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particulière, et qui, bien qu’elle parût très-légère, n’en
devenait pas mojns très-sensible à la lunette. J’avais
cherché, pendant que les corvettes étaient en panne, à
faire sonder ; malheureusement toutes nos lignes destinées
h cet usage étaient à peu près hors de service. Je
n’avais pu envoyer la sonde que par cent brasses, sans
trouver le fond. Il est certain, puisque la glace sur
laquelle MM. Dumoulin et Coupvent avaient fait leurs
observations ne s’appuyait point sur le sol, il est certain
, dis-je, que la mer conserve là une très-grande
profondeur.
Les deux embarcations qui s’étaient dirigées sur
la terre ne rentrèrent à bord qu’à dix heures et
demie, chargées de fragments de rochers arrachés
au rivage. Noici le récit consigné dans le journal
de M. Dubouzet sur cette intéressante excursion.
« Pendant la journée entière tous nos yeux
avaient été fixés sur la côte, pour lâcher d’y découvrir
quelque point où l’on vît autre chose que de la
neige et de la glace. Enfin, au moment où nous commencions
à désespérer, et après avoir dépassé un
amas de grandes îles flottantes qui nous masquait
tout à fait le rivage , nous aperçûmes plusieurs petits
îlots dont les flancs, dépouillés de neige, nous montrèrent
cette teinte de terre noirâtre si ardemment
désirée. Quelques instants après, nous vîmes le canot
major de V Astrolabe se détacher de cette corvette
et se diriger vers le rivage avec un officier et deux
naturalistes. Immédiatement, je demandai au commandant
Jacquinot de m’embarquer dans sa yole
qu’il faisait mettre à la mer pour l’envoyer â terre. Le
canot de VAstrolabe avait déjà pris beaiieoup d’avance
sur nous; nous forçâmes la nage, et au bout de deux
heures et demie, nous atteignîmes le plus rapproché
des îlots aperçus. Nos hommes étaient tellement
pleins d’ardeur qu’ils s’aperçurent à peine des efforts
qu’ils venaient de faire pour franchir, en si peu de
temps, une distance de plus de sept milles. Chemin
faisant, nous rangeâmes de très-près d’immenses îles
de glace. Leurs flancs perpendiculaires, rongés par
la mer, étaient couronnés à leur sommet par de longues
aiguilles d’une glace verdâtre, formées à la suite
du dégel. Leur aspect était on ne peut plus imposant.
Elles paraissaient former, dans l’est des îlots sur lesquels
nous nous dirigions, une digue redoutable ; ce
qui me fit penser qu’elles étaient échouées peut-être
par quatre-vingts à cent brasses de fond. Leur hauteur
indiquait à peu près ce tirant d’eau. La mer élait
couverte de débris de glace, qui nous forçaient à faire
beaucoup de sinuosités. Sur ces glaçons, nous apercevions
une foule de pingoins, qui, dffin air stupide,
nous regardaient tranquillement passer.
« Il était près de neuf heures lorsque, à notre grande pi. c lx x
joie, nous prîmes terre sur la partie ouest de l’îlot le
plus occidental et le plus élevé. Le canot de V Astrolabe
était arrivé un instant avant nous ; déjà les hommes
qui le montaient étaient grimpés sur les flancs escarpés
de ce rocher. Ils précipitaient en bas les pingoins,
fort étonnés de se voir dépossédés si brutalement de
l’île dont ils étaient les seuls habitants. Nous sau