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teur oensidéiable. üe loin, l e u r élévation fait croue à l’existence
de terres habitables; car, au premier coup d’oeil, il est naturel de
penser que d'aussi belles forêts appartiennent à des îles d’une rare
fertilité. Mais ces forêts sont dans-l’eau; quelques points du soi
qu’elles habitent sont toujours inondés , d'autres , au contraire ,
se découvrent à marée basse. Ainsi ces bois sont, par le fait,
implantés sur des hauts fonds, véritables terrains dalluvions
modernes , séparés entre eux par des canaux qui ne sont que les
ramifications du courant de la grande rivière, au limon de
laquelle ces îles submergées doivent leur existence. Cette rivière
est celle de Kotty , qui irès-probablement débouche dans la mer
par un delta.
La marée était aussi basse que possible quand nous abordâmes
l’une de ces prétendues terres, depuis le matin l’objet de
toutes nos convoitises et le motif de nos impatiences aigries par
les obstacles. Plusieurs d’entre nous virent distinctement des naturels
qui nous regardaient à travers les arbres ; l’on aperçut de
la fumée, i»résage de quelques habitations voisines. Quelques
personnes crurent avoir vu des kanguroos ; c’eût été au moins
une découverte , car on ne connaît pas d’animaux de cette espèce
à Bornéo ; mais nous reconnûmes bientôt que ces hommes ou ces
kanguroos n’étaient que des singes , et que la fumée n’était que
les vapeurs élevées de ces marécageuses localités.
Ou charge les armes, on se jette à l’eau, on se bâte, mais la
vase qui nous embourbe retient notre ardeur, chacun aspire à
atteindrepromptementla rive, pour s’affranchir le plus tôt possible
de cette pénible et insupportable situation. A chaque pas nous
enfoncions dans la boue jusqu’aux genoux. On arrive enfin......
mais, ô illusion! l’île n’est que vase récemment découverte
par la mer ; la vase molle y est même plus profonde encore ,
parce que le remous des courants l’y dépose sans cesse;
nous y entrons jusqu’au dessus des cuisses. On conçoit que,
dans une pareille position , le plus intrépide des chasseurs n’eût
pu facilement se livrer à son ardente activité. Une fatigue insur-
monlalde succède promptement à notre premier élan; plusieurs
personnes sont sur le point de tomber en syncope, tant l’épuisement
de nos Ibices est giand. Les moustiques nous attaquent
de tous côtés ; nous sommes contraints d'en défendre nos visages
avec nos mains remplies de boue ; nous ne parvenons à les chasser
qu’en augmentant le nombre des souillures plus ou moins grotesques
dont nos faces sont couvertes.
Cependant, nous ne tardâmes pas beaucoup à nous apercevoir
qu’il n’était pas nécessaire de faire une lieue en un quart d’heure
pour atteindre ces animaux, but de tant d’efforts impuissanls ; il.-i
étaient au-dessus de nos têtes, tapis derrière les plus grosses branches.
Le feu commença alors, et malgré la hauteur des arbres et
l’agilité des nasiques, nous en rapportâmes quatre à bord : deux
mâles magnifiques, hauls d’un mètre et d em i, et deux femelles,
une pleine et une autre vivante, mais blessée grièvement. Celle
dernière fut représentée par notre confrère Lebi eton ; son aquarelle
est l’expression parfaite de la nature. Après avoir été témoin
de l’air de raison et de réflexion de ces pauvres bètes, on sent
combien il est intéressant de pouvoir surprendre de pareils êtres
dans leur état de nature.
Rien n’égale, en effet, le ridicule des figures qui ont été données
dunasica, d’après l’imagination des artistes ; c’est bien loin
de la vérité !
Ces animaux passent d’un arbre à l'autre eu s’élançant de branche
en branche; aussi, courent-ils rarement sur le sol peu résistant
de leur aquatique patrie ; pourtant j’en ai vu uu sauter â
terre et bondir sur la surface de la vase avec beaucoup de légèreté,
k mon grand étonnnement. A l’inspection de leurs mains de derrière
, ma surprise diminua en remarquant qu’elles sont d’une
grande largeur et qu’une palmuie assez considérable occupe
l’espace interdigital.
Le ventre de ces animaux est très-volumineux, il rappelle
celui des herbivores ; or, la nourriture du Nasalis se compose
principalement des feuilles du Rbizophora gymnorbiza'; l e u r
* Les feuilles de cet arbre présentent un aliment dé li tâ t aux indigènes de
l 'Ar thipe l indien; ils en mangenl aussi le fruit cuit dans du vin de Palme.