Mureau , du voyage de notre célèbre et infortuné navigateur
la Pérouse que des scombres à la vérité de
l'espèce appelée bonite, mais bien moins favorisés que
les thons, relativement à la facidté de nager avec vitesse
et avec constance , suivirent les bâtimens commandés
par cet illustre voyageur , depuis les environs de l’isle
de Pâque, jusqu’à l’isle Mowée , l’une des isles Sandwich.
La troupe de ces scombres, ou te banc de ces poissons
, pour employer l’expression de nos marins , fit
quinze cents lieues à la suite de nos frégates : plusieurs
de ces animaux, blessés par les foènes , ou tridents, des
matelots françois , portoient sur le dos une sorte de
sign; lement qu’il étoit impossible de ne pas distinguer^
et l’on Teeonnoissoit chaque jour les mêmes poissons
qu’on avoit vus la veille
Quelque longue que puisse être la durée de cette
puissance qui les maîtrise , plusieurs marins allant
d’Europe en Amérique , ou revenant d’Amérique en
Europe , ont vu des thons accompagner pendant plus
de quarante jours les vaisseaux auprès desquels ils
trouvoient avec facilité une partie de l’aliment qu’ils
aiment -, et cette avidité pour les diverses substances
nutritives que l’on peut jeter d’un navire dans la mer, 1
1 Voyage de la Pérouse, rédigé par Milet-Mureau, in-40, tome II, p. 12g.
2 Voyez ce que nous avons écrit sur la vitesse des poissons, dans notre.
Discours préliminaire sur la. nature de ces animaux>.
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n’est pas le seul lien qui les retienne pendant un très-
grand nombre de jours auprès des bâtimens. L’attentif
Commerson a observé une autre cause de leur assiduité
auprès de certains vaisseaux, au milieu des mers-
chaudes de l’Asie , de l’Afrique et de l’Amérique , qu’il
a parcourues, 11 a écrit, dans ses manuscrits , que dans
ces mers dont la surface est inondée des rayons d’un
soleil brûlant, les thons, ainsi que plusieurs autres poissons
, ire peuvent se livrer, auprès de cette même surface
des eaux, aux différens mouvemens qui leur sont
nécessaires, sans être éblouis par une lumière trop vive,,
ou fatigues par une chaleur trop ardente: ils cherchent
alors le voisinage des rivages escarpés ,. des rochers
avancés , des promontoires élevés , de tout ce qui peut
les dérober pendant leurs jeux èt leurs évolutions aux
feux de l’astre du jour. Une escadre est pour eux comme
une forêt flottante qui leur prête sou ombre protectrice :
les vaisseaux , les mâts , les voiles, les antennes , sont
un abri d’autant plus heureux pour les scombres , que ,
perpétuellement mobile, il les suit, pour ainsi dire ,-
sur le vaste Océan, s’avance avec une vitesse assez égale
à celle de ces poissons agiles , favorise toutes leurs manoeuvres
, ne retarde en quelque sorte aucun- de leurs,
mouvemens ; et voilà pourquoi , suivant Commerson ,
dans la zone torride, et vers le temps des plus grandes
chaleurs, les thons qui accompagnent les bâtimens,
se rangent , avec une attention facile à remarquer, du