impossible de nous procurer du vin à Samaiang, et
que nous ne pourrions en trouver qu’à Batavia. Cette
circonstance me contraria beaucoup, car nous avions
grand besoin de renouveler notre provision; et d’un
autre côté, je ne voulais donner à la relâche de Samarang
que le temps strictement nécessaire pour
embarquer les vivres dont nous étions dépourvus.
J’avais hâte de remettre sous voile ; les contrariétés
que nous venions d’éprouver, pendant notre navigation
dans le détroit de Makassar, me faisaient une
nécessité de ne pas perdre un seul instant. Je voulais
en elfet arriver à Hobart-Town avant la fin de
l’année, afin de pouvoir profiter de la saison favorable
pour retourner dans les régions glaciales. Forcé
de relâcher de nouveau à Batavia pour me procurer
les vins dont nous avions besoin, je fis prier M. Tissot
de vouloir bien écrire à M. Lagnier, afin qu’il
nous fît préparer d’avance cette provision de campagne,
et que nous n’eussions plus qu’à l’embarquer
lorsque nous nous présenterions sur la rade de
Batavia.
Aussitôt après le retour de M. Duroch, VAstrolabe
salua le pavillon hollandais de vingt-un coups de
canon, qui lui furent immédiatement rendus par le
navire stationnaire mouillé sur rade. Ensuite les communications
furent ouvertes avec la terre. Plusieurs
officiers en profitèrent dès le jour même pour aller
parcourir la ville. Quant à moi, je souffrais toujoui s
beaucoup des entrailles, et bien que j’éprouvasse déjà
un grand soulagement à respirer l’air doux et embaumé
qui venait de terre, et surtout à ne plus être
secoué par la houle, je ne me sentis point assez fort
pour quitter le navire, et je renvoyai au lendemain
ma visite au résident. Dans la soirée, je reçus à mon
bord le lieutenant de vaisseau commandant le stationnaire
; il me fit, de la manière la plus cordiale, des
offres de service, et il se chargea, de son propre
mouvement, de nous fournir trente Malais de son
équipage, pour faire le service de nos embarcations.
Bien que le climat de Samarang passe pour être
plus salubre encore que celui de Batavia, je redoutais
constamment de voir nos équipages envahis par
les maladies, et je m’entourai de toutes les précautions
possibles pour les éviter : aussi l’offre qui nous
fut faite fut-elle acceptée avec reconnaissance.
L’aspect de la terre, vue du mouillage, est à peu
près le même que celui de Batavia. La côte est si
basse, que c’est à peine, si on la distingue ; toutefois
on aperçoit, à une petite distance, dans l’intérieur
des terres, une série de jolis coteaux et de montagnes
plus élevées, dont la hauteur augmente par
gradation jusqu’à la majestueuse chaîne des monts
Merbabou et Prahou. Ceux-ci s’élèvent à une hauteur
considérable; une distance de près de vingt lieues
les sépare du rivage, et cependant, par un temps
clair, ils apparaissent de la rade comme s’ils n’é taient
que fort peu éloignés. La ville de Samarang,
comme celle de Batavia, est établie sur le bord d’une
rivière ; elle rivalise , par son commerce, sa population
et le luxe de ses habitations, avec la capitale