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pouzzolane , & que c'eñ cette ville où ce fable volcanique aura d'abord
été employé , qui a donné très-anciennement fon nom à cette terre.
Mais voyons à préfent ce que Vitruve a dit de la pouzzolane ; cet
auteur celebre a confacré une feilion entiere pour examiner les qualités
ôc l'prigine de cette terre. Voici comment il s'exprime au cha|3Ìtre 6
du livre H de fon architefture : il exiße une e/pece de poußiere qui opere
naturellement des chofes admirables elle naît dans le pays de Baye &
dans les champs qui font autour du mont Véfüve. Cette poußiere mêlée
avec la chaux & la biocaille , non-feulement donne beaucoup de folidité
aux édifices ordinaires, mais fert à conßruire des môles dans la mer, qui
prennent la plus grande dureté dans Veau ; il paraît que cette terre n'eß
telle qu'à caufe qu'il exiße fous ces montagnes & dans le territoire un
grand nombre de fontaines bouillantes , qui ne font ainß échauffées que
parce qu'il y a dans l'intérieur des feux ardens occafionnés par le foufre ,
Valun ou le bitume : la vapeur pajfant par les veines de la terre la rend
légere ; il en naît un tuf dépouillé de toute humidité j c'eß pourquoi lorfque
ces trois choßs^ produites par la véhémence du feu font mêlées enfemble ,
à l'aide de l'eau j elles s^endurcijjent bientôt & font une maße que ni les
fiots de la mer ni VaBion de Veau ne peuvent dißoudre K Je me fuis
attaché à traduire le plus fidellement & le plus littéralement qu'il m'a
été poiîible, ce paflage de Vitruve qui méritoit d'être médité, ainli qu'on
verra par les notes que j'ai été dans le cas d'y faire : j'aurois voulu le
• Ces trois chofes fe rapportent i la pouzzolane , à la chaiix & an tuf Toîcanifé.
i» » Ert etiam genus pulveris quod efîicit raruraîicer res admirandas. Nafcicur in regionibus Bajanis &
»> inagris tnunicipiomtn, qua íúnt circi Vefuviu m mon tern, quod commixtum cum calce & esmento * non
n modo csceris sdificiis pr«ftat firmitates, fed ctiam moles, qua conftruunrur in mari, fub aqiiáfolidefcuntj
s> hoc autem fieri hâc ratione videair, ouòd fub his moncibus & terrà ferventes funt fontes crebri, qui non
n eiTencfinon in imo haberentaut de fulphnre , aut alumine , aut. bitumine ardentes máximos ignes : igituc
» penitus ignis & ílammi vapor Mr intervenía permanans & ardens efficit levem earn terram , & ibi qui
» nafcitur tophus, exugens efi& fine liquore ; ergo cum tres res confimili ratione, ignis vehementiá format®
>3 m unam pervenennt mixtionem, repente recepto liquore una cohiErefcuot, & celeriter humóte durât®
79 folidantur, ñeque eas âuâus, neque vis aqus p oteñ diílblveie. »
le paflage que je viens de ater en eft la preuve, maïs
j'en trouve un fécond dans Vitruve qui vient encore â
l'appui de mon fentiment ; c'eft dans le chapitre 5 da
livre I qu'eil ce paifageque voici ; l'architeôe romain
fait mention des fondemens des mars & des tours, Se
il s'¿nonce ainfi â ce fujet : » de ipfo autem muro è
n qua materia flruatur aut perficiatur , ide¿ non eft
» prafiniendum , quod in omnibus locis, quos optan
mus cupias, eas non poffumus habere : fed ubi fune
n faxa quadrata , five filex , five camentum , auC
» COÔUS later, five crudus his erit utendum. » Tous
les commentateurs font d'accord pour rendre le f a x a
m m/rite ici quelque attention ;
j! n'indique certainement point un ciment iàit avec
des tuiles ou des briques pulverifées ; ce dernier ¿toit
nomme par les Romains f i g n i n a m , ainfi qu'on peut
le voir dans Pline, livre 5XXV , chap. 12. Tâchons
de trouver fa véritable figntfication ; !a cbofe n'eft pas
aifée; cemotdéGgneen général toute forte de pierres
brutes & non taillées ; mais comme il y a des pierres
decetteefpeced'un très-gros volume, d'autres moins
confidérables , & d'autres enfin très-petites , il faut
tâcher, lorfqu'on ie trouve employé dans les auteurs
anciensj de découvrir le véritable fens qu'ils ont voulu
y attacher. On eft dans Je cas de faire ici cette recherche
, puifqu'il s'agitde reconnoitre l'exaditude
d'un procédé de l'art de bâtir des Romains. La cbofe
eft d'autant plus difficile, que Vitruve emploie ici le
mot ccementum fani épithete qui puifiè en afllu-er la
véritable fignification , tandis que dans d'autres cas,
il s'eft conduit différemment. On voit en effet que cet
auteur faifant mention , au chapitre € du livre VII,
des éclats de marbre qu'on pile pour faire le fluc, les
nomme cimenta marmona, d'où il eft aifé de conclure
que ce mot coementum n'a été mis ici en ufage
que pour défignerdes recoupes, des blocailles de
matbre qu'on pile pour faire le ftuc ; je pars de ce
point pour croire que ccementum peut être employé
quelquefois pourindiquet,nondegroflès pierres brutes
ou du moilon d'u» gros volume , mais des éclats de
pierre, de la blocaille, du cailloutaje. Non-feulement
quadrata par de gros quartiers de pie:
maisbrute; le filex par de gros.cailloux : le ccementurn
venant enfuite&fe trouvant en derniete ligne , parole
être relatif à des pierres d'un moindre volume que les
cailloux. Jepenferois donc qu'on devroit le regarder
comme fervant à défigner de la menue pierre , de la
biocaille ; cette conféquence paroît d'autant plus naturelle
, qu'elle devient appficable au cas préfent,
relativement au ccementum qui doit ûtre mélé avec
la chaux & la pouzzolane. On trouveroit alors chez
les Romains un procédé qui fe pratique encore de nos
jours lorfqu'on fait du mortier de pouzzolane pour
bâtir dans l'eau. On verra que dans le jjort de Toulon
tous les ouvrages en pouzzolane conftruits dans la mer,
ont du c x m e n t u m fait avec de la recoupe de pierr»
calcaire.
S U R LA P O U Z Z O L A N E . 103
tranfmettre mot pour mot fi notre langue avoit pu le permettre ; on doit
dans des objets de cette nature, chercher plutôt à rendre ftriaement
la penfée de l'original, qu'à s'attacher à une diaion élégante qui
éloigne fouvent du véritable fens de l'auteur.
Pline le naturalifle & Séneque » parlent de la pouzzolane ; mais
ils n'entrent pas dans un détail auffi intéreflànt que Vitruve qui ne s'en
tient pas à ce que nous venons de dire fur cette terre, & qui en fait mention
encore dans un autre endroit queje rappellerai lorfqu'il en fera temps.
M. le chevalier Hamilton, dans fon favant ouvrage fur le Véfuve, n'a
pomt négligé de parler de la pouzzolane ; il nous dit, à la page 58 du
volume de fes lettres : » ce qu'il y a de plus remarquable dans la compoj)
fition du tufa , me paroît être cette belle matiere brûlée, appellée
» poux-{olane, dont les parties fe lient fi parfaitement & font fi utiles
» employées comme ciment, qualités reconnues par Vitruve & qui ne
)) peuvent fe rencontrer que dans les pays qui ont été travaillés par des
» feux fouterreins. »
Des lieux où l'on trouve de la Pou^^^^olane.
L e s collines qui font au pied du Véfuve & dans les environs de
Naples, abondent en pouzzolane de différentes couleurs ; les Italiens
la nomment terra po'^iolana ; il y en a de la brune & de la jaunâtre ; il y
a de la pouzzolane noire fur le Véfuve ; la meilleure de cette couleur
f e tire de la Torre delrjmm^iata : on en trouve de la grife très-fine
dans les environs de Pouzzole ; il y a même quelques collines du voifinage
qui en fournifl'ent d'un gris blanchâtre , qui eft mêlée de quelques parties
alkalines qui font un peu d'effervefcence avec les acides ; la pouzzolane
brune & jaunâtre eft très-commune & fe trouve dans prefque toutes les
parties de l'Italie qui ont fubi l'aftion des feux fouterreins. L'état eccléfiaftique
renferme des pouzzolanes de difierentes qualités ; on y en
trouve de la grife, de la jaunâtre, de la brune , de la rougeâtre : la
meilleure des environs de Rome fe prend dans la colline qui eft à la
droite de la via Âppia , nOn loin du tombeau des deux Scipions. Cette
pouzzolane qui eft rougeâtre eft une des meilleures. Les catacombes
de Rome font toutes creufées dans une efpece de pouzzolane d'un
brun violet, parfemée de petits cryftaux de fchorl.
En France , l'Auvergne , le Velay, le Vivarais , les environs d'Agde,
ceux de Toulon du côté d'Evenos , & les environs de la chartreufe de
YJverne en Provence , renferment de la pouzzolane de différentes qualités
& de plufieurs couleurs ; en un mot, on en trouve en général dans
tous les pays où l'on voit des reftes de volcans : c'eft dans les environs
des anciennes bouches & des cráteres qu'il faut la chercher ; il eft vrai
qu'elle n'eft pas abondante par-tout 8c qu'elle fe rencontre fouvent dans
des lieux d'un accès dilEcile.
» Pline s'exprime ànfi : quis fatis mirtmr, pd- Cumano ^i/ceatur cxmtnwMne, lib. XXXV, cap;
verem apptüaiu^n paieoUmsíollibai opponimarh 13. Voici ce qu'en die Séneque, namr. guoeji. Ut. l î l ,
JluU¡bus , mcrfumque proanai J¡ir¿ lapídem unum piUidanifipulyii fi aouam acngiifaxm fit,
lUexpugnabilcm undis GfonioTCm quoùdU atiqutfi