V O L C A N S ÉTEINTS
-d'une antiquité plus reculée que celle des volcans du bas VIvarais : lea
bafaltes des environs de Pradelles^ quoique noirs, durs & Îonores, ont
néanmoins la croûte fuperficielle un peu altérée j cette iurface acten-
•drie fe laiile mordre avec un couteau juiques à la profondeur d'enviroa
une demi-ligne, & la fubilance qu'on en enleve, eft une terre de nature
a r g i l l e u f e j l'âpreté du climat, fon intempérie prefque habituelle, &
fur-tout une très-longue férié de fîecles, peuvent avoir produit cette
altération.
L e bafalte du haut Vivarais eilun des plus purs que je connoilTe, il
ne contient que très-peu de fchorl, & de temps en temps quelques petits
points de chryfolitei je n'y ai trouvé ni granit ni quartz ni autres corps
étrangers.
Ardenne eft cet t e belle butte volcanique des environs de PrciieZ/ej, que
j ' a i décrite dans mon mémoire fur le bafalte page 1545 c'eft ici où l'oa
peut obferveriaplus.belle colleûion de boulesbafaltiques qui puifle exifter.
Je ne parlerai pas des autres mafles volcaniques des environs de
cette petite ville, parce que je n'y ai trouvé rien de bien remarquable
cCjue le rocher d'Ardenne^ d'ailleurs M. l'abbé de Mortefagne parle fort
au long & très-bien des productions volcaniques de fon pays dans les
lettres qu'il m'a écrites.
L e volcan de Bonjour, à trois quarts de lieue de Pradelles, du côté
de Làngogne y contient une multitude de gros noyaux de fchorl noir
dans une pouzzolane rouge , pluiîeurs de ces fchorls paroiflent avoi^^
^ t é roulés & arrondis.
V O Y A G E
A la FArETTE, à MONTLOR, à la FARE , à Iss ARLES ^ & ^
GOUDET.
L e s chauffées de la Fare méritent d'être examinées : on fe rend à ce
village par Fradelles , qui en eil éloigné de trois grandes lieues qu'il
eft difficile de faire dans quatre heures, même en allant afléz vite : on ne
trQuy.e dans toute cette longue traverfée qu'un défert trifte & folitaire ,
dépourvu de villages &C de maifons; on rencontre feulement auprès d'un
petit bois de fapin , une maifon noiumée la Fayette , & beaucoup plus
j o i n ^ plus bas , un moulin nommé le moulin de Roux , aiîis au bord
d'un torrent : on Jaifle Montlord & d'autres villages fur la gauche.
•On ne voit de droit & de gauche que des buttes bafaltiques ruinées;
les cjiemins ne font couverts que de bafalte en mafles ou en boules entaflees
ou difperfées de toutes parts, & mêlées avec des blocs de granit
, Q'eft ici à peu près le même défordre qu'à Peyre-Baille & dans
tous je.s environs dt.Pradelles.
'On trouve en quelques endroits des laves poreufes rouges, mais elles
n'y font pas abondantes , & font difperfées fur le terrein. Dès qu'oa
approche de la F a t e , placé dans une iîtuation moins fauvage , on s^apperçoit
d'un changement dans la difpoCtion des maîier£s volcaniques.;
l e s environs de ce village offce;jt,;ion des buttes volcaniques ifolees,
D U VIVARAIS.
ïïtais de véri tables montagnes de bafalte, d'une grande élévation, qui fe
prolongent jufqu 'au bord de la Loi r e : on ne voit point fur quoirepofent
ces mafles énormes de matières fondues, car elles entrent bien avant
dans la terre. Le bafalte eft dans cette partie tantôt en mafle irréguliere
, tantôt en colonnes articulées, ou d'un feul jet.
L a partie la plus intéreiîante de ce canton , eft une efpece de prefqu'ifle
alongée entre la Loire ôc le torrent de LangognoUe. Les laves
ont formé ici un avancement coniîdérable, & on voit de part & d'autre
des boulevards formidables de bafalte ^ avec pluficurs chauifées en colonnes
articulées, figurées depuis cinq pans jufqu'à fept, & recouvertes
par des entalfemens énormes de bafalte en mafle , irrégulièrement difpofé.
L a petite riviere de LangognoUe coule dans un détroit de bafalte,
•d'une très-grande profondeur : il paroît que les volcans ont travaillé ici
dans le grand ; mais je le répété, on ne voit point de cratere bien car
a f t é r i f é .
L e lac d'IJfarles , dont le baMti eft dans les laves poreufes , n'eft
éloigné que d'une lieue de la Fare ; i l paroît occuper l'ouverture d'une
ancienne bouche à feu.
Gaudety qui n'eft qu'à deux lieues de la Fare , offre diverfes chauffées
bafalciques très-curieufes , en prifmes articulés.
Si on retourne de. la Fare à Pradelles-, il eft important de fe mettre
en route par un temps clair & aflùré , & de ne pas s'expofer à être prispar
la nuit, on rifqueroi t fans cela de s'égarer, même avec les meilleurs
guides V & on courroit Tevenement- de fe- précipi ter dans quelque profond
ravin, car il n'y a point de chemin; ni de route pour pouvoir fe reconno'kre,.
cette traverse: fe fa,ifant ou.fur les bafalces, ou fur une peloufe
u n i f o rme f u r laquelle il n'exifte que de legeres traces des,pieds-des.
chevaux. Voici .ce quim'airriva dans ce voyage.
J'avois dîné à la Fare cli-ez le curé, homme inftruit & honnête; j'en
partis le fair à trais heures avec te deiîînateur & .ua eccléiîaftique de
Pradeltesy qui couinoiflbit parfadtemenc le chemin, & qui avoit. eu. l a
bonté de m'y accompagner. ,
. Un'brotuillaïili fub-ic fueçéda ail beau.temps; nous n!eumes.pas plutôt
f a i t dem-i-lieuie > que le brouiilajd. froid; fit humide obicurcic l'air j tout
fut dans le.s. ténebrçis ; qu-slques psécaut-ions q,ue nous puffions prendre ,
nous ne tardâmes pas à nous égarer; nous errions à l'aventure : bientôt
il fallut aller à pied , marcher en tâtonnant, & traîner les chevaux
par la bride parmi des entaiTemens de bafalte : forcés d'aller doucement,
l e froid nous pénétroit & le brouillard avoit percé nos habits : fe fentir
ainfi égaré la nuit par un temps pareil, dans des lieux aufli déferts, n'ét
o i t point , il faut l'avouer , une chofe amufante. Enf in, après avoir fait
mille détours , paifé & repafl'é peut-être fouvent fur le même endroit,
nous crûmes reconnoitre au taft des efpeces de murs qui annonçoient
des habitations, nous nous trouvâmes bientôt dans un hameau; mais
comme il étoit fort tard, chacun étoit couché; nous appellâmes du
monde , ôc on nous apprit que ce hameau fe nommoit Meiferac ; on nous
dit pour nous confoler que c'étoit la route oppofée à Pradelles : mon
avis fut de paffer le refte de la nuit ici, mais mon compagnon de voyage,