' i t
lî'
378 BiOGKAPlilES.
heures et demie du matin. 11 n ’a v a i t pas encore vingt-sept ans !
Né le i3 janvier 1810 à Port-Louis , la vue de la mer lui avait
inspiré de bonne heure le goût de la vie aventureuse des marins.
Des traditions de famille aidèrent cette vocation naissante ; elles
conduisirent le jeune Gourdin à servir dans la marine militaire. A
sa sortie de l'école navale établie en rade de Brest, il débuta, vers la
fin de i83o, dans la carrière de son ch o ix , par une campagne aux
Antilles sur la frégate ïHermione. Au retour, au mois de septembre
1 8 3 i , il fut embarqué sur la frégate la Sirène, puis sur la gabarre
la Marne, avec laquelle il visita Cayenne et les côtes voisines. En
i833 il passa sur la frégate la Junon; mais bientôt il reçut Tordre
d’embarquer de nouveau sur la frégate Y Hermione qui avait vu
son début dans la navigation ; il partit pour la station du Brés
il, le 27 octobre de la même année, à la veille de quitter l’aiguillette
des élèves pour l’épaulette des enseignes de vaisseau. En
effet, sa nomination lût signée le 6 janvier suivant ; il avait alors
vingt-un ans. Pourvu de bonne heure du grade qu’il ambitionnait,
plein de zèle pour un service qu’il aimait, il envisageait
avec confiance l’avenir qui s’ouvrait sous d’heureux auspices,
et quoique la navigation fut accompagnées pour lui de malaises
pénibles, il savait les supporter et les combattre avec une mâle
énergie. Lorsque Y Hermione rentra au port, quinze mois aprèi le
départ, il sollicita un congé pour aller embrasser ses vieux parents,
qu’il n’avait pas vus depuis sa sortie du vaisseau école,
et qui, après cette dernière entrevue, ne devaient malheureusement
plus le revoir.
A l’expii’ation de son congé. Gourdin fut embarqué momentanément
sur le stationnaire le Lézard, puis sur le bateau a vapeur
le Ramier, destiné à un service très-actif sur les côtes de l’Algérie.
Il resta environ un an sur ce navire, qu’il quitta à Toulon le
17 avril 1837. Vers cette époque, l’expédition de Y Astrolabe el
de la Zélée venait d’être résolue. L’itinéraire, le but de ce long
voyage, le nom du chef qui devait le diriger, avaient excité 1 enthousiasme
de beaucoup de jeunes officiers. Plusieurs d’entre
i;\ix sollicitèrent d’être embarqués sur l’une ou 1 autre corvette ;
BIOGRAPHIES. 379
Gourdin, surtout, désirait vivement un embarquement qu’il considérait
comme une faveur, et reçut avccjoie la destination qu il
recherchait.
La vue de la mer avait décidé de sa vocation. Des traditions de
famille l’avaient conduit à servir dans la marine militaire; l’exemple
de son oncle, le brave vice-amiral Jurien, qui, dans sa jeunesse,
avait pris part à l’expédition de d’Entrecateaux, devait aussi influer
sur sa carrière. C’est ainsi que dans la marine les travaux el le
dévouement de certaines familles se transmettent comme un legs
et se renouvellent comme une obligation imposée de génération
en génération. Le récit des événements survenus dans le cours du
voyage de la Recherche avait charmé l’imagination de Gourdin ,
et fait naître le vif désir de visiter et d’explorer à son tour les régions
mystérieuses de notre globe. Le tableau des scènes décrites
parles anciens navigateurs, au sein de contrées ignorées, parmi
de sauvages peuplades, excitaient son ardeur et son enthousiasme.
Avide d’instruction,, désireux d’attacher son nom à quelques travaux
scientifiques, il se complaisait dans la pensée queles recherches
qu’il accomplirait pourraient être de quelque u tilité , et
p u is , dans le fond de son coeur , il concevait l’espoir secret
que lui a u ssi, en retour des privations et des périls qu’il allait
affronter, il pourrait recueillir un peu de cette renommée et de
cette gloire, qui seules aident et conduisent à l’abnégation des
sentiments et des intérêts les plus chers. Telle était la perspective
qu’il envisageait. Il partit, plein de confiance et d’ardeur !... 11
ne devait pas revenir.
Le 22 octobre 1839 , il ressentit les premiers symptômes de la
cruelle maladie qui régnait à bord. En peu de jours, elle fit de rapides
progrès. Gourdin avait ti’op bien appris à connaître, pendant
le séjour qu’il avait fait aux Antilles , la marche et les ravages
du mal dont il était atteint, pour s’abuser sur son état.
Les soins'presque maternels des chirurgiens, les précautions les
plus minutieuses, ne purent lui faire illusion. 11 se sentit perdu.
11 se renferma dès loi s dans un silence plein d’une énergique
résignation; mais peut-être aussi d’amers regrets. Ne voj-ait-il