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t'émettre en ordre nos appareils, sur lesquels
le sang et le puss’étoient tellement entassés et
durcis, que le mouvement le plus léger pro-
duisoit un frottement extrêmement douloureux.
Après avoir entendu notre demande, les
Japonois s’assirent en cercle pour en délibérer
(1). Il fut enfin résolu de nous accorder
notre requête, friais à condition que nous
nous laisserions fouiller de nouveau, et prendre
tout ce que notts avions de métallique.
Cette mestire avoit déjà eu lieu dans la forteresse
, mais les Japonois crurent nécessaire de
la répéter par précaution : nous y consentîmes.
On nous ôta même nos croix. J’avois danS
mes poches quelques clefs qui ne s*étoient
pas trouvées, et que je leur montrai quand
iries mains furent libres. Cette Vue leur causa
de nouveau la plus grande frayeur, et ils
recommencèrent à me fouiller. Leur précaution
, ou plutôt leur crainte, alloit si loin,
qu’ilis nous délioient, non pas tous à la fois,
(1) Notre escorte étoit composée de soldats dé la principauté
de Nambou. Ils étoient tous égaux en ran g; e t ,
quoiqu’ils reçussent quelquefois des ordres du plus anc
ie n , ils délibéroient tous ensemble dans les cas imprévus.
.
mais seulement deux par deux, et pour un
quart d’heure au pjus; alors ils changeoient
les pansemens et nous lioient de nouveau;
Aujourd’hui un officier, (1) envoyé de Kou-
naschir, nous rejoignit, et pçjt le commandement
de nos gardes. Il nous traita avec beaucoup
daffabilité, e t, le lendemain 2 0 ,.fit
délier nos mains ; mais les bras au-dessous
du coude restèrent garrottés ccmme auparavant.
Pour la première fois, depuis le commencement
de notre captivité, nous pûmes
nous servir de nos mains pour manger. Nous
marchâmes aussi bien plus aisément. Seulement
quand nous allions en bateau d’un cap
à un autre , on nous lioit les mains pendant
le temps des traversées, q u i, malheureusement,
n’éloient ni longues ni fréquentes. La
précaution des Japonois alloit si loin qu’ils
( i ) D’ après son vêtement rema rqu ab le , et le respect
que notre escorte loi témoignoit, nous le prîmes alors
pour un personnage de considéra lion ; mais nous apprîmes
ensuite q u a e ^ to it un soldat impérial qui avoit
un g rade e t des prérogatives importantes de plus que les
soldats des princes. Nos gardes avaient pour lui les
mêmes égards que pour le . chef. On lui dounoit toujours
une chambre p a r ticu liè re , et il ne mangeoit pas non
plus avec les autres.
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