D U V I V A R A I s. J, J
n i q u e , tandis que celle qui lui fait face, (ituée fur la rive gauche de la
nviere, ell compofee de granit à gros grains: fi on remonte la riviere
jufqu'au village de Barbet, on trouvé une fuite de pavés des géans dont
laplupart font d'une grande beauté. On voit à Barbet un clocher qui
branle lorfqu'on agite les cloches; efpece de phénomene connu & qui
s'obferve dans quelques autres clochers.
J'ai fait pluficurs voyages au Colombier m'y trouvai le quatorze du
mois d'oftobre 1777, logé chez M. le prieur, dans le temps d'un terrible
orage qui dura pluiieurs jours & plufieurs nuits de fuite. Cet orage
redoubla dans la nuit du quatorze au quinze , c'étoit une véritable temp
ê t e , les vents fiiBoient, une pluie mêlée de grêle tomboit à feau , les
«¡clairs les plus vifs & les plus brillans fe fuccédoient, le tonnerre faifoit
retentir les montagnes , & la nature fembloit être dans un moment de
d e f t r u a i o n . Comme le châtaignier vient naturellement dans le Vivarais,
& qu'il s'y élevé dans les gorges à une hauteur prodigieufe , toutes les
montagnes en font plantées, & il y forme des forêts épaiffes : à l'époque de
cet orage, ces arbres étoient chargés de fruits qui commençoient alors
à entrer en matur i té, & l'enveloppe qui contient les châtaignes , étant
hériflee de toutes parts depointes, il me vintà cette occafion une idée allez
iînguliere : dans le moment où nous allions nous coucher , & que les
éclats de tonnerre fembloient ébranler la maifon, je raflurai quelques
perfonnes qui étoient avec moi, en leur difant que j'étois dans la periuafion
que les châtaigniers étant armés dans ce moment d'une multitude
de pointes , & leur tronc étant mouillé par la pluie qui ne ceflbit
de tomber, ces arbres pouvoient être autant de conduaeurs propres à
garantirdutonnerreles édifices voifins. Deux heures après, étant couché,
j'entendis un coup des plusviolens.précédé d'un éclair qui m'ofFufqua la
vue, car il étoit impoffible de dormiravec' ce temps-la l'éclat fut fi terrible
& fi court, que je ne doutai pas que la foudrene fûttombée dans le
voifinage ; je brûlois d'envie de lavoir ce qu'il en étoit, lorfque le len*
demain M. le prieur du Colombier vint m'annoncér que le tonnerre étoit
• tombé hors du village, à deux pas de lamaifon d'un des habitans, dans
un quartier nommé Piffé-Loup , où-font quelques maifons réunies ; je
m'y rendis fur le champ avec lui. '
Nous queftionnâmes ces malheureux payfans, qui étoient dans la plus
grande confternation, & quiavoient eu une frayeur horrible; ils étoient
plufieurs couchés dans la même chambre au rez-de-chaudée, une de
leur fenêtre ouverte ,lorfque le tonnerre tomba; un d'eux qui ne dormoic
pas àl'inftant du coup, nous afl'uraque dans le moment oii lafoudre éclata
avec un tel bruit que la maifon en fut ébranlée, il vit un grand châtaignier
éloigné defeptpas de la maifon , entièrement couvert de feu;
qu'enfuite une clarté très-blanche coula comme de l'eau , depuis la fommité
de l'arbrequi avoit quarante pieds d'élévation ,jufques vers fa racine ;
que cette lueur ne lui paroiflbit point être du feu , mais une efp ece de
clarté vive Si blanche, qui dura environ deux minutes &difparutenfuite.
^ J'allai examiner l'arbre qui avoit, ainfi que je l'ai dit, environ quarante
pieds d'élévation, fur deux pieds d'épaifleur dans fon plus grand diamètre;
comme ces arbres font fort rapprochés& fe trouvent entre des montagnes
très-hautes, ils s'élevent prodigieufement pour chercher le foleil. Celui-
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