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» nouvellolt toujours ces fecoufles; elles durèrent pendant deux jours &
>> deuxnuitSj au bout defquelles la fumé e 6c la force du feu diminuèrent.
» Une nouvelle & terrible éruption fe déclara le jeudi , quatrième
» jour, deux heures avant le coucher du foleil. Précifément dans le
» mêmeteitipsjevenois£Î'^/i/<2, 6c j 'arrivai dans le golfede
» j'étois près de Mifene j j'apperçus eu peu de temps beaucoup de co-
» lonnes de fumée s'élever, fe replier fur la mer 6c s'approcher de no-
» tre barque qui^ étoit à une diftance de trois à quatre milles du lieu
» de l'éruption ; jamais je n'avois entendu un fracas fi terrible que ce-
» lui qui accompagnoit cette fumée. Il paroiflbit que la quantité de
}) cendres, de pierres 6c de fumée devoit enfevelir la terre 6c la mer :
)) felon les efforts du feu ôc des vapeurs renfermées dans la terre , il
» pleuvoit plus ou moins de grandes 6c de petites pierres mêlées de
» cendres, de maniéré qu'une grande partie du pays en fut couverte.
» Beaucoup de témoins oculaires difent que les matieres vomies ont
» atteint la vallée de Diane , 6c même quelques endroits de la Calabre,
« qui eft à ^ o milles de Pouzzole. Le vendredi Se le famedi il ne fe
)) montra que très-peu dé fumée j cela encouragea beaucoup de monde
» à aller à l 'endroi t même de l 'éruption; chacun ailura que les pierres 6c
» les cendres quiavoient été vomies, avoieut formé dans la vallée une
» montagne qui n'avoitpas moins de trois milles de circonférence , 6c
)) prefque autant de hauteur que le Monte Barbara qui eft auprès; que
)) cette montagne couvroit Canettaria , le château de Tripergola, tous
» les bâtimens 6c la plupart des bains des ces environs; qu'elle s'étend
» au fud vers lame r ; au nord jufqu'au lac ¿ ' J v emo ; àl'oueft jufqu'aux
» bains chauds , 6c qu'el l e touchoit à l'eft le pied de Monte Barbara ;
» qu'ainfî ce local avoit tellement changé de face 6c de forme , qu'il
M n'étoit plus reconnoi f lable. Il paroîtra prefque incroyable à ceux qui
« n'ont pas été ipeftateurs de cet événement , qu'une montagne aufli
» confidérable puifle fe former en iî peu de temps. A f o n fommeteftune
>) ouverture en forme de coupe , qui peut avoir un quart de mille de
» circonférencë. Il y en a même qui prétendent qu'elle eft auiTi grande
» que notre place du marché à Naples. Il en fort conftamment de la
» fumée, 6c quoique je n'aie vu cette bouche que de loin, elle paroxc
» être très-grande : beaucoup de gens allèrent contempler ce phéno-
)) mene de la nature le dimanche fuivant, 6 oâobre ; quelques - uns
)) d'eux étoieht à mi-côte de la montagne ; d'autres étoient parvenus
)) plus h aut , lorfqu'il fwrvinc, deux heures après le coucher du foleil,
» une éruption fi fubite 6c iî a f freufe, que la fumée a étouffé plufieurs
» de ces perfonnes ; quelques-unes même d'entr'elles n'ont jamais été
» retrouvées. On m'a dit que le nombre des étouf fés 6c de ceux qui man-
)) quent, fe monte à vingt-quatre. Depui s ce moment il n'eft plus rien
•» arrivé de remarquable. Il femble que les éruptions reviennent en
» des temps déterminés, comme la fièvre ou la goutte. Je croîs que les
» accès ne feront plus ii v iolens, quoique celui de dimanche dernier
» fût encore accompagné d'une très-forte pluie de cendres 6c d'eau qui
» tomba à Naples, 6c qui atteignit, comiüe on le peut voir , le Monte
n Somma , que les anciens nommoient Véfuve. J'aifouvent obfervé que
M les nuages de fumée qui s'élèvent du l ieu de l'éruption, fe tirent en
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» ligne d i r eâe vers cet t e montagne, comme fi ces deux endroi t s avoienc
)) une efpece de connexion. La nuit on vi t fortir de ce volcan beau-
}) coup de colonnes de feu ôc des rayons femblables aux éclairs. Beau>
)) coup de circonftances méritent donc notre attention dans cet évé-
)) nement, comme les tremblemens de terre , Véruption-, la formation
M des fontaines nouvelles, le defféchement de la mer, la quantité de
» poiflbns 6c d'oifeaux c revés , la pluie de cendres avec 6c ians eau
j) les arbres innombrables arrachés avec leurs racines, renverfés 6c cou-
)) verts de cendres dans tout le pays jufqu' à la grotte de Lucullus ; on
)) ne pourroit pas les regarder fans p i t ié. T ous ces effets ayant la même
» caufe que les tremblemens de terre , examinons avant tout d'où pro-
» viennent les tremblemens de terre ; alors on comprendra 6c o n expli-
» quera aifément les caufes de tous ces événemens. »
EXTRAIT d'une relation de VEruption du monte Nuovo , inféré dans
un ouvrage intitulé: Ragionamento del terremoto , del nuov o monte,
dell' aprimento di terra in Pozzuolo , nell' anno 1 538, e della fignificazione
d'effi, da PIETRO GIACOMO DI TOLEDO, Stampata in Nap
o l i , per GIOVANNI SULZEACH, Alemanno, a z z di G ennar o 1539.
» I L y a maintenant deux ans que la Campanie eft affligée de trem-
» blemens de terre. Les environs de Pouz zol e en ont plus fouffert que
)) toute autre partie ; mais l e 27 6c le zSdu mois de feptembre dernier,
» la terre trembla nuit 6c jour à Pouzzole , fans di fcontinuer; la plaine
)) qui eft fituée entre le lac d'Averno, le Monte Barbaro 6c la m e r , fut
M un peu foule v é e ; elle fe fendit en beaucoup d'endroits ; i 'eau jai l l i t par
)) les crevaffes; en même temps le rivage de la mer, le plus proche de
)) cette plaine, fut mis à fee fur une diftance d'environ 200 pas , de ma-
» niere que les poiffons demeurerent fur le fable, 6c que les habitans
)) de Pouzzol e s'en emparerent. Enfin, le 29 dudit mois, environ deux
» heures après le coucher du folei l , la terre creva près de la mer ; il
î) s'ouvrit un gouffre énorme, qui vomit avec rage de la f umé e , du feu,
)) des pierres 6c des cendres boueufes ; on entendit en même temps un
» mugifiement égal au bruit du tonnerre le plus terrible. L e feu lancé
» hors de ce gouffre fut empor t é vers les remparts de la malheureufe
)) ville de Pouzzole : la fumée étoit noire 6c b lanche ; l a noire étoit plus
» obfcure que les ténebres , 6c la blanche reffembloit au coton le plus
)) blanc; les différentes nuées de fumée paroilîbient vouloir atteindre
» le ciel. Les pierres qui fuivoient cette fumée furent converties,par
)> les flammes confumantes, en pierres-ponces, 6c s'éleverent àpeu-près
)) à la portée d'une carabine ; après quoi elles retombèrent fur les bords
» du cratere , 6c quelquefois dans le gouffre même ; quelques-unes de
» ces pierres étoient plus grandes qu'un boeuf. Il eft certain que la
n fumée fombre empêchoit qu'on ne vît une partie de ces pierres pen-
•» dant qu'el les s 'élevoient ; mais quand el les retomboient de l'air échauffé
» parla fumée , elles montroient diftinftement, par leur forte odeur
» de foufre , d'où elles venoient , comme les pierres qu'on a tirées d'un
» mortier , 6c qui ont volé au travers de la fumée de la poudre enflam-
)) mée :1a boue étoitcouleurde cendre 6c très-f luide au commenceraentji
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