
seront séparés par la diversité du langage. — Suivant
quelques philosophes, cette diversité cessera d’elle-même
par la seule fréquence des relations. 11 est vrai que la
multiplicité des rapports prépare et amène chaque jour
quelques progrès dans la fusion des idiomes ; à chaque
heure les langues existantes se font, sous nos yeux, des-
emprunts réciproques, et, par l’effet de la simple continuation
de cette sorte de commerce, un temps doit venir,
où, chaque langue ayant emprunté aux autres ce qui lui
manquait pour sa perfection, elles seront par ce fait devenues
toutes identiques. Et quand il n’y aura plus
qu’une seule langue pour toute la terre, cette langue ne
sera plus ni le français, ni l’arabe, ni le chinois, ni aucun
des idiomes qui se partagent aujourd’hui la population
du globe, mais une langue à la composition de
laquelle auront concouru toutes les autres, en raison des
qualités propres à chacune.
Mais combien faudrait-il de siècles pour arriver à cette
harmonie !
La science ne peut-elle pas accomplir ou hâter l’oeuvre
lente du temps, en simplifiant l’étude des langues à un tel
point que, tout en subsistant, la diversité des idiomes
cesse d’être un obstacle à l’échange des pensées.
Oui, il existe une science qui peut accomplir celte
oeuvre. Cette science n’a pas encore reçu de nom, et je
suis obligé de la désigner par une périphrase ; c’est la
philosophie générale du langage et des signes graphiques
de la pensée ; c’est la science profonde des manifestations
successives de la parole divine, du Logos éternel
au sein de l’espèce humaine.
Sous les noms de symbolisme, d’esthétique, de paléographie,
de grammaire générale, de philologie comparée,
quelques branches de la philosophie du langage
sont étudiées avec succès par d’excellents esprits, mais
on n’est pas encore arrivé à la tige commune. Une vaste
synthèse n’a pas encore uni les matériaux épars fournis
par les patientes analyses. L’attention du monde savant
n’est pas encore attirée sur les problèmes sans nombre,
sur les applications utiles, sur les arts pratiques, sur les
formes vivantes et populaires que recèle en son vaste
sein la philosophie du langage.
On ne sait pas assez à quels immenses résultats conduirait
la solution des problèmes suivants :
I.
Trouver un moyen graphique, matériel d’apprendre
presque instantanément et de fixer sans peine dans la
mémoire les formes bizarres et compliquées des alphabets
asiatiques ; un moyen de faciliter aux Orientaux l’étude
de l’alphabet romain.
IL
Grouper autour du français les langues d’origine latine,
faciliter l’étude du français et de l’anglais en trouvant un
moyen d’indiquer la prononciation réelle sans altérer
l’orthographe étymologique. Moyen qui serait lui-même
applicable à toute transcription.