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1840.
■Janvier.
(lents. Quelques grandes glaces gisaient le long de
cette côte glacée ; mais en général la mer était presque
libre au large.
Quant à la nature de cette muraille énorme ,
comme à la vue de la terre Adélie, les avis furent
encore une fois partagés, les uns voulaient que ce
fût une niasse de glace compacte et indépendante de
toute terre, les autres, et je partage cette opinion,
soutenaient que cette formidable ceinture servait au
moins d’enveloppe, de croûte, à une base solide, soit de
terre, soit de rochers, soit même de hauts-fonds épars
autour d’une grande terre. En cela, je me fonde toujours
sur le principe qu’aucune glace d’une grande
étendue ne peut se former en pleine mer, et qu’il
lui faut toujours un point d’appui solide pour lui permettre
de s’établir à poste fixe. Ainsi, dans les régions
polaires arctiques, on voit en hiver de grandes
étendues de côtes entièrement ensevelies sons d’épaisses
couches de glace. Ainsi, même dans les régions
septentrionales de la France, on voit, après
d’abondantes chutes de neige suivies d’une forte gelée
, on voit, dis-je, les inégalités du sol s’effacer peu
à peu, et souvent disparaître complètement sous les
couches de neige qui les recouvrent. Seulement, dans
cette hypothèse, j’avoue qu’il est difficile d’expliquer
la parfaite uniformité des couches de glace qui
formaient notre grande muraille; il me répugne d’admettre
que des masses aussi gigantesques soient le
produit d’une seule année, et, s’il en était autrement,
l’on devrait y distinguer l’apport des années siiccessives
par des couches plus ou moins inclinées à l’horizon.
Quoi qu’il en soit, à dix heures du soir je donnai
la route au S. 0 ., après avoir imposé à la barrière
de glace que nous venions de reconnaître, le nom de
côte Clarie *.
Je m’attendais à retrouver, le lendemain 31, notre
muraille de glace, mais à trois heures du malin, bien
que j’eusse piqué au sud pendant la nuit, nous ne
vîmes plus à sa place qu’une formidable chaîne
d’îles flottantes. Nous distinguâmes en même temps
dans le S. 0 . une de ces vives clartés qui, au moment
du crépuscule, apparaissent au-dessus des
champs de glace. Bientôt, en effet, dans cette direction
, nous aperçûmes une banquise qui se développait
dans l’ouest et le N. 0 ., aussi loin que la
vue pouvait s’étendre, et qui semblait former un
grand golfe autour de nous. Cette banquise ressemblait
à toutes celles que nous avions déjà vues.
Elle était flanquée par d’immenses îles de glace, soudées
entre elles par une couche de glaçons moins
épais, mais qui présentaient encore un obstacle insurmontable
h nos navires.
Nous avions alors atteint le 128“ degré de longitude
; la variation, de N. E. qu’elle était, était devenue
N. 0 ., et même assez forte. Nous avions donc dépassé,
dans ces journées tempétueuses, le méridien où la
déclinaison est nulle. MM. Dumoulin et Coupvent
pensaient avoir recueilli des documents suffisants
' Voir le rapport de M. d’Urville parmi les pièces justificatives
contenues dans le lo® volume.
VIII. >12
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