
diversement colorés, converger et se réunir en un seul
point lumineux. Que j’essaie de déplacer ce centre du
langage, je ne conçois plus rien à la ressemblance plus
ou moins prononcée de toutes ces figures ; je n’entends
plus qu’une mêlée confuse de sons discordants, là où
j’avais cru reconnaître une progression harmonieuse.
Mais le phénomène existe, tel que je viens de le décrire,
et brille avec éclat ; or il ne saurait avoir qu’une cause,
c’est que le berceau du genre humain fut situé entre la
mer Caspienne et le golfe Persique, près de l’Euphrate
et du Tigre.
§ V.
Contre ces arguments s’élèvent les objections suivantes
:
Il y a dans la langue de chaque peuple, un grand
nombre de mots qui se trouvent radicalement dans les
idiomes qui appartiennent à la même famille glossale.
Chaque fois que deux peuples sont longtemps en contact
ils se font des emprunts réciproques de mots.
Quand un peuple a beaucoup voyagé, quand il a séjourné
chez des nations parvenues à un haut degré de
civilisation, sa langue est surchargée de termes étrangers.
Or aucun peuple n’a voyagé autant que le peuple
Hébreu, aucun n’a séjourné plus longtemps chez autrui,
aucun n’a été soumis à des rapports aussi intimes, aussi
prolongés avec des maîtres puissants.
Tous les mots étrangers que vous retrouvez dans
l’hébreu ne sont pas des signes de son antériorité, mais
les preuves de sa lente formation pendant la vie nomade
des patriarches et les longues captivités d’Egypte et de
Babylone. Lisez le dixième chapitre de la Genèse, vous
verrez que les enfants de Japhel et de Chus avaient déjà
fondé et conquis des empires puissants, à l’cpoque où les
fils d’IIéber n’étaient encore qu’une petite famille errante;
d’après le Irenle-unième chapitre de la Genèse, l’hébreu
loin d avoir été la langue d’Adam, n’aurait pas même été
celle d’Abraham, qui aurait parlé le Chaldéen, jusqu’aux
premiers temps de son séjour en Palestine.
Au temps de Josué nous voyons les Israélites communiquer
sans interprète avec les peuples de la terre promise,
l’hébreu serait-il ainsi que paraît le croire Isaïe
(ch. 18), une langue chananéenne? Le savant Adelung
établit, dans son Mithridate, que l’hébreu est la plus
jeune des diverses langues soeurs parlées par la postérité
de Sem, et qu’il n’a pu être formé qu’après le chaldéen,
l’assyrien, l’élamite, le syriaque et le phénicien.
Les arguments tirés de la valeur des noms d’animaux
n ont pas un grand poids; si l’onomatopée est le signe
de 1 antiquité, le Chinois et le Mantchou l’emportent à
cet égard sur toutes les langues du monde.
Dans toutes les langues mères, les noms des dieux et
des personnages mythiques sont significatifs, ce fait n’est
qu’une preuve de l’origine nationale d’un culte. Or, suivant
Grotius, les noms bibliques qui n’ont pas de sens
dans la langue hébraïque sont très-nombreux, et la