J i o VO L C A N S ÉTEINTS
fieyrac, vers une fource abondante d'eau acidule, placée tout auprès de
trois puits moffétiques.
Les belles expériences de M. Achard , chymifte , de l'académie de
Berlin , furi a maniere de produire des cryftaux fpatliiques ou quartieux,
à l'aide d'une eau faturée d'air fixe , vinrent me confirmer quelques
temps après firr la propriété de l'eau imprégnée de cet acide ; vous avez
pu lire la découverte de ce chymifte dans le journal de phyfique de M.
l'Abbé Rofier, du mois de janvier dernier.
L e feul mérite de ma petite découverte, dont j'ai été bien aife de vous
faire part, furi a formation des blocs de poudingue, qui fe trouvent dans
la partie de la riviere de i'Ardeche, correfpondante à la montagne volcanique
de Neyrac, confifte à nous apprendre feulement que la nature a
diverfes reflburces & différens moyens pour parvenir au même but ;
ceci nous montre en même temps que cette efpece de breche eft d'une
formation beaucoup moins ancienne qu'on pourroit le croire. Si je ne
jn'étois pas opiniâtré à étudier ce morceau , je me ferois fans-doute
expofé à tirer de bien mauvaifes conjeftures fur fon antiquité, & yayant
trouvé des bafaltes roulés inclus, j'aurois formé des raifonneniens peutê
t r e apparens , mais qui auroient porté fur de faux principes; d'où je
conclus qu'il nous refteroit un grand & bel ouvrage à faire en hlfl:oire
naturelle , ce feroit celui qui nous apprendroit à éviter les erreurs auxquelles
l'obfervateur, même celui qui étudie avec autant d'application
que de bonne foi, peut être journellement expofé. Je comprends qu'un
tel livre exigeroit les plus grandes connoiffances. Se une pratique confommée,
auffi feriei-vous , Monfîeur , un de ceux fur qui je jetterois le
premier les yeux, fi j'avois voix pour demander l'exécution d'un ouvrage
auffi efléntiel.
J'ai l'honneur d'être , &c.
C O U P E DE JAUJEACChauffée
du FIGNON.
O n peut fe rendre au village de Jaujeac par la route SAuhenas, on
par celle du pont de laBeaume; mais comme il y a des objets intéreil'ans
avoir fur l'un & fur l'autre chemin, il e f tbon de partir à'Aubenas-, cette
derniere ville n'eft éloignée que de deux'lieues de Jaujeac-, c'eft avant
d'arriver à'ce village, qu'on trouve des montagnes d'un fchifte noir un
peu micacé , qui fuccedent à des rochers de granit: il exifte dans ces
fchiftes de très-bonnes mines de charbons foffilles, dont l'exploitation eli
en général mal dirigée.
C'eft prefque immédiatement après avoir quitté les bancs fchifteux,
contenant du charbon , qu'on entre dans les matières volcaniques , 8c
qu'on rencontre les laves poreufes. Arrivé à Jaujeac, on voit fur la
gauche une belle montagne conique qui offre une ouverture fur fa fommité
; c'eft ici un magnifique cratere d'où ont découlé toutes les laves
qui ont formé cette fuite de chauffées qui regnent tout le long de la
riviere du Vignon.
D U V I V A R A I s. ^î i
L a montagne volcanique de Jaujeac eft prefque en tout femblable à
celle delà Coupe du Colet d'Aifa près à' Entraigues \ fa forme extérieure
eil également conique , fon cratere a une ouverture femblable ,
& par une parité bien finguliere , elles portent toutes deux le même
nom } la premiere s'appelle la montagne de la Coupe du Colet à^Aifa^
celle-ci, la montagne de la Coupe de Jaujeac.
L'élévation de la montagne de Jaujeac eft peut-être un peu moins
grande que celle du Colet d'Ai/a y quoique la différence en fait petite,
mais fon cratere auffi bien caraftérifé, eft environ du double plus vafte,
& a un tiers de profondeur de-plus j on y voit, comme ài a Coupe d'Aifa,
une belle forêt de cliâtaigners , & une déchirure que les laves ont produites
en s'écoulant de ce vafte creufet. On ne peut entrer commodément
dans ce cratere que par cette ouverture j les laves poreufes rouges
6c noires qui s'y font entaflées, empêchent qu'on puilîé bien diftinguer
le ruifleau de lave qui defcend par ondulation depuis la bouche du cra^
tere^ jufques dans le bas de la plaine où on le voit paroître, où on peuc
le fuivre de diftance en diftance jufqu'au bord du Vignon, riviere qui
coule au pied de Jaujeac où font d'immenfes chauflées de bafalte , les
plus élevées de tout le Vivàrais. Rien n'eft auffi intéreiTant que la fui t e
de ces murs immenfes de bafalte , qui encaiffent la riviere dans une
longueur d'une grande lieue, y compris les circuits 3 il faut au moins une
journée entiere pour étudier les produits de cette grande coulée , &
comme il faut entrer dans le lit de la riviere, on ne peut faire cette
route qu'à pied, & même avec beaucoup de peine, parce que les bords
en font fort efcarpés, & qu'il n'y a point de chemin frayé j mais on fera
bien amplement dédommagé de cette pénible courfe, par le plaiiîr délicieux
de contempler les plus magnifiques produits du feu , & d'admirer
une fuite de grands tableaux où la lave bafaltique fe développe fous
une multitude de forme : ici les prifmes d'un.feul jet font perpendicul
a i r e s , & ont plus de 50 pieds d'élévation j là les colonnes articulées
forment quelquefois une efpece de pavé régulier , auffi agréable à voir
que difficile à comprendre^ d'autres fois les colonnes font comme torfes:
à droite on voit des boulevards de bafalte , de plus de 140 pieds d'élév
a t i o n , difpofés en plufieurs étages de prifmes, qui fe déployant en
évantail, divergent dans tous les fens 5 à gauche le courant de lave recouvre
des monticules de granit, & femodele fur les contours de cette
pierre j dans certains endroits la lave compafte ne forme qu'une feule
& même maflejdans d'autres elle eft difpofée en maniere de grands
bancs: en un mot, rien n'eft auffi var ié, auffi iniéreiTant à fuivre &à
étudier, que ce grand jet de fonte qui regne dans toute la longueur de
la riviere du Vignon, jufques à VArdeche où cette grande lave va fe
joindre aux autres coulées, produites par les volcans de Theuyts & de
Neyrac.
Au refte iî je n'ai point fait deffiner la Coupe de Jaujeac, c'eft à caufe
de fa reiïemblance exafte avec la Coupe du Colet d Aifa, près à'Entraiguesy
qui eft gravée^