POI S SONS OSSEUX.
L orsque nous avons, par la pensée, réuni autour de
nous les diverses-espèces de poissons qui peuplent les
mers ou les eaux douces du globe, lorsque nous les
avons contraintes, pour ainsi dire, à se distribuer en
différens grouppes, suivant l’ordre des rapports qui les
distinguent, nous les avons vues se séparer en deux
immenses tribus. D’un côté ont paru les poissons cartilagineux
; de l’autre, les osseux. Nous nous sommes
occupés des premiers; examinons avec soin les seconds.
Nous avons assez indiqué les différences qui les séparent;
exposons donc, au moins rapidement, les ressemblances
qui les rapprochent. Elles sont grandes, en effet, ces
ressemblances qui les lient. Les formes extérieures, les
organes intérieurs, les armes pour attaquer, les boucliers
pour se défendre, la puissance pour nager, l’appareil
pour le vol, et jusqu a cette faculté invisible et
terrible de faire éprouver à de grandes distances des
commotions violentes et soudaines, tous ces attributs
que nous avons remarqués dans les cartilagineux, nous
allons les retrouver dans les osseux. Nous pouvons,
par exemple, opposer aux pétromjzons et aux gas-
trobranches, les cécilies, les murènes , les ophis ;
aux raies , les pleuronectes ; aux squales, les ésoces ;
aux acipenseres, les loricaires ; aux syngnathes, les
fistulaires; aux pégases, les trigles et les exocets; aux
torpilles et au tétrodon électrique, le gymnote et le
silure, également électriques ou engourdissans. A la
vérité, les diverses conformations des cartilagineux ne
se remontrent dans les osseux qu altérées, accrues,
diminuées, ou du moins différemment combinées; mais
elles reparoissent avec un assez grand nombre de leurs
premiers traits, pour qu’on les reconnoisse sans peine*
Elles annoncent toujours l’identité de leur origine - elles
attestent l ’unité du modèle d’après lequel la Nature a
façonné toutes les espèces de poissons Qu’elle a répandues
au milieu des eaux. Et que ce type de la vitalité
et de 1 animalité de ces innombrables animaux est
digne de l’attention des philosophes! Il n’appartient
pas, en effet, exclusivement à la grande classe dont
nous cherchons à dévoiler les propriétés: son influence
irrésistible embrasse tous les êtres qui ont reçu la
sensibilité. Bien plus, son image est empreinte sur tous
les produits de la matière organisée. La Nature n’a ,
pour ainsi dire, créé sur notre globe qu’un seul être
Vivant, dont elle a ensuite multiplié des copies plus ou
moins modifiées. Sur la planète que nous habitons,
avec la matière brute que nous foulons aux pieds,
au milieu de l’atmosphère qui nous environne, à la
distance où nous sommes placés des différens corps
célestes qui circulent dans l’espace, et sous l’empire
de cette loi qui commande à tous les corps et les fait
Sans cesse graviter les uns vers les autrês, il n’y avoit
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