• «ih
fi
^Qî VO L C A N S ÉTEINTS
âÏÊue & demie , m'e^ïhorta à y aller, & offrit dé m'y accompagner nous
partîmes le lendemain.
• Pour fe rendre de-Nejrûc au Colombkr , on prend, un chemin de tra«,
verfe ; on voyage pendant un demi-quart de lieue fur des laves poreU'^
les 5 qui font une-dépendance du cratere de la. .Grûvenne de Montp«-{at
•qu'on laia'e fur 1 adroite pour aller gagner le bourg de MaiV^w-Les environs
de Mairas font compofés d'un granit quartïéux, friable -, c'eft après
avoir, quitté ce lieu qu'on trouve une defcente très-rapide , qui mene
au grand chemin de Thmyts-, c'eft au bas de la montagne & à l'entrée
<iu chemin de Theiiyts , qu'on rencontre une maifon ifolée où il fauC
laifler les chevaux, pour delà fe rendre enfuite à pied, par un chemifl
«troit & rapide , à Neyrac , en traverfant la riviere à'Ardeche fur un pont
nommé le pont de Barrutel ; fi la riviere étoit bafle tranquille , il fàu-
<lroit la traverfer plus haut, fur une efpece de pont en planches : cette
derniere route eft plus courte Se plus commode , il eft même eflentiel
de veni r y obferver un point d'hiftoire naturelle, dont je parlerai dans
peu.
Je donne ici tous les détails de cet itinéraire, d'une maniere etendue,
parce que mon but eft moins de chercher à éviter des longueurs &
des circonftances minutieufes , que d'être utile aux voyageurs qui feroient
dans le cas de faire la traverfée du Colombier à Neyrac ; ceux au
contraire qui viennent par Aubenas, trouvent un beau chemin qui les
conduit en droiture à la maifon ifolée, voifine du pont de Barrutel.
La poiîtion de Neyrac eft fur une éminence, à mi-côte d'une montagne
volcanique j mais le foi fur lequel ce hameau repofe , eft mêlé de
maiTes détachées de bafalte & de granit j la montagne fupérieure atte^
nante eft un grand craiere q^ui a fourni une partie des laves de NejraCf
& les chauflées qui font à fon revers : Neyrac eft donc dominé par un
grand pic conique, couvert de laves poreufes, rouges & noires.
Le guide que j'avois pris nous conduifît dans Un champ labourable,'
difpofé en plan incliné & en maniere d'emphitéatre ; ils nous montra trois
efpeces d'ouvertures ou de puits creufés dans la terre, éloignés d'environ
30 pieds les uns des autres, & placés prefque fur là même ligne : la
plus grande de ces ouvertures, de forme plutôt ovale que ronde, a 5 pieds
de diamètre, fur 4 pieds r de profondeur ; elle .eft, ainfi que les autres,
intérieurement revêtue d'un petit mur ruftique, en pierre feche, pour
foutenir le terrein. Pluiîeurs payfans &. des femmes qui nous abordèrent
en voyant que nous nous approchions des puits , nous avertirent
d e ne pas nous expofer ài a vapeur, & nous apprirent que depuis peu
"de jour s il étoit venu deux MM. les vifiter , qu'un d'entr'eux ayanC
voulu s'approcher de trop près, en avoit été étourdi ( c'étoit M. le
inarquis de Geoffre &.M. l e marquis de Rochefauve, ainii qu'on le verra
bientôt dans la lettre qu'un d'eux m'écrivit à_ce fujet ) . J'obferve que
Jorfque je me rendis à Neyrac , il y avoit déjà plus de fix jours qu'il
pleuvoir coaftamraent ; nous nous étions munis d'une poule , & l'ayanC
attachée par les pieds , je la defcendis dans le trou principal j eUe y
refta plus de fix minutes fans donner le moindre figne d'incommodité :
j e plongeai alors une bougie allumée dans Tathmofphere méphytique ,
iûais elle ne s'y éteignit point, ce qui me prouva qu'il n'exiftoit aucune
D U V I V A R A I S. 30 J
efpece de vapeur dans ce puits ; j'y defcendis alors moi-même avec le
deifinateur qui m'accompagnoit, je me baiflai jufques au niveau de la,
terre , & je ne fentis pas la moindre exhalaifon.
Les payfans parurent fort étonnés de cet événement, & nous alTurerent
qu'ils n'avoient jamais vu leurs puits dans un femblable état;
qu'ils ne pouvoient rien y comprendre ; j'avoue que je n'y comprenois
autre chofe moi-même, Ci ce n'eft que j'étois alTez grandement porté à
regarder tout ce qui m'avoic été dit de ces puits comme une chofe fui^
pe£te; cependant la furprife 8c la bonne foi des habitans , l'unanimité
de leur rapport,me tenoient en fufpens, lorfque j'apperçus àune vingtaine
de pas de ces pui ts, à la tête d'une prairie , une efpece de baiïin quarré,
d'environ 12 pied de diametre, qui fixa mon attention.
Je voyois fur la furface de cette piece d'eau ( car ç'en étoit une ) un
mouvement d'ébullition qui me parut extraordinaire & qui excita ma
curiofitéj je m'approchai & vis que la furface étoit entièrement couverte
de globules d'air qui fe fuccédoient rapidement les uns les autres : je
reconnus dès-lors que l'air fixe jouoit ici un rôle, ÔC que l'eau dévoie en
être fortement imprégnée : je bus de cette eau , malgré les confeils réitérés
des payfans qui ne ceflbient de m'afîiirer qu'elle étoit dangereufej
î'en avalai malgré cela quelques verres en leur préfence , qui loin de
m'incommoder, me raiFraîchirent je fis enfuite quelques elîais qui me
convainquirent que les globules qui s'élevoient de cette eau, étoienc
un véritable gas méphytique ; je ne doutai plus dès-lors que tout ce qui
m'avoit été raconté au fujet des puits, ne fût très-vrai, & j'attribuai aux
longues pluies la ceflation du phénomene : l'exceffive quantité d'eau qui
etoit tombée, & qui s'étoit infiltrée dans la terre, devoit avoir abforbé la
plus grande partie des vapeurs qui s'exhaloient de ces ouvertures.
J'étois preiTé de me rendre dans le haut Vivarais & le Velay, je n'eus
donc pas le temps de refter plufîeurs jours à Neyrac^ pour attendre que
l'air fixe reparût; je partis en p r iant M. le prieur du Colombier de vouloir
bien dans la fuite revenir fur les lieux pour y tenter de nouvelles
expériences.
Mon voyage du haut Vivarais ayant duré trois femaines , je me rendis
au Puy f capitale du Velay, où je trouvai la lettre fuivante que m'y
avoit adrefle M. le marquis de Geoffre.
L E T T R E
De M. U Marquis DE GEOFFRE DE CHABRIGNÂCJ Colonel en fécond du
Bégiment de Bar rois, à M. FAVJAS DE SAINT-FOND.
J e vous ai attendu vainement ici, au milieu des volcans du Vivarais,'
que je parcourus avec toute l'ardeur d'un de vos profélytes le plus zélé.
Vos occupations vous ont fans doute empêché de venir me joindre à
Aubenas yzmii que nous en étions convenus. Voici quelques obfervations
faites en attendant, & je les foumets à vos lumieres. On difoit ici
vaguement qu'il exiftoit non loin du village de Neyrac^ à deux lieues
de cette ville, une efpece de grotte ou d'ouverture dans laquelle les
animaux qui y entroient, mouroient promptement. Vous vouliez vérifier.
i 'I