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Janvier.
exacte de la charpente géologique de ces terres, si on
n’avait pas pu y aborder. Quelque extraordinaire que
soit cette manière de faire de la géologie, elle prouve
combien, pour le naturaliste, les moindres observations
peuvent avoir de l’intérêt et souvent même
l’aider dans ses recherches, en le plaçant quelquefois
sur la voie des découvertes auxquelles elles semblent
être le plus étrangères.
« Le petit îlot sur lequel nous prîmes terre fait
parti d’un groupe de huit ou dix petites îles arrondies
au sommet, et présentant toutes à peu près les
mêmes formes. Ces îles sont séparées de la côte la
plus proche par im espace de 5 à 600 mètres. Nous
apercevions encore sur le rivage plusieurs sommets
entièrement découverts, et un cap dont la base était
aussi dépouillée de neige; mais nous remarquâmes
aussi une grande quantité de glace qui en rendait
l’approche très-difficile. Tous ces îlots, très-rappro-
chés les uns des autres, semblaient former une
chaîne continue, parallèle à la côte, et qui s’étendait
de l’est à l’ouest. Toutes les îles de glace qui étaient
accumulées dans la partie orientale et qui me parurent
échouées, recouvrent probablement d’autres
îlots semblables à ceux sur lesquels nous avions débarqué.
11 est certain que beaucoup de rochers doivent
rester ensevelis chaque année sous ces glaces
énormes, auxquelles ils servent de noyau. Peut-être
même la grande terre que nous apercevions devant
nous était-elle découpée par de nombreux canaux.
Les travaux hydrographiques qui ont été exécutés
dans ces parages ne sauraient avoir d’autre but que
de préciser la forme de ces glaciers au moment
de notre passage , sans indiquer le contour de la
côte, qui rarement doit être dépouillée de la croûte
épaisse qui recouvrait le sol.
« Nous ne quittâmes ces îlots qu’à neuf heures et
demie ; nous étions ravis des richesses que nous emportions.
Avant de déployer nos voiles, et pour dire
un dernier adieu à notre découverte, nous la saluâmes
d’un hourra général. Les échos de ces régions
silencieuses, troublés pour la première fois par des
voix humaines , répétèrent nos cr is, et reprirent
ensuite leur silence habituel, si sombre et si imposant
; poussés par une jolie brise d’est, nous fîmes
route sur nos navires, qui étaient alors bien au large,
et qui disparaissaient souvent dans leurs bordées derrière
les grandes îles de glace. Nous ne les ralliâmes
qu’à onze heures du soir. Le froid était alors extrêmement
piquant. Le thermomètre indiquait 5 degrés
au-dessous de zéro. L’extérieur de nos canots ainsi
que nos avirons était couvert d’une couche de glace.
Nous nous retrouvâmes avec bonheur à bord de nos
corvettes, heureux d’avoir pu ainsi compléter notre
découverte sans accidents, car, sous ce climat glacial
et capricieux, il est bon de ne jamais quitter son
navire pour longtemps. Le moindre vent qui surprendrait
un bâtiment sur une pareille côte, le forcerait
de suite à prendre le large, et à abandonner
ses embarcations. »
Après celte excursion, qui ne laissait plus aucun
i840.
Janvier.
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