R E C H E R C H E S -
forme dans le point de contañ une combinaifon fubite de la terre abforbante
, du principe phofphorique & de l'eau.
Si l'on ]ette de l'eau fur la chaux vive, elle eft promptement abforbée
, la matiere s'échauffe, fe gonf le, éclate Se tombe en poudre. Nous
ignorons encore la véritable caufe qui peut développer dans la chaux un
fi puiflantdegré de chaleur : on croit en général que ce phénomene peut
être occafionné par l'union rapide de l'eau avec cet acide concentré j on
obferve pareille chofe toutes les fois qu'on verfe de l'eau dans l'acide
vitriolique. Je crois que la véritable caufe du développement de cette chaleur
n'eft pas encore connue. La fuppofition du frottement des molécules
ne fatisfait pas aflez.
Phénomene de la régénération de la matière calcaire.
1°. DES que la chaux vive a été bien divifée 8c réduite en poudre
par le moyen d'une eau pure , fi on continue de la mouiller elle fe délaye
, forme une efpece de bouillie , un lait de chaux qui s'épaiifit jufqu'à
un certain point, ce qui annonce que les molécules de la matiere
calcaire calcinée fe divifent encore, fe gonflent, augmentent de volume,
préfentent de nouvelles furfaces, & développent encore de l'acide phofphorique.
Sien noyé cette pâte dans beaucoup 3 'eau, & qu'on l'agite,
on forme une eau de chaux. Comme l'eau eft ici furabondante, les molécules
calcaires flottent dans le liquide , s'y unifient, s'y combinent,
6c on ne tarde pas à voir fur la fuperficie une pellicule à demi-tranfparente
, qui examinée à la loupe, offre une multitude de petites lames, de
petites écailles de fpath calcaire régénéré.
2°. Ce fpath calcaire revivifié d'une maniere très-prompte & trèsprécipitée,
n'offre qu'un aflemblage de très-petits feuillets minces, divifés
& fans confiftance j c'eft moins un véritable fpath folide , qu'une
efpece de gurh friable &c tendre. La cryftallifations'eft opérée trop rapidement
: l'acide phofphorique n'a pas eu la liberté de fe porter d'une
maniere égale furia terre abforbante qui lui fert de bafe , ou plutôt cet
acide n'a pas eu le temps de fe déployer entièrement. Il en eft à peuprès
de même des cryftallifations falines , fi on pre fíe trop l'évap o ration,
& qu'on la poufle jufqu'à ficcité, les cryftauxfont confus, imparfaits , Sc
la maffe eft tendre & friable.
3°. Si dans le moment où les molécules de la chaux nagent dans une
eau furabondante, on introduit dans cet eau du nouvel acide volati l , en
un mot de l'air fixe , elle fe trouble dans le premier moment, parce que
cet acide, analogue à celui du fpath, s'unit à la terre abforbante de la
chaux , & forme fur le champ des lames fpathiques j mais fi on continue
à imprégner cette même eau d'air fixe , & qu'on l'en fature , elle
devient pour lors acidule, & acquiert la propriété de rediflbudre le fpath
qui s'étoit d'abord formé j l'eau redevient tranfparente & lympide, &
tient le fpath calcaire en difíblution.
4°. Il eft des pierres calcaires qui , foit qu'elles contiennent des principes
gras, foit que leur cryftallifation , à l'époque de leur formation, fe
foie
S U R L A P O U Z Z O L A N E . zi ç
foit faite d'une maniéré trop précipitée , ne produifent pas par la calcination
une chaux abondante en air fixe. De telles chaux qu'on regarde
comme mauvaifes , parce qu'elles font lentes à prendre corps , & que
même fouvent elles ne durciflent pas , exigent de refter long-temps en
macération j il faut donc les laiifer plufîeurs mois dans des foffes, après
les avoir bien délayées dans l'eau j elles gagneront au lieu de perdre en cet
état, parce que l'eau quiles tient en difiglution, fait entrer en une efpece
de fermentation les molécules graffes qui enchaînent le phlogyftique : ce
dernier fe dégage, éguife l'eau, & lui donne le pouvoir de recliiîbudre la
terre abforbante , &c de la changer en fpath. Une telle chaux peut donc
fe bonifier par le laps de temps -, mais il faut avoir foin de la couvrir
pendant qu'elle eft en macération, afin d'empêcher qu'une nouvelle eau
ne vienne affoiblir la premiere. J'obferve que malgré tous ces foins, cette
chaux n'égalera jamais en bonté la chaux vive, qui eft celle que l'on doic
le plus rechercher pour la folidité & la durée des conftruftions, en employant
néanmoins les moyens que j'indiquerai bientôt.
On voit en général que toute la théorie de la régénération de la matiere
calcaire confifte en une diflblution parfaite de la terre abforbante,
par l'intermede d'une eau fortement Imprégnée d'un principe que la
chaux elle-même lui communique, principe qui donne à cette eau la
propriété de diiîbudre la matiere, & de la dépofer en forme de petits
cryftaux qui ont plus ou moins d'adhéfion, de confiftance & de dureté ,
en raifon du plus ou du moins de temps qu'ils ont refté à fe former. Toun
tend donc à prouver, & l'expérience eft ici d'accord avec la théorie, que
il on accéléré trop la cryftallifation de la chaux , elle ne produit que
des lames minces & friables, quine pourront jamais former qu'un mortier
lâche & terreux.
Mais quel eft le temps à peu-près néceffaire pour que la matiere de
la chaux tenue en diflblution dans l'eau imprégnée d'air , fixe , puifle
produire un fpath d'une dureté convenable & propre à former un mortier
d'une grande folidité? Je répondrai qu'à en juger par une expérience
que tout le monde eft à portée de vérifier, il faut un temps très-long
pour que les molécules de la chaux aient acquis leur dernier degré de
dureté, lorfqu'elles font mêlées avec le fable & l'eau. Examinez en effet:
avec une loupe un fragment de mortier détacha d'un bâtiment ; fi les
mars ont été conftruits dans un temps de vent , de féchereffe & de chaleur,
euflent-ils été faits avec la plus excellente qualité de chaux, ils
n'acquerront jamais une grande dureté : la croûte extérieure vous paroîtra
à la vérité dure, mais cette dureté n'eft que fuperficielle , & iî
après l'avoir enlevée , vous pafiez à plufieurs reprifes le doigt fur la contexture
du mortier, vous l'égrenerez facilement, & vous l'aurez bientôt
fait tomber en poufiîere : la loupe ne vous montrera dans un pareil morceau
que des grains fablonneux, foiblement joints & liés par une efpece
de pouiliere blanche & farineufe , de la nature de la craie. De tels murs
ne tiennent 6c ne refiftent que parce qu'ils font appuyés fur de bons
fondemens, ÔC parce que les pierres, le mortier, le bois, les charpentes
font un enftrabie , un tout qui fe foutient refpeaivement j ils peuvent
être comparés à ces maçonneries en argille, qui n'ont de la confiftance
que parce que la terre eft bien jointe, bien maftivée , liée par les char-
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