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l’épiderme , de manière qu’on ne peut pas aisément les
distinguer. '
La tête de l’anarhique que nous décrivons, est grosse,
le museau arrondi, le front un peu élevé, l’ouverture de
la bouche très-grande ; les lèvres sont membraneuses,
mais fortes, et les mâchoires d autant plus puissantes,
que ehacune de ces deux parties de la tête est composée,
de chaque côté, de deux os bien distincts , grands,
durs, solides, réunis par des cartilages, «t s arcboutant
mutuellement. C’est au-devant de ces doubles mâchoires
, qu’on voit, tant en haut qu en bas , au moins
six dents coniques propres à couper ou plutôt a déchirer
, divergentes, et cependant ressemblant un peu, par
leur forme , leur volume et leur position, a celles du
loup et de plusieurs autres quadrupèdes carnassiers. On
voit d’ailleurs cinq rangs de dents molaires supérieures,
plus ou moins irrégulières, plus ou moins convexes,
et trois rangs de molaires inférieures semblables. La
langue est courte, lisse, et un peu arrondie à son
extrémité. Les yeux sont ovales.
Il résulte donc de l’ensemble de toutes ces formes qua
présente la tête de l’anarhique loup, que lorsque la
gueule est ouverte, cette même tête a beaucoup de rapports
avec celle de quelques quadrupèdes , et particulièrement
de plusieurs phoques ; et voilà donc cet
anarhique rapproché des mammifères carnassiers, non
seulement par ses habitudes, mais encore par la nature
de ses armes et par ses organes extérieurs les plus
remarquables.
d e s p o i s s o n s . 3 o-3
Au reste, comment le loup ne seroit-il pas compris
parmi les dévastateurs de l’Océan ? Il montre ces dents
terribles avec lesquelles une proie est si facilement
saisie, retenue, déchirée ou écrasée : et de plus, ses
intestins étant très-courts, ne doit-il pas avoir des sucs
digestifs d’une grande activité, et qu i, par Faction
qu’ils exercent sur ce canal intestinal, ainsi que sur son
estomac , dans les momens où ils ne contiennent pas
une nourriture copieuse, lui font éprouver vivement
le tourment de la faim , et le forcent à poursuivre
avec ardeur , et souvent à immoler avec une sorte de
rage, de nombreuses victimes? Quelques dents de
moins, ou plutôt quelques décimètres de plus dans la
longueur du canal intestinal, auroient rendu ses habitudes
assez douces.
Mais les animaux n’ont pas , comme l’homme, cette
raison céleste, cette intelligence supérieure qui rappelle
,. embrasse ou prévoit tous les instans et tous les
lieux, qui combat avec succès la puissance de la nature
par la force du génie, et, compensant le moral
par le physique, et le physique par le moral, accroît
ou diminue à sou gré l’influence de l’habitude , et
donne à la volonté l’indépendance et l’empire.
L’anarhique loup, condamné donc, par sa conformation
et par la qualité de ses habitudes, à rechercher
presque sans cesse un nouvel aliment, est non seulement
féroce , mais très-vorace : il se jette goulûment
sur ce qui peut appaiser ses appétits violens. Il dévore