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354 VO L C A N S ÉTEINTS
Je dois, avant de finir, vous dire un mot de l'effet qu'a occafionné
h lave en fuiîon fur la pierre calcaire. Pour être à portée d'en bien juger,
j'ai fait fcier ÔC polir avec beaucoup de foin, piufieurs de ces morceaux,
rien n'eft auffi propre que le poliment pour développer & offrir
à la vue les moindres accidens d'une pierre. Je fais ufage de cette méthode
, non-feulement pour la plupart des pierres de mon cabinet, qui
fontfciées polies d'un côté, mais pour le plus grand nombre de mes
mines ; cette pratique eil moins de luxe que d'utilité.
Mes pierres calcaires avec bafalte, ont acquis un beau poli. La lave
a pris le luftre de la plus belle agate, & le fond de la pierre calcaire
eft devenu brillant, les points de contait Ôc de jondtion font d'une adhéfion
parfaite. Je n'ai rien vu, lorfque ces pierres offrent des furfaces polies,
qui pût annoncer l'effet de la calcination ôcde la converfîonen cliaux^
j'ai trouvé au contraire de petites zones calcaires très-faines & trèsvives
entre deux coulées de bafalte j mais voici ce qui m'a paru digne
d'attention :
1°. -C'eft que lebafalte voifin de la pierre calcaire , quoiqu'à piufieurs
pouces de diftance, & quoique très-dur ôctrès-noir, faitnéanmoins effervefcence
pendant quelque temps dans l'acide nitreux; cette ébullition,
cette aftion de l'acide ne vient point des parties extérieures qui peuvent
avoir enlevé avec elles quelques molécules calcaires. J'ai rompu
avec la plus grande attention des morceaux de ce bafalte dans des veines
éloignées du point de contaS: avec la pierre calcaire; j'ai eu foin de
prendre, dans les fragmens de bafalte que je mettois en épreuve, les
parties intérieures delà couche; malgré cela, j'ai toujours obfervé que
cette lave bouillonnoit très-vivement & pendant piufieurs minutes dans
l'eau forte, en un mot, jufqu'à ce que les molécules calcaires fuifent
entièrement combinéesavecl'acide. Si j'examinois,après que l'ébullition
étoit abat tue, ces morceaux de lave avec une forte loupe , je diftinguois
lesvuides qu'avoient laifles les points calcaires détruits.
2®. L o r f q u e je mettois également en expérience des fragmens de cette
pierre calcaire, vive ÔC faine, & que je laprenois dans des parties éloignées
de piufieurs pouces des couches de bafalte, j'appercevois à la vérité une
ébullition forte & foutenue, mais moins vive , moins pétulente que ii
ç'eût été avec de la pierre calcaire ordinaire ; lorfque les fragmens
étoient entièrement diflbus, je trouvois au fond du verre un petit précipité
noir occafionné par des molécules de bafalte, difléminées dans la
fubftance calcaire , fur lefquelles l'acide n'avoit eu aucune aftion.
5°. J'ai foumis à l'acide nitreux divers morceaux que je détachois
dans les points de contaft , & où le bafalte étoit fouvent adhérent à la
pierre calcaire, dans le fragment même qui fervoit à mes épreuves; je
voyois pour l'ordinaire lamatiere calcaire entrer en effervefcence & f e
diilbudre entièrement, à l'exception des petits points de lave qui fe
précipitoient j le bafalte adhérent faifoit auflî effervefcence pendant
piufieurs minutes, mais reftoit fain & inta£t après, cela. Dans d'autres
occafions la matiere calcaire, adhérente au bafalte, ne faifoit qu'une
effervefcence momentanée , & réfiftoit abfolument à l'acide le plus concentré.
Ï1 me paroît qu'on pourroit foupçonner la raifon de cette différence
accidentelle, en difant que le gas acide fulphureux qui s'éleve
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des laves pendant leur fufion, frappant plus direftement en raifon de
quelques circonftances locales, furies parties que l'acide nitreux ne peut
pas attaquer , elles ont été faturées de ce gas fulphureux qui les a
fait pafier à l'état de félénite.
Voilà à peu-près le réfultat des obfervations que j'ai faites fur ces pierres
j il eft important de les faire fcier & polir pour en voir les grains.
S'il eft difficile de comprendre comment la matiere calcaire a pu fe mélanger
ainfî avec la lave, & s'introduire dans la contexture même du
bafalte, il l'eft bien plus encore d'imaginer domment des atomes de lave
ont pu être difféminés dans la pâte même de la fubfiance calcaire. Il
arrive quelquefois, dans les parties expofées aux intempéries de l'air,
que la matiere ferrugineufe de la lave, étant décompofée & entraînée
par l'eau, donne une couleur jaunâtre à la pierre calcaire qui efl ici naturellement
d'un gris cendré, mais cette couleur jaunâtre n'eft abfolument
qu'accidentelle.
J'ai l'honneur d'être avec les fentimens les plus reipe£tueux,
M O N S I E U R ,
Votre très-humble & trèsobéiffant
ferviteur,
F A U J A S DE SAINT-FOND.
P. S. J'ai joint à mon petit envoi un fécond échantillon remarquable
par une belle couche de lave entre la pierre calcaire j on y dijîingue un
gros noyau de la même pierre, inféré dans le bafalte.
Je dois dire ici que M. de la Boiiliere , habitant à VUleneupe-de-Berg , qui aime & cultive les lettres ;
m'a rais fur la voie de reconnoitre & defuivrele beau courant de bsfalte, fur lequel je viens de donner des
détails -, ce fut lui qui m'envoya , dans le temps, un ¿chantillón do cette lave attachée à la pierre calcaire.