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d’une heure, il nous fallut longer cette muraille verticale,
en nous appuyant sur des pointes de rochers
qui formaient comme une corniche au-dessus du précipice.
Le moindre faux pas, un étourdissement nous
eût entraînés dans l’abîme sans que rien pût nous
arrêter. Un instant même, nous dûmes craindre de
voir tous nos efforts échouer devant les difficultés qui
se présentaient devant nous. Nous rencontrâmes un
ravin profond et d’une pente excessivement rapide,
qui semblait faire échancrure dans la muraille de
rocher et conduire jusqu’à son pied. Aussitôt nos
guides se hâtèrent de nous la désigner comme étant
le chemin qui devait nous conduire à la forêt. Nous
eûmes l’imprudence de les suivre, mais bientôt nous
nous trouvâmes de nouveau au-dessus d’un précipice,
et il nous fallut revenir sur nos pas. Quelques herbes
devinrent alors notre seul point d’appui ; si dans ce
moment-là le pied nous eût glissé, rien n’auraitpii nous
arrêter. Il était évident pour nous que nos guides
étaient complètement désorientés ; ils ne s’occupaient
même plus de nous. Nous dûmes peut-être à cette
circonstance d’échapper aux dangers réels de la position
où ils nous avaient placés ; en effet, M. Coupvent
et moi, qui ne nous quittions point, nous par-
vîmmes à regagner le sommet de la montagne, et
alors nous pûmes choisir un côté dont la pente était
douce et qui nous ramena promptement à la forêt :
mais alors la nuit était devenue très-noire. Nous aperçûmes
au loin les lumières de la ville. Un instant
nous espérâmes même de pouvoir bientôt nous en
approcher, en suivant un petit ruisseau qui pendant
longtemps servit à diriger notre route, mais bientôt
les arbres que nous rencontrions sur ses bords devinrent
tellement serrés, qu’il fallut nous arrêter et attendre
le jour pour nous guider. Il était onze heures et
demie ; la nuit était des plus froides, et nous étions
ruisselants de sueur. Nos guides, qui presque tous
étaient munis de vêtements en fourrures, ne tardèrent
pas à s’endormir ; quant à nous, nous grelottâmes
le reste de la nuit, malgré les feux que nous
avions allumés.
« A quatre heures du matin, nous nous remîmes en
route, nous retrouvâmes bientôt le ruisseau dont
le cours avait servi à nous guider la veille ; nous le
suivîmes encore, et nous ne tardâmes pas à arriver
au pied de la montagne. Ce petit ruisseau est précisément
celui qui traverse Hobart-Toxvn; avant de
se jeter dans la Derwent, il arrose une petite plaine
des plus fertiles; il met en mouvement une scierie et
un moulin appartenant à un riche industriel anglais.
Avant de rentrer dans la ville, nous visitâmes ces établissements,
dont le propriétaire, M. de Grave, qui
déjà avait fait la connaissance de nos états-majors,
nous fit les honneurs avec une bienveillance et une
politesse parfaites. A midi, nous étions de retour à
Hobart-Town. J’avais emporté mon fusil, dans l’espérance
de rendre cette course profitable aux sciences
naturelles ; mais les forêts que nous venions de parcourir
nous avaient paru d’une pauvreté remarquable
sous le rapport des espèces vivantes. Pendant les deux
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