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chaflèr & on les laifTe approcher fans les tirer (x ).
Curieux d’obferver par nous-mêmes les habitudes de
ces oifeaux, nous avons cherché à nous en procurer quelques
uns de vivans, & M. Bâillon toujours empreffé à
répondre obligeamment à nos demandes, nous a envoyé
je grand goéland à manteau noir, première elpèce, & le
goéland à manteau gris, féconde efpèce ; nous les avons
gardés près de quinze mois dans un jardin où nous pouvions
les obfèrver à toute heure ; ils donnèrent d’abord
des figues évidens de leur mauvais naturel, fe pourfitivant
fans celle, & le plus grand ne foufïrant jamais que le
petit mangeât ni fe tînt à côté de lui ; on les nourrifïoit
de pain trempé & d’inteftins de gibier, de volaille &
autres débris de cuifine dont ils ne rebutoient rien, &
en même temps iis ne laHFoiënt pas de recueillir & de
(x) Les Sauvages des Antilles s’accommodenf aéantnoim de ce
mauvais gibier^.« Il y a., dit le P. Dutenre, „quantité .d£ petitçs.
» iflettes qui en font fî remplies , que tous les Sauvages , ,en >pa|îânt,.
» en chargent leurs pirogues, qui tiennent bien fpuvent autant
» qu’une chaloupe ; mais c’eft une choie plailànte de les voir accoM-
» moder par ces Sauvages, car ils les jettent tout entiers dans le feu
» fans les vider ni plumer, & la plume venant à le brûler, il lé fait
» une croûte tout autour de foifeau., dans laquelle U fe cuit.^Quand
» Hs le veulent manger, ils lèvent cette croûte , puis ouvrent Pouèau
»par la moitié\ je ne fais ce qu’ils font pou? le garder de la co'r-
» ruption; car je teur en ai vu manger quî étojent cuits huit jours
»auparavant, ce qui eft d’autant plus furprenant qu’il ne faut que
douze heures pour faire corrompre la plupart des viandes du pays. »
Hÿleire générale des Antilles,, tome 11, page 274+
chercher dans le jardin les.yejfs &, îe$: limaçons, iqu’ils
jfàvent bien tirer de leurs, coquilles; ils,talloient foûvent
fe baigner dans pn petit baffin, & au fbrtir de l’eau ils
fe fècouoient, battoient des ailes, en ,^’éleygnt fur leurs
pieds & luftroient enfùite leur plumage,, comme font
les oies & le§,canards ; ils rodoient pendant la nuit, &
fouvent on les a vus fc promener à dix & onze heures
dufpir; ils ne cachent pas, comme la plupart des autres
oifeaux, leur tête fops l’aile pour dormir; ils la tournent
feulement en arrière en plaçant; leur bec entre le deffus
dç l’ai|ë -êc le dos.
Lorfqu’on vouloit prendre ces oifeaux, iis cherchoient
à mordre & pinçoient. très-ferré ; ii falloir, pour éviter
le coup de bec & s’en rendre maître, leur jeter un mouchoir
fur la tête ; lorfqu’on les ppurfbivoit, ils accéléraient
leur courfè en étendant leurs ailes <: d’ordinaire iis tfnar-'
.choient lentement & d’affcz mauvaifè grâce*,' leur pareffe
|è marquoit jufque dans leur colère, car quand le plus
.grand ppurfuivoit l’autre, il fe conter>tpit de le fuivre ;au
pas, comme s’il n’eût pas été preffé de l’atteindre; cp
dernier à fon tour ne fèmhloit doubler le pas qu’autant
qu’il le failoit pour éviter le combat, & dès qu’il fe
fentoit fuffifàmment éloigné, ik^larrêtoit, & répétoit la
même manoeuvre autant de fois qu’il étoit pj^efTaire
pour être toujours hors de la portée de fon ennemi »
après quoi tous deux reftoient tranquilles, comme fi la
diftance fuffifoit pouf détruire l’antipathie^. Le plus foible
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