regardent comme impoli de se présenter pieds
nus devant les personnes qu’ils respectent.
C étoit un homme de cinquante ans; ifiavoit
1 air debile, Il avoit sa petite fille attachée à
son dos par un cordon qui entouroit son
corps. Mais, pour que ce fardeau ne le gênât
pas quand il vouloit mouvoir ses bras ou
hausser les épaulés , il le supportoit avec le
front; c’est pourquoi; dans l’endroit qui tou-
choit cette partie, une large courroie étoit
cousue au cordon. Les cheveux des hommes
étoient, ainsi que leur barbe, touffus, très-
noirs, et coupes comme ceux de nos matelots.
Ils n’avo ien t, sur leur visage , ni sur aucune
partie de leur corps, aucune sorte de figure
pour ornement. Les femmes, au éontraire>,
avoient le tour des lèvres peint en bleu ; leurs
mains étoient peintes de la même couleur. Ils
nous apportoient en présens deux pouds
(72 livres) de poisson, des truites et de la
morue, un peu de saranne et d’ail sauvage. Je
fis distribuer une livre de poisson à chaque
homme de 1 équipage, et mettre à part les vé gétaux
pour les malades.
Notre première question concerna nos amis
les Japonois. Nous apprîmes que le chef, en
conséquence du présent que je lui avois fait
d’une bouteille d’e a u - d e - v ie , avoit dormi
profondément toute la soirée et toute la nuit;
mais que les autres, bien loin de se livrer
au sommeil, étoient toujours restés sous les
armes. Ils ne pou voient dissiper leurs soupçons
contre nous, et ils menacèrènt les K ou riles
de leur couper la tête comme sujets
russes, dans le cas où nous tenterions une
attaque. Aussi les avoient-ils soigneusement
surveillés pendant toute la nuit, et venoient-
ils d’en retenir quelques-uns pour otages. De
grand matin, les Japonois nous avoient envoyé
d’éux-mêmes les Kouriles pour nous
demander encore plus positivement le motif
de notre venue, et ce que nous voulions.
Cette fois nos Kouriles se trahirent par leurs
d is c o u r s e t avouèrent qu’une tempête 11e
les avoit pas jetés dans cet endroit; qu’ils y
étoient venus pour commercer avec les Japonois,
ce qui leur étoit permis; mais queceux-
ci., par représailles des hostilités commises
par les Russes, s’étoient emparés d’eux, comme
il a été dit plus h au t, et les avoient retenus
prisonniers. Ils s’étoient enfin décidés à les
mettre en liberté, et leur avoient donné Vingt
sacs de riz, du saki et du tabac pour leur
voyage. Jusqua notre arrivée, le mauvais