1839. 1res. A mesure que nous montions, les maisons deve-
Décembre. • i i naient de plus en plus rares et moins opulentes. Nous
étions arrivés sur le bord de la forêt. Nous choisîmes
ce lieu pour déjeuner et pour nous reposer. Depuis la
veille j’éprouvais de fortes coliques et des douleurs
dans les reins. Je craignis un instant d’avoir trop
compté sur mes forces, et je me serais certainement
arrêté à cet endroit, si mon compagnon de route
M. Coupvent avait pu seul faire les observations.
« Nous ne nous reposâmes qu’une demi-heure ; nos
convicts en profitèrent pour faire leur thé et pour déjeuner.
Quant à nous, nous avions plus besoin de
repos que de nourriture. Pendant quelque temps encore,
nous suivîmes le cours du ruisseau. Sur ses
bords, la végétation offrait un caractère tout différent
de celui général à la Tasmanie. Ses rives étaient garnies
de fleurs et de petits arbrisseaux d’une verdure
magnifique. Bientôt même, nous fûmes obligés de
changer de route et d’abandonner notre ruisseau
conducteur, sur les bords duquel la forêt paraissait
compacte et impénétrable. Dès lors le chemin devint
plus difficile et la pente plus rapide. Le sol était couvert
de rochers morcelés, au milieu desquels s’élevaient
quelques arbres souffreteux de plus en plus
rares à mesure que nous avancions. Le sol cependant
n’était point privé d’humidité, car sur la hauteur
nous rencontrâmes de larges marécages dont
l’eau, filtrant lentement à travers les terres, donnait
naissance à plusieurs petits ruisseaux. Nos guides
avaient certainement pris le chemin le plus long pour
nous conduire à notre but. C’était peut-être aussi le
plus facile et le plus avantageux pour eux, dont les
épaules étaient embarrassées par les caisses de nos
instruments. Quoi qu’il en soit, ce ne fut que vers les
deux heures que nous pûmes atteindre le plateau qui
couronne le mont Wellington. Nous étions harassés
de fatigue, mais nous dûmes songer à commencer
sur-le-champ nos observations, afin de pouvoir les
terminer avant la nuit. Il va sans dire que MM. Dubouzet
et les officiers de la garnison, qui nous avaient
donné rendez-vous sur la montagne et qui nous avaient
chargés de leur porter à déjeuner, nous avaient précédés.
Ils étaient repartis depuis longtemps, lorsque
nous arrivâmes au sommet, pensant avec raison que
s’ils voulaient déjeuner, il serait pour eux plus prudent
de ne pas nous attendre plus longtemps.
« Nous étions parvenus à la partie la plus élevée de la
montagne par le côté diamétralement opposé à Hobart
Town. Le mont Wellington, autrefois appelé le
mont de la Table par l’expédition française commandée
parle contre-amiral d’Entrecasteaux, se termine
par un plateau d’une grande étendue. Il était difficile
d’en reconnaître le point culminant. Nous traversâmes
cette petite plaine dans toute son étendue, en
nous arrêtant de distance en distance pour y faire des
observations suivies. Nulle part nous n’y aperçûmes
aucune trace de végétation. Le sol était couvert par
d’énormes blocs de rochers jetés çà et là, et quelquefois
séparés par du sable. Enfin, à six heures du soir,
nous atteignîmes la partie du plateau qui surplombe