Le mont Victoria.
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,) rochers d 'une inc royabl e g r andeur ,quiont é t é l anc é s hors du c ratereXe
„ plus gros qu'ait v omi l e V é f u v e e l l d e f o rme ronde ,&a env i ron douze
M pieds de diametre : c eux- c i font bien plus confidérables & proportion-
» nés à l a d i f férence qui fe trouve entre les deux volcans.
1) En examinant la tour du philofophe , nous vîmes avec furpnfe
>, que les ruines de cet édifice ont refté p endant tant de fiecles décou-
)> verts prefque au f omme t de l 'Etna , tandis que les laves ont enterré ,
» àplufîeurs reprifes & en beaucoup moins de t emps , des milliersd'enn
droits qui en font for t é loignés , ce quiprouv e qu'il y a eu p e u d'érup-
» tions à cette hauteur . . . . Nous partîmes du f omme t de la montagne
» vers les fix heures , Se i l e n é toi t huit du foir avant que nous fuflions
>) arrivés à Catane. Nous remarquâmes , a v e c un plaifir mêl é de peine,
n le changement du c l imat , à mefure que nous defcendions. D e s ré-
,1 gions de l 'hiver l e plus r igoureux, nous p a r v înme s à cel les du printemps
» le plus agréable. En entrant dans la forêt , nous trouvâmes d^abord
» les arbres auffi nuds qu'au mois de décembre; car on n'y voyoi t pas
M une feule feuille : mai s après avoir defcendu quelques milles , nous
n jouîmes du climat le plus tempéré & le plus fain : les arbres étoienc
» en p leine verdure , & les champs ornés de toutes les fleurs de l'été.
' » En fortant des b o i s , nous entrâmes dans l a zone torride : les chaleurs
» devinrent abfolument infupportables, & nous en fouffrîmes cruel-
,) lement avant d'atteindre Catane. C h emi n faifant j 'ai v u plul ieurs mon-
)> tagnes que j'avois envie d'examiner; mais l'entorfe que je ni'étois
» donnée ne me le permi t p a s .L'une des plus remarquables de celles-ci,
» eftappellée mont Pellufe, dont la lave a détruit 18 milles du grand
» aqueduc de Catane : el l e a encore laiffé, par-ci par-l à , quelques ar-
» bres , mais aucun morceau important.
n Le mont Viaoria , une des plus bel les collines de celles qu a proli
duites l 'Etna , ef t t out près de cette montagne ; elle efl: d'une grof-
>, feur allez conf idé rabl e, parfai tement r é gul i e r e , & elle paroî t couverte
,) d'uneverdure plus bri l lant e que les autres ; p lul ieur s de fe s arbres, que
M nous prîmes de loinpourdes orangers & des c i tronniers, fembloient
, ) être en fleurs. On dit que lorfque le vol c a n forma cette c o l l ine , lalave
j ) couvroit le port d'Ulyflè , à préfent éloigné de 5 milles de la mer ;
,) mais j e ferois fort porté à croire qu'elle eft b e auc oup plus ancienne
» qu'Ulylfe 8c que T roy e . »
LETTRE XI. Continuation du même fujct.
A Catane le 30 Mai 1770.
» Nous eûmes foin de régler deux barometres au pied de la mont
a g n e ; nous en lailTâmes un à R e c u p e r o , &. nous empor tâmes l'autre.
„ Le chanoine nous affure que le fien n'éprouva aucune variation lenii-
» ble pendant notre abfence. Il étoit à z6 pouces 8 lignes Sc demie ,
,1 mefure d 'Angleter r e nous le retrouvâmes à l a même hauteur, t u
» arrivant à C a t a n e le nôtre étoit e x a û eme n t au même pomt . l 'ai aul h un
„ très-bon thermometre, garni d'un tube de v i f a r g ent , que m' a prete
, , le phi lofophe napolitain. L e pere de la T o r r e , qui nous a donné des
» lettres pour cette ville , & qui nous auroit accompagné s'il en avoit
» pu
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» pu obtenir la p e rmi l f ion du roi. Ce thermometre eft fait par Adams ,
» à L o n d r e s ; & comme j e l'ai é p r o u v é , il e f t g r a d ué avec précifion de-
» puis les z degrés de la congé lat ion Se de l'eau boui l lante. Il eft conf-
)) truit fur l 'échel l e de Farenhei t . Je marquerai la hauteur des différenw
tes régions de l 'Etna , d'après les regies dont on fe fer t pour eftimer
» l'élévation des montagnes par le barometre ; mais j e fuis fâché de
» dire que ces principes font très-mal déterminés. Cai ï ini , Bougue r ik
» les auteurs qui ont écrit fur cette mat iere, differenttellementlesuns
» des autres , qu'on n'approche qu'avec peine de ia vérité.
» L'Etna a été fouvent mefuré ; mais j e crois qu'on n'a jamais fait
» cette opération avec quelque degré d'exaél itude ; & cette négligence
)) couvre réel lement de h o n t e l 'académi e de c e t t e v i l le, appelléeacaa'e'/nie
» de / '£'ma,dont l e but primi t i f é toi t d'étudier lanatur e Scies propriétés
» de cet t e m ont a gne étonnante. J'avoi s fort e n v i e d'encalculergéométri-
» quement l ' é l é v a t i on; mais j'ai v u à r e g r e t que j e n 'ai pas m ême pu trou-
» ver à C a t a n e un quart de cercl e , quoiqu' i l y ait une académie 6c une
» univeriité. D e toutes les montagnesque j'ai vue s , c'eft l a plus facile à
» mefurer d'une maniéré certaine , 8c c'eft peut -êt r e le lieu l e plus con-
H venable de la terre pour é tabl i r une regi e e x a d e fur les me fur e s prifes
» par le baromet re. Il y a une g r è v e d'une vaf t e é t endue , qui commence
ÎJ précifément au pied de l 'Etna, 8c qui f e p rolonge fort loi n le long de
» la côte. L a marque de la mer fur ce rivage eft fur l e même méridien
» que le fommet de la montagne : vous êtes fur d'avoi r u n niveau par-
)) fait, 8c v o u s pouv e z faire la bafe de vot r e triangl e de quel l e longueur
» il vous plaira ; mais malheureufement on n'a jamais profité de ces
i ) avantages.
» Kircher prétend qu'il l'a me fur é , 8c qu'el l e eft de 4000 toifes rE^nf^^ejo^"
» françoifes ; é lévat ion plus confidérabl e que celle des Andes ou même K'rel'er.
w d'aucune autre montagne de not r e globe. Les géometres d'Italie fonc
» encore plus abfurdes : quelques -uns difent qu'elle eft élevée de huit
j3 milles , d'autres de fix, &c d'autres de quatre. Ami c i , le dernier, ôc
1 . r i i ni • • MeAire félon;
» a c e que je penle , le plus exact de ceux qui ont entrepis ce travail, Amici.
» fuppofe qu'el l e e f t d e 3 2 6 4 p a s ; mais il doi t f e tromper de beaucoup ,
)) 8cprobablement la hauteur de l 'Etna ne furpaife pas i zooo pieds,
» ou un peu plus de deux milles. Je vai s rapporter les différentes méi>
thodes de déterminer les hauteur s par le baromet re , 8c v o u s choifi-
)) rez celle qui vous paroî t ral a meilleure. Je c roisque le rapport qu'elles
» établiifent toutes entre la hauteur du mercure ôc c e l l e de l'athmof-
)) phere, eft de beaucoup trop petit, fur-tout dans les régions élevées
» où l'air eft e x t r êmement léger.
» IVIikeli, dont les mefures font très-eftimées , a toujours réconnu
» la vér i t é de cette propofition. Caflini met dix toifes françoifes d'élé-
« vation pour chaque ligne du mercure , en ajoutant un pied à la pre-
» miere dixaine , deux à la fécondé , trois à la troifîeme, Sc ainfi de
» fuite ; mais fûrement la gravi t é de l'air diminue en bien plus grande
» proportion. Bouguer prend la différence des logarithmes de la hau-
» teur du barometre, exprimée en l i gne s , en calculant feulement les
» cinq premiers chiffres de ces logarithmes ; il ôte la trentieme partie
« de cette différence, 8c il fuppof e que ce qui refte eft la différence
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