’autrui.
« Il n’existe pas, répliquâmes-nous, de loi
positive à cetégard; mais si un homme, pressé
par la faim, entroit dans une maison abandonnée,
et y prenoit les alimens dont il a
besoin, aucune loi en Europe ne le déclare-
roit coupable, surtout s’il laissoit des objets
dont la valeur fût plus forte que celle de
ce qu’il auroit pris. »— « Chez nous, reprit le
corn mandant, il n’en est pas de même; d’après
nos lois, on doit plutôt mourir de faim, que
toucher le riz d’autrui sans son consentement.
»
Je dois dire ic i, à l’honneur des Japonois,
qu’ils nous adressoient toutes leurs questions
avec le ton de la modération et de la bonté;
un sourire affable étoit toujours sur leurs
ïevres, et ilstach oient de donner à ces interrogatoires
l’apparence d’une Conversation
entre amis et connoissances.
Le 5 septembre, on nous conduisit pour la
dernière fois chéz le commandant en chef.
Les Japonois réitérèrent pour la seconde
fois plusieurs des questions précédentes, et
s’informèrent dans le plus ^gvand détail de