18.Î9.
Octobre. blait se diriger comme nous sur Batavia. Mon intention
étant de ne faire qu’un très-court séjour sur
cette rade, je ne voulus point engager nos corvettes
jusqu’au fond de la baie. Le lendemain, à trois heures
de 1 après-midi, nous laissâmes tomber l’ancre par six
brasses de fond, à un demi-mille de la petite île
Leyden.
Aussitôt j’expédiai à terre un canot commandé par
un élève, afin d’y conduire M. Ducorps , chargé d’activer
l’envoi de nos vins et de régler les comptes du
fournisseur. Je disposai ensuite du reste de ma soirée
pour aller faire, avec M. Dumoulin, une promenade
sur l’île voisine du mouillage; nous la trouvâmes
envahie par des moustiques qui ne nous laissèrent de
repos que lorsque nous fûmes plongés dans l’eau. Cet
îlot est formé par un pâté de corail recouvert par du
sable sur lequel ont pris racine quelques chétifs arbrisseaux.
Ses seuls habitants sont des rats, qui paraissent
y être très-nombreux. Cet îlot sert aussi de lieu
de sépulture, car nous y remarquâmes des fosses récemment
creusées. La rade de Batavia présentait de
là un coup d’oeil très-animé. J’aperçus avec plaisir,
au milieu des navires mouillés sur la rade, le pavillon
français, flottant en six ou sept points diiférents. La
pluie nous chassa de cette petite terre, et nous força
à regagner le bord vers neuf heures du soir. Le
canot que j’avais envoyé à la ville n’était point encore
de retour ; il lui avait fallu près de trois heures pour
atteindre le rivage. Il ne i-enfra qu’à une heure avancée
de la nuit.
Le lendemain de bonne heure, plusieurs praos
malais apportèrent à nos navires nos provisions de
vin et de fromage, qui furent immédiatement embarquées
; mais il nous fallut attendre l’arrivée de
M. Ducorps, qui ne rentra que vers onze heures. Du
reste, le calme le plus complet régnait sur la rade.
Les navires qui avaient appareillé dans la matinée
s’étaient à peine éloignés de la terre. M. Ducorps avait
éprouvé les plus grandes difficultés pour regagner le
navire. Privé d’embarcation, il n’avait pu à aucun
prix décider les Malais à le reconduire à bord. Enfin,
il avait fini par trouver un bateau qui, moyennant
le prix excessif de 30 francs, avait été mis à sa
disposition pour gagner le bâtiment français le plus
proche de la ville, et il dut à l’obligeance de M. Paulin,
second du navire où il avait abordé, de pouvoir
atteindre VAstrolabe.
Malgré mon impatience de remettre sous voile, je
dus attendre le lendemain pour continuer ma route
en longeant la côte de Java ; nous utilisâmes cette
traversée pour faire l’hydrographie des terres en vue.
Le 7 octobre, à midi, nous entrions dans le détroit de
la Sonde. La brise était très-forte et contraire à notre
trajet; il fallut louvoyer avec une mer dure. Le détroit
de la Sonde est constamment sillonné par un
grand nombre de navires de toutes nations ; nous
reconnûmes avec plaisir les couleurs françaises sur
l’un d’eux, qui, en passant près de nous, nous salua
du pavillon. Malgré le vent contraire, nous franchîmes
assez vite la partie du détroit la plus resserrée
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