jtgS y O L c A N S É T E I N T S
V O L C A N DE L A COUPE.
D E S qu'on a vifité le pavé du pont de Rigaudd , il faut rejoindre le
grand chemin i'Entmigue. On s'apperçoit pendant tout le temps qu'on
voyage au bord "de lariviere, qu'elle eft prefque toujours encaiflee dans
des chauflëes prifmatiques , dont plufieurs ont plus de 300 toifes de
longeur fans interruption , d'autres font féparées quelquefois par des
rochers de granit qui font bientôt place à de nouvelles colonnades.
L e chemin eft dans une gorge fort étroite entre de hautes montagnes
de granit ; comme on ne peut pas toujours fuivre les bords de la nviere ,
qui deviennent inacceffibles quelques temps après avoir laiflé le pont
de Bigaudel, on fe détourne fur la gauche pour entrer fur un chemin
en corniche qui s'éleve fur la montagne ; cette route quoiqu'un peu.
rapide eft délicieufe , on eft dans des bois de châtaigniers de haute-fûtaie
, d'une admirable fraîcheur, & fouvent parmi des rochers qui forment
des points de vue qui font autant de tableaux.
On trouve, avant d'arriver à jEntraiguc, le hameau de Ciipia Sccelui
d u Plan , on découvre , dès qu'on eft fur la fommité de la montagne,
le village à'Entraigue , placé fur un grand plateau de laves, entre le
•isolant & un autre ruifleau qui vient fe jeter ici dans le premier.
I l faut defcendre une partie de la montagne pour aller joindre utt
pont qui conduit à Emraiguc ; c'eft aux approches de ce pont qu'on
•retrouve des objets volcaniques du plus grand intérêt, mais il faut le
rendre au village même d'Entraigue pour être à portée d'obfcrver un«,
cafcade de lave de toute beauté.
Quoiqu'on defcende pendant un quart d'heure par une pente aifez
rapide pour venir joindre Entraigue , ce village ne laiflé pas que d'être
placé fur une efpece de plate-forme élevée au bord du torrent du
Valant qui s'eft excavé un lit d'une profondeur & d'une largeur étonnante
, bordé de droit 8c de gauche par de fuperbes chauffées en
bafaltes prifmatiques ; le village lui-même repofe fur un maffif énorme
de lave ; mais rien n'égale le fpedacle qui fe préfente lorfqu'on vient
fe placer fur le chemin à dix pas du village, & qu'on contemple de face
l'efcarpementde la rive droite du torrent.
On voit un rempart d'une hauteur prodigieufe , tout en colonnes de
bafalte à plufieurs grandes affifes , 8c au milieu , dans la partie la plus
élevée , une cafcade prodigieufe de lave, qui defcend d'une montagne
voifine & vient fe joindre aux chauflées tjui bordent lariviere. On voit
i c i , d'une maniere indubitable & non équivoque, que la lave, fous forme
debafalte dur &;compaae, acoulé à diverfes reprifesde la montagne volfine
, pour donnernai f îanceàce grand pavé à divers étages, avec lequel
la lave qui eft defcendue par ondulation, eft encore jointe & adhérente. On,
peut fuivre le torrent bafaltique fur la pente de la montagne qui eft de
forme conique & d'une grande hauteur, entièrement volcanique depuis fa
bafe jufqu'à fa fommité; ellefenomme la montagne de la Cou/?«, au Col
d'Aifa : c'eft le plus curieux cratere, le mieux caraftérifé, & le plus
remarquable
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remarquable de tout le Vivarais ; il eft éloigné d'un quart de lieue
à'Entraigues j on varepaiîèr fur le pont 6c regagner le grand chemin
pour y parvenir.
Dès qu'on eft fur la route, on apperçoit le même courant de lave qui
defcend de la montagne , & qui coupe le grand chemin : ce courant fe
montre fur une largeur d'environ 50 pieds dans cette partie ; m^ais on voit
qu'il entre fort avant dans la profondeur de la terre , où il a une bien
plus grande largeur , à en juger par la coupe ou le profil des chauilees,
auquel il eft attenant.
Toute la bafe de la montagne conique de la Coupe eft en laves poreufes,
accumulées les unes fur les autres ; on ne trouve abfolument plus
ici que fcories , que laves cellulaires, noires , rougeâtres, 6c de différentes
couleurs, toutes en blocs détachés ou en fragmens irréguliers,
entafles de maniere qu'on ne peut pas douter que ce ne foit là l'ouvrage
d'une ou de plufieurs formidables éruptions, où les laves élancées liquides
dans l'air, retomboient au pied du cône , en aiFeâant toutes les
formes & les figures qui les diftinguent.
On peut faire à cheval le tour d'une partie de cette belle montagne,
jufqu'à ce qu'on apperçoive un courant furprenant de lave , qui frappe
la vue & qui defcend par ondulation depuis la grande ouverture qu'on
apperçoit à la fommité de la montagne , jufqu'au deflbus du chemin où
i l va former un pavé des géans. Il faut s'arrêter ici, envoyer les chevaux
à des fermes qui font dans le voifinage , & remonter ce courant à pied,
ou plutôt s'élever fur le flanc de la montagne, pour gagner le crate re en
contournant le cône; onenconnoîtra mieux parla l'enfemble &les accidens,
& parvenu dans le cratere on defcendra fur le courant même :
j'ai toujours pris cette route dans cinq difFérens voyages que j'ai faits
à la montagne de la Coupe.
I l faut environ une heure pour arriver du grand chemin à la fommité
du pic, en le tournant du côte droit : on marche fans ceile fur les fcories
&.iur les laves poreufes ; cette route eft fatigante; il faut fe diriger avec
attention pour ne pas fe blefler ; les meilleurs fouliers réfiftent à peine
à ce voyage. On voit, à une certaine élévation , un ravin qui a mis à
découvert une des parties où le volcan a percé contre un rocher de graj
l i t , c'eft-à-dire, qu'on obferve ici des entaliemens d'une lave noire très-
•calcinée, adhérente à la montagne voifine compofée d'un granit graveleux
qui fe réduit en terre ; il paroît que ce granit a peu fouffert par le
f e u , d'ailleurs des éboulemens de terre empêchent de bien diftinguerles
objets.
On lailîe le rocher de granit pourfe replier fur la gauche , & monter
par un endroit rapide fur la plus haute fommité du cône; tout eft couvert
de laves torfes , dont plufieurs font fonores lorfqu'on les frappe,
elles renfermentdiverfes fubftances, du fchorl noir, du granit, du feldfpath,
de la chryfolite, plufieurs ont des configurations bizarres, les
unes imitent des cables, d'autres des troncs d'arbres pétrifiés, &c.
On arrive enfin après beaucoup de peine au bord du cratere, on voit
exaâement ici la totalité de la montagne qui forme un cône afîez régulier,
fort reflemblant à celui du Véfuve.
Les bords du cratere font rapides & contournés en maniere d'entonnoir
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