ou 1 on conserva tous les termes russes en
usage dans ce jeu. Peut-être un jour à venir,
cet incident donnera à un érudit sujet de*
penser que les langues russe et japonoise
sortent d une souche commune.
On voit, d’après ce que j ’ai dit plus haut, que
nous pouvions, vers minuit, nous glisserdou-
cement l ’un après l’autre dans la cour, après
avoir arrangé sur nos lits les vêtemens que
nous avions de trop, de manière à faire croire
q u il y avoit quelqu’un endormi sous la couverture.
Dessous la palissade, il se trouvoit
une ouverture qui servoit à l ’écoulement des
eaux; il étoit facile de l’agrandir au point
qu’un homme y pût passer. Il falloit ensuite,
derrière la palissade, marcher à bas bruit et
quelquefois en nous traînant à terre, traverser
la ville et chercher à atteindre le bord
de la mer, monter sur un petit bateau comme
il y en a toujours le long du rivage, aller à
1 aviron vers un bâtiment que nous aurions
d’avance remarqué dans une promenade,
nous en emparer et mettre à la voile; mais il
falloit indispensablement que le vent soufflât
de terre avec force.
M. Moor nous étoit devenu infidèle ; pressentant
notre dessein, il nous épioit et nous
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nous en étions plusieurs fois aperça; nous
ne pouvions donc pas tenter une entreprise
de ce genre sans lui; car il n’eût pas tardé à
connoître notre fuite, et eût été à même de
donner l ’alarme, et de tout découvrir à nos
gardes. Pendant la nuit, aussi, des patrouilles
parcourent la v ille , et personne n’y peut
sortir sans lanterne; nous eussions donc été
obligés de la traverser en quelque sorte en
nous traînant, ce qui eût exigé au moins
quelques heures, et durant ce temps il eût
été aisé de s’opposer à notre fuite. Il n’y avoit
donc pas moyen de songer à ce plan sans la
coopération de M. Moor ; mais nousren avions
deux autres. Au lieu de nous glisser jusqu’au
bord de la mer, nous passions entre les arbres
pour atteindre une levée qui formoit une espèce
de glacis derrière le fossé d u coté occidental
du fort. Nous avions remarqué, dans
nos promenades, qu’il n’y avoit de sentinelle
ni sur les remparts ni sur les glacis; ce n’étoit
que dans l'intérieur de la forteresse, prés de
la porte, qu’il se trouvoit deux sentinelles
assises dans une grande guérite, et fumant
pour passer le temps. Du glacis nous pouvions
gagner une longue allée de grands arbres, et
ensuite le cimetière de la v ille , situé dans