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la maladie qui devait l’enlever. Ce jeune et digne garçon,
tout dévoué au service, méritaità juste titre tous
les regrets qu’il fit naître.
« Le 2 novembre, à midi, nous étions, dit M. Jacquinot,
par 27 degrés de latitude sud. La dyssenterie,
qui lors de notre départ de Sumatra, avait attaqué
quelques-uns de nos hommes, et que les médecins
avaient eu l’espoir de voir bientôt disparaître sous
l’influence d’un changement de climat, non-seulement
persistait, mais elle s’était même portée plus tard sur
d’autres individus ; nous comptions alors une vingtaine
de malades, dont deux personnes de l’état-ma-
jor. A l’exception d’un domestique dont l’état était
désespéré, aucun des autres n’était encore dans une
position à donner des inquiétudes sérieuses, et nous
comptions bien que cette maladie finirait par céder
devant les soins des médecins. Le lendemain, à une
heure de l’après-midi, je fus prévenu que Louis P/7aMm,
domestique de l’état-major, venait de rendre le dernier
soupir. Cet homme, d’une constitution chétive ,
succomba aux attaques simultanées de la dyssenterie
et d’une inflammation de la vessie. Depuis plusieurs
jours il était dans un état d’abattementcomplet, qui ne
laissait plus aucun espoir ; il s’éteignit pour ainsi dire
sans souifrir. »
Le 5, l’équipage de ïAstrolabe confiait à la mer les
restes du nommé Roux, quartier-maître canonnier.
Ce malheureux, déjà âgé , avait voulu clore sa carrière
en prenant part, malgré mes conseils, à une
expédition aussi périlleuse. Il comptaii jouir des bénéfices
de la retraite aussitôt que VAstrolabe serait rentrée
dans le port. Il fut un des premiers atteints par l’épidémie.
Grâce aux soins du médecin, il était déjà convalescent,
lorsqu’il fit quelques écarts de régime qui
occasionnèrent une rechute à laquelle il ne put résister.
Le lendemain, VAstrolabe eut encore à regretter le
matelot Massé, remplissant à bord les fonctions de
coq (cuisinier de Féquipage). Cet homme ne faisait
partie de l’équipage que depuis notre relâche à Talca-
huano. En se voyant atteint par la maladie, cet infortuné
avait cru devoir avaler une forte infusion de poivre,
de cannelle et d’autres épices dans de l’eau-de-vie,
plutôt que d’avoir recours aux soins du médecin. Il espérait
obtenir de cet étrange remède une réaction favorable.
Il ne fit qu’ajouter à ses souffrances d’horribles
douleurs d’estomac, et il hâta Fbenre de sa
mort. Chaque jour la maladie faisait de rapides progrès.
M. Hombron, chirurgien-major de Y Astrolabe,
qui jusque-là avait pu consacrer tous ses soins au
soulagement des malades, fut atteint d’une irritation
générale des intestins, qui le força à garder le lit.
M. Dumontier, embarqué à bord de Y Astrolabe, en
qualité de chirurgien auxiliaire et dans le but de se
livrer à des études toutes spéciales, fut dès lors
chargé du service actif sous la direction du chirurgien
major. Je suis heureux d’ajouter que, par son
zèle et son dévouement, M. Dumontier sut pourvoir
à toutes les nécessités d’un service aussi pénible , et
il mérita toujours la reconnaissance et l’affection des
malades, dont il s’était déjà acquis la confiance.