
Quatre langages distincts se sont développés simultanément
mais inégalement dans 1 humanité, ils se développent
encore aujourd’hui, suivant le même ordre dans
chaque homme et correspondent à l’accroissement simultané,
mais inégal des facultés de 1 âme. Le premier
de ces langages est le cri, le son inarticulé, 1 expression
de la sensibilité physique et affective. Le second langage,
aussi ancien que le premier, est le langage d action,
le geste et le mouvement de la physionomie, il
correspond à la volonté, il indique le fait, 1 acte avec tous
les rapports de lieu et de manière, c’est à lui qu’il appartient
d’exprimer la menace, la prière et le commandement.
Les animaux sont doués de ces deux langages, qui
suffisent également à la première enfance de l’homme.
La langue des sons inarticulés, des cris et. des gestes,
est spontanée, universelle, immuable, a Elle est de tous
les temps et de tous les lieux. Elle fut connue de nos
premiers pères, elle sera connue de nos derniers neveux.
Savants, ignorants, tout le monde la comprend. Que l’un
de nous soit transporté aux extrémités du globe, au milieu
d’une horde sauvage : Croyez-vous qu’il ne saura
pas exprimer les besoins les plus pressants de la vie ?
Croyez-vous qu’il se méprenne sur les signes d un refus
barbare, ou d’une intention généreuse et compatissante
? a
Le troisième langage appartient exclusivement à 1 espèce
humaine, il est produit par 1 intelligence au contact
du monde extérieur, il étend le domaine des communications
au delà du moment présent ; il donne à tous les
êtres de la création, des noms significatifs. C’est le langage
d’imitation, qui procède par onomatopée. Ce langage
est encore en grande partie universel, parce que
les mêmes sons naturels imités par des organes semblables,
ont dû produire des mots semblables.
Le quatrième et dernier langage est celui qui se
compose de sons articulés et combines. S éloignant de
plus en plus des cris et des sons primitifs, il se substitue
à toutes les autres manifestations de l’âme et devient un
signe, en apparence-arbitraire, de la pensée;
Formé sous l’influence d’un grand nombre de circonstances
diverses, il cesse d’être universel.
Chacun de ces langages est figuré par une écriture
spéciale. Ainsi, le langage de cri et de geste est représenté
par l’hiéroglyphe mimique. Ce signe est imparfait
sans doute, mais il est encore universel, parce que le
geste et le cri étant deux expressions simultanées d’un
même mouvement de l’âme, n’ont pu être séparés dans
la pensée. La figure du suppliant, celle de l’homme qui
se détourne avec horreur, celle du guerrier qui menace
de ses armes, ont indiqué dans l’origine des exclamations
et des gestes que l’écriture phonétique n’a pu jusqu’ici
rendre avec autant de fidélité et d énergie, dans la
table réduite de ses interjections, qui après tout, n ont
pas encore perdu leur caractère d’universalité, et resteront
jusqu’au dernier jour, semblables chez tous les
peuples du monde.