aucune défaveur sur les conséquences que nous allons
présenter, nous restreindrons toujours dams des limites
si étroites l’étendue de l’espèce, qu’aucune manière
plus parfaite de la considérer ne pourra à l’avenir nous
obliger a rapprocher davantage ces bornes ,. ni par
conséquent à nous faire regarder comme appartenant
à deux espèces-distinctes , deux individus que nous
aurons considérés comme faisant partie de la même-
Une espèce peut s’éteindre de deux manières-.
Elle peut périr toute entière ,, et dans un temps
très-court, lorsqu’une catastrophe violente bouleverse
la portion de la surface du-globe sur laquelle elle
vivoit , et que l’étendue ainsi que la rapidité du mouvement
qui soulève , renverse , transporte , brise et
écrase , ne permettent à aucun individu d échapper à la
destruction. Ges phénomènes funestes sont des événe-
mens que l’on peut considérer relativement à la durée
ordinaire des individus ,e t même des espèces, comme
extraordinaires dans leurs effets , et irréguliers dans-
leurs époques. Nous ne devons donc, pas nous servir de
la comparaison de leurs résultats pour tâcher de par-
courir la route cjue nous nous sommes tr3c,ee.
Mais indépendamment dé ces grands coups que la
Nature frappe rarement et avec éclat, une espèce dis-
paroît par une longue suite de nuances insensibles et
d’altérations successives. Trois causes principales peuvent
l’entraîner ainsi de dégradation en dégradation.
Premièrement, les organes qu’elle présente, peuvent;
t
SUR LA DURÉE DES ESPECES,
perdre de leur figure , de leur volume , de leur souplesse
, de leur élasticité , de leur irritabilité, au point
de ne pouvoir plus produire , transmettre ou faciliter
les mouvemens nécessaires à l’existence.
Secondement, l’activité de ces mêmes organes peut
s’accroître à un si haut degré, que tous les ressorts
tendus avec trop de force, ou mis en jeu avec trop de
rapidité , et ne pouvant pas résister à une action trop
vive ni à des efforts trop fréquens , soient dérangés ,
déformés et brisés.
Troisièmement, l’espèce peut subir un si grand nombre
de modifications dans ses formes ej; dans ses qualités,
que , sans rien perdre de son aptitude au mouvement
vital, elle se trouve, par sa dernière conformation et par
ses dernières propriétés , plus éloignée de son premier
état que d’une espèce étrangère : elle est alors métamorphosée
en une espèce nouvelle. Les élémens dont
elle est composée dans sa seconde manière d’être , sont
de même nature qu’auparavant ; mais leur combinaison
a changé : c’est véritablement une seconde espèce qui
succède à l’ancienne; une nouvelle époque commence;
la première durée a cessé pour être remplacée par une
autre ; et il faut compter les instans d’une seconde existence.
Maintenant si nous voulons savoir dans quel ordre
s’opèrent ces diminutions , ces accroissemens , ces
changemens de la conformation de l’espèce, de ses propriétés
, de ses attributs,si nous voulons chercher quelle