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pas l’échafaudage de ses espérances, ses idées de gloire et de renommée
pencher et s’éci’ouler inopinément. 11 ne voulut accepter
ni encouragements, ni consolations de ses camarades ; il avait
compris que sa position était désespérée , et sembla concentrer
ses pensées vers les membres de sa famille, auxquels il portait
une vive affection. 11 articulait quelquefois leui’s noms, surtout
celui de son frère, qui, lui aussi, sert dans la marine, et à qui il
léguait sans doute, mentalement, les devoirs qu’il ne devait plus
pouvoir accomplir On avait vainement pris toutes les mesures
imaginables pour lui cacher la mort de finfortuné Marescot du
Tbilleul ; il l’avait pi’essentie, il la devina. Peu de jours après,
il fit appeler les médecins pour les remercier avec effusion des
soins qu’il avait reçus, mais il refusa d’ajouter foi aux espérances
qu’ils tentaient de lui donner ; puis , tournant sa tête vers les parois
du navire, il attendit l’heure suprême avec le calme stoïque
d’une âme fortement trempée !...
A l’aube, la mort vint mettre un terme à ses souffrances ! A dix
beures du soir, le même jour, les officiers et les marins encore valides
de \Astrolabe étaient silencieusement groupés autour d’un
sabord ouvert. La mer houleuse venait rejaillir jusqu’à l’ouverture
de la batterie et semblait réclamer le dépôt qu’on alhiit lui
confier. Bientôt un bruit sourd, une traînée phorphorescente
dans le sillage de la coi’vette suivirent l’immersion de celui qui
avait été pour tous un compagnon affectueux et dévoué, uu homme
doué d’un coeur rempli d’énergie et d’excellentes qualités, un officier
brave, intelligent, plein d’ardeur et d’intrépidité, mort prématurément
à une immense distance de son pays!
Mort funeste, mais aussi glorieuse! N’est-il pas mort au service
de son pays , victime de son dévouement? Il a peu vécu ,
mais assez pour bien servir et emporter l’estime et les regrets de
ceux qui l’ont connu. Sa tombe, pour être ignorée, n’en est pas
moins consacrée dans la mémoire de ses compagnons , qui lui
donnent ici un nouveau tribut d’un douloureux souvenir.
( Un de ses amis, son compagnon de voyage. )
ERNEST GOUPIL.
Découvrir jusqu’au milieu des glaces polaires de nouveaux
pays, enrichir la science par d’immenses travaux exécutés au travers
des périls de tout genre, c’est là une glorieuse mission pour
le marin , pour le savant ; moins brillante peut-être et toutefois
encore digne d’envie est la part de gloire réservée à l’artiste qui
affronte les mêmes dangers. Sans lu i, en effet, le récit de ces découvertes
, l’exposition même de recherches et d’études multipliées
resteraient toujours vagues et confus.
Ernest Goupil avaitbien compris les services qu’il était appelé à
rendre comme dessinateur de l’expédition , et les planches qiù
portent son nom l’attestent, bien qu’il n’ait pu, ni surveiller la
reproduction sur pierre de ses dessins , ni surtout les compléter
pai- tout ce qu’une mémoire riche en souvenirs devait infailliblement
ajouter à plusieurs d’entre eux.
Ernest-Auguste Goupil est né à Châteaudun , le i4 avril i8 i4 .
Sa vie, qui devait s’éteindre, frappée par une cruelle épidémie, aux
extrémités du monde , commença au milieu de scènes non moins
funestes, et pendant que sa mère fuyait devant les désastres de
l’invasion ennemie. Né avant terme et faible de constitution , il
dut à son séjour prolongé dans cette jolie petite ville qui domine
la vallée du Loir, d’acquérir une organisation forte et capable de
lutter avec les dangers que plus tard il devait braver. Une vie active
et sans contrainte contribua sans doute en même temps à
développer ce goût pour la vie d’artiste , qui seule lui convenait.
Aussi, dès son retour à Paris, où l’amena son éducation universitaire
, montra-t-il un goût prononcé pour les voyages, en même
temps qu’il aspirait à l’illustration que plusieurs membres de sa
famille ont obtenue.
Ses études n'étaient point achevées, et déjà son impatience le
faisait entrer dans l’atelier de M. Watelet, son parent. Plus tard,