m’étois laissé tromper par les Japon ois ; mats
i l me cita phisieiirs exemples tirés de l’his-
toiré, pour me montrer que des hommes
placés dans une position au-dessus de celle
où je me trou yois ayoiènt été victimes de
fautes du même genre. Il me nomma Çùok,
Deïangle, Zizianoif (j) et d’autres ; mais je
trouvai leur sort bien différent du mien. Ils
avoient sur-le-cliamp été privés de la vie,
et moi je vivois; j ’élois le témoin, après en
avoir été la cause, des souffrances de mes
compagnons. Je dois dire à l’honneur de
M. Chlebnikoff, qu’il supportoit son malheur
avec plus de résignation que nous tous. Il ne
murmuroil point, il se consoloit, par l’idée
qu’aucune prévoyance, aucune sagesse h u -
mame n’eût pu détourner de nous ce malheur,
f i ) L a fin tragique du capitaine Cook à O -O u â ïh i, la
principale des îles Sandwich, et de Délangle, compagnon
de la Perouse, àManoa, une des îles d e t’archipèl des Navigateurs
, sont assez connues. L e prince Z iz ia u o f ,
général rus se , commandoit. une armée dan» les p ro v
in ce s du Caucase en janvier 1806. I l s’approcha impru-
damincnt de B ak o u , en laissant ses'troupes derrière Ifti ,.
e t fut assassiné près de la porte de cette vilîe.
T'oyez V o y a g e dans le Caucase et en G co rg iè , par
M . Kiaproth, ï . Í, p. 4o i (en allemand).
( M )
qui, dans son opinion, avoit été déterminé,
avant la création, par le destin qui gouverne
tout. Quant à moi, j ’avois sur la prédestination
des idées toutes différentes. Je pensois
qu e , pour l’exemple des autres, il n’y a
de punis par l’àffliction et le repentir que les
hommes qui se sont attirés eux-mêmes leurs
malheurs; mais que ceux qui ont été précipités
par d’autres dans un abîme de maux,
où aucune sagesse, aucune prévoyance hu-
maine n’aüroient pu les empêcherde tomber,
pouvoient supporter leur sort avec résignation.
Le i 5 ju ille t, on ht halte à un petit village
pour déjeuner. Les habitans accoururent aussitôt
sur le rivage pour nous voir. Un vieillard,
d’un air vénérable , demanda à nos
gardes la permission de nous régaler du déjeuner
et dé saki; on le lui permit. Ce brave
homme resta tout le temps auprès des bateaux
à veiller à ce que l’on eût bien soin de
nous. L’expression de sa physionomie prou-
voit évidemment qu’il nous plaignoit de tout
son coeur. Cette bonté et cette compassion
pour notre infortune, chez un homme q u i
nous étôit entièrement étranger , nous causai
un attendrissement môlé de joie. Nous çoin-
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