M É M O I R E
raeraoire-, un fafte d'érudition qui annonce des recherches profondes
dans une multitude d'auteurs anciens & modernes. Il ne croyoit pas
alors que les prifmes de bafalte fuflent volcaniques. L'autre®, s'appuyanc
fur une partie des mêmes paiîages Se des mêmes citations données par
fon confrere , a publié des obfervations plus méthodiques & mieux vues
•en général. N'auroit-ii pas été plus fimple, dans une queftion relative
à des faits , de laifler là les livres anciens & les ftatues antiques , fuir
l'origine defquelles il n'y a rien abfolument de bien poiicif Pour s'occuper
elîèntiellemenc de l'objet utile de la chofe , il falloic aller en
Egypte même vérifier le point de fai t , ou tout au moins y prendre des
renfeignemens exafts qui auroienc mis fin à toute difcullion. Je vais
placer ici quelques obfervations que j'ai faites fur le bafalte des Egyptiens
, non pour me jeter dans une queftion que la feule infpeftion des
lieux pourra réfoudre , mais pour faire voir qu'on a mis en oeuvre en
Egypte^un bafalte qui a tous les caraâeres d'une lave compare, &
pour démontrer en même temps qu'on trouve fur une des plus hautes
montagnes du Velay un bafalte qui fe rapproche beaucoup de celui-ci.
C'eft aux bontés de M. le duc de Chaulnes , & à fon amour pour les
fciences, que je dois les échantillons que je poflede 6c qu'il a bien voulu
me laifler détacher de deux ftatues de bafalte égyptiennes, mutilées 6c
non réparées, qui font fuite à la belle & nombreufe colleftion qu'il a rapportée
de fon voyage en Egypte. Ces deux ftatues font chargées de cara£
leres hiéroglyphiques ; la matiere en eft abfolument la même : c'eft
un bafaltegris cendré, un peu verdâtre,le bafaltes viridis orientalis -, ba-^
falda vcrda , dura, orientale-, bafalda cinerina ,dura, aiitica, orisntalcy
des Italiens, le même dont on voit de très-belles ftatues dans la villa
Albani & au capitale. Avant de le foumettre à aucun examen chymique,
j'ai voulu fuivre une méthode que je crois très-utile en hiftoire naturelle,
celle d'examiner d'abord à l'oeil nud cette pierre dont j'avois fait polir
une des faces, pour la fuivre & l'étudier plufieurs fois à l'aide de fortes
loupes , ôc décrire enfuite Amplement tout ce qui fe préfenteroit à ma
vue.
Voici le réfultat de mes obfervations.
Ce bafalte vu à l'oeil nud fur les parties qui ont été taillées, paroîc
plutôt noir que cendré : la face que j'ai fait polir préfent e également un
enfemble noir -, mais iorfqu'on l'examine de très-près & avec attention,
on s'apperçoit que le fond eft d'un gris foncé , nuancé d'une teinte vera
Mémoire fut le bafalte, où !'on traite des bafaltes
des anciens , par M. Defmareft , Ju l e i i maiijyi-,
publi¿ dans le volume de l'acadimic des fcieoces poiir
1773 , imprimé en 1777.
b Jeneveux pas dire qu'il n'y ait à Rome plufieurs
liarues véricablemenc égyptiennes ; mais fait-on de
quelle partie de l'Egypte le bafalte qui a fetvi i les
former a été tiré ? fait-on même fi les carrieres en
exifloient dans l'Egypte ? Dans quelle erreur ne fe
^teroir-on pas fi on regardoic toutes les ftatiies de
^ Kome & d'Italie en bafalte, comme égyptiennes ; car,
1°. lUf t «mnu que les Romains, jaloux de ces fortes
d'ouvrages mû fe vendoient fort chers, s'attachoicnt
a les eontre&ire ; & ayant chez eux un bafalte pour le
moinsaiifli dur & ipeu-prèsfcmblable, il n'eft pasnatureldecro.
requ'ilsen tiraiTent des blocs d'Egypte.
Plufieurs des flirues vcritablement égypciennes,
ayant ¿té mutilées, ont été reflaurées avec du bafaJte
d'Italie ; on fc fert même ailuellenenc de la lave
compaâe du monte Albano, qu'on nommef e l c e , pour
réparer celles qui ont foufFert de nouvelles dégradaii'qn
trouve mutilées dans des ruines. La
favant WinJiel..._..
le plus filr pour la >
de l'antiquité, fait'
chez les anciens , q
marbre ,
à qui la nature avoit donné le taél
nnoilTance exaâe des monumens
ir dans fon fublime traité de l'arc
la plupart des ftatucs en bafalte
' rudier à Rome, ont été refi
taurées .-or , je demande à quelle bévii 'expoferoit
pas un naturalifle qui, la loupe à
étudierlepied ou le bras ajouté à une ftatue égyptienne,
ou qui, fans la connoître, s'attacheroit i l'examen d'une
flatue copiée ? Il feroit des raifoniicmeus fur I'efpoce
& la qualité d'un bafalte qu'il prendroit pour antique
& particulier ^ l'Egypte, tandis qu'il a'auroic vu qu'une
lave formée par les volcans d'Italie.
dâtre
S U R L Ë B A S A L T E. tj j r
dâtre bien légere , fable & contenant une multitude de très-petits points
noirâtres, fort rapprochés les uns des autres r cette pierre offre dans fa
caffure une couleur grife cendrée un peu verdâtre, mais beaucoup moins
foncée que dans les faces taillées, & dans le côté qui eft poli ; on diftuigue
dans fa contexture de t rès-pet i teslamesblanches, à denli-vitreufes,
qur s'y trouvent irrégulièrement difleminées. On y voit aufli quelques
molécules luifantes.
Vu plufieurs fois au grand jour & même au foleil avec de bonnes
loupes, ce bafalte offre dans fa caffure les caraôeres fuivans. Une
furface raboteufe , inégale & recouverte par de très-petites écailles irreguheres,
plus ou moins épaiffes, d'une matiere vi treufe, à demi-tranfp
a r e n t e , nuancée d'une teinte verdâtre, douce & légere. Ces petites
•croûtes vitreufes paroiffent être un véritable feld-fpath un peu coloré par
ie fer. La pâte entiere de ce bafalte femble n'être compofée que de la
même fubftance, un peu plus ou un peu moins chargée en couleur, i". J'ai
f a i t tomber des rayons du foleil fur ce morceau, pour le mieux éclairer
& en chercher le vrai jour : je n'ai pu y découvrir qu'une fubftance homogene.
3°. Je fais que les perfonnes qui répéteront les mêmes expériences
, m'objefleront peut-être qu'on apperçoit fur les parties vitreufes
<3e^ce feld- fpath l égè r ement verdâtre, un fond beaucoup plus obfcur, qui pa.
î o î t même noir & un peu chatoyant fous certains jours ; mais pour peu
qu'on fixe l'objet avec attention , & qu'on s'arrête quelque temps à le
contempler, afin d'y accoutumer l 'oei l , on verra que cette fubftance, qui
paroît noire, ne fe préfent e ainfi que parce que la matiere devenant plus '
éparffe &plus compaSe fous ces écailles demi-tranfparentes, paroît plus
chargée en^ couleur. Ilpeut fe faire aufli qu'il y ait dans ce bafalte certaines
molécules plus riches en fer les unes que les autres; je ferois
•d'autant plus porté à le croire , qu'ayant fait polir avec grand foin un
morceau de ce bafalte antique, il a pris un poli brillant, quoiqu'un peu
m a t ; mais on y voit une multitude de très-petits points d'un noir plus
avivé & plus foncé , ce qui donne à ce bafalte un oeil fablé , qui fe remarque
d'une maniéré évidente , même à l'oeil nud , & qui f rappe davantage
Iorfqu'on fait ufage de la loupe. 4°. Je n'ai point apperçu dans ce
bafalte des corps étrangers, du moins dans les morceaux que je poffede ;
j 'y ai vu feulementun ou deuxpet i t s grains d'une matiere terne rougeâtre ,
il faut même fe fervir d' une forte lentille pour les diftinguer. Je ne regardé
ces légers accidens que comme un effet de l'altération de quelques
points ferrugineux. 5". Ce bafalte eft moins dur de quelques degrés que
le bafalte noir du Vivarais, puifque à l'aide d'une pointe bien acérée,
on peut l'attaquer & le mordre fans le faire partir en éclats ; tandis que
le bafalte noir de nos volcans, qui eft prefque intrai table, fe brife & s'écaille,
plutôt que de fe laiffer entamer par des inftrumens tranchans.
<5 . Lorfqu'on proinene une lame de couteau bien trempée , en appuyant
avec effort fur les caffures du bafalte égyptien , la lame y mord
un peu , & dès-lors la matiere prend fur cette fuperficie ainfi égrugée un
oeil blanc, ce qui eft occafionné par l a divifion des molécules. Vu en cet
état le grain de ce bafalte paroît d'un gris blanc, femé de petites taches
noires qui ne font que des portions plus dures & plus Compaites. L'on
voit après cette opération des particules métalliques brillantes; mais il
M m
i
i
1 ^J