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128 P E U P L E S INDO-EUROPÉENS.
confortablement qu'eux, notamment en Courlandc. Ils sont adroits, sensés,
patients, fort liabiles aux travaux des cliamps, et remportent, îi cet
égard, sur toutes les tribus voisines, telles que Russes, Litliuaniciis et
Esthonicns. Leurs petits clievaux, d'apparence si misérable, rendent des
services incroyables, et les paysans y sont tellement habitués que lorsqu'on
introduisit dans le pays une race plus vigoureuse, les travaux se
faisaient avec moins de promptitude.
Une particularité qui mérite d'être signalée en Courlande, c'est l'existence
de paysans libres qui habitent sept villages et qui ont été surnommés
rois des Coures. Bien (jue l'influence allemande ait été sur eux
plus g]'andc que sur les T.ettons ou général, ils se distinguent cepcndaut
par quelques singularités qui disparaissent de jour en jour. Etant, selon
toutes probabilités, les rejetons d'une quantité de petits potentats coures
subjugués i)ar la domination allemande et que l'ordre des clievaliers porteglaive
avait su s'attacher par certains privilèges dans les pays conquis
(comme en l.ivouie, en Sémigallo et eu l'russe), ils se sont tenus jusqu'aujoui'd'hui
sévèrement à l'ecai-t de tout mélange étranger et n'offi'ent
rien de renmrqu¿lblc dans leur extérieur ni dans leur costume, qui n'est
a u t r e que le costume allemand ; tandis que dans leur vie rustique et
privée ils ont conservé des moeurs toutes particulières.
La conlinuité des rapports sociaux produit nécessairement des réjouissances
publiques au nombre desquelles sont plusieurs jeux auxquels la
jeunesse lettone ne se montre pas fort adroite. Le Letton a de la persévérance,
mais peu de vivacité et d'enjouement, en sorte que parmi
eux la gymnastique et la danse sont moins en faveur que chez d'autres
peuples, par exemple chez les Polonais et les Allemands. De mémo que
l'aspect du pays qu'ils habitent, les Lettons sont de natiu-e prosaïque,
quoique tous leurs travaux se fassent au son de mélodies chantées en
clioeui-.
Les Lettons (Latyciiy en russe) se nomment, dans leur idiome national,
Liatvis et leur pays Liatvéjou-zemmé. Le mot Letton se dit cliez eux
Liatveetis. Toutes ces appellations ne sont que des modifications d'un
même mot qui est également identique h Litvine (Litliuanien). J-e plus
pur de leurs dialectes se parle dans les environs de Jlitau et de Bauslc.
L a langue, qui sonne assez agréablement à l'oreille, n'est pas tout à fait
développée, mais suffit cependant à la composition de beaucoup de chants
po])uIaires.
Les chants des Lettons, d'une mélancolie particulière, sont monotones
-comme leur pays et sans passions ardentes, comme le peuple qui les
a produits. Ce peuple n'a jamais eu de troubadours ni de ménestrels,
mais il a vraiseuiblablemeiit possédé des bardes. Ses chants, dont la
forme est mythologique, remontent, comme ceux des Lithuaniens, à une
très-haute antiquité dont il ne reste toutefois aucune tradition; le p;issé
de ce peuple paraissant, en général, etTacé de sa mémoire, ce qui
s'explique historiquement par la perte prématurée de sou indépendance
politique, il en résulte que les chants des Lettons ne retracent que
le présent. Il y est rarement fait allusion au servage héréditaii'e ; ce
qui semble indiquer que le Letton poète n'était ou ue se sentait pas
du moins fort oppi'imé ni traité en esclave. Ses chants sont moins des
produits individuels que les épanchements de l'e-sprit populaire; ils contiennent
les uniques documents des temps anciens, nmis presque sans
relation directe avec l'histoire; ils sont d'ailleurs remplis d'allusions à
la précédente croyance religieuse du peuple et de traits de moeui'S caractéristiques.
La tendance des Lettons à mettre le cliant toujours en
rapport avec les circonstances actuelles de leur existence a eu beaucoup
d'iiiHuence sur la forme et le texte de leurs chansons. Aussi dépeiguent-ils
de préférence et avec une grande exactitude les circonstances de l'existence
privée et les sentiments habituels de certaines classes du peuple.
L e chant populaire du Letton n'exprime jamais qu'une seule pensée,
se contente du tableau d'une seule image et n'est ni long ni diflicile ii
retenir. Le rhythme en est simple et presque sans mélodie; c'est plutôt
un récitatif avec accompagnement de choeurs. Une autre espèce de chants
s'est formée plus tard par l'appropriation de mélodies russes, allemandes
et lithuaniennes, et a produit des récits chantés d'une plus grande étendue.
Au reste, il n'y a guère que les femmes qui chantent ces poésies
profanes; les hommes paraissant considérer le chant religieux son!
comme digne d'eux. La poésie nationale tient ainsi le milieu enti'c le
germain et le slave, comme le peuple même et sa langue. Quel que
soit l'empressemeut des Lettons à s'emparer des mélodies russes, ils n'en
ont jamais accepté la substance, ce que les lithuaniens et les Allemands
ont fait si souvent. T-es chants populaires lettons et lithuaniens ont entre
eux la plus grande analogie; cependant le principe de tous deux, la tristesse
et le chagrin de vivre éloigné de la maison paternelle, est exprimé
d'une manière plus complète et plus caractéristique chez les premiers.
Les Lettons sont généralement protestants. Sur les 980,000 âmes qui
composent leur population, il y a environ 170,000 catholiques (tous le
sont dans la Livonie polonaise), G0,000 grecs et près de 750,000 protestants.
La superstition est encore très-grande sous bien des rapports,
e t la foi aux sorciers est surtout encore très-répandue.
Ce court apei-çu caractéristique des Lettons ne se rapporte qu'aux
habitants do la Courlande et de la Livonie ; mais dans les lignes suivantes
ii s'agira des Lettons des trois districts occidentaux du gouvernement
de Vitebsk, qui se distinguent très-essentiellement de leurs frèrc.-i
des deux gouvei'nements allemands par leur religion, leur situation visii
vis des seigneurs, leurs moeurs, leur genre de vie et le degré de leur
civilisation.
11 est impossible de décider aujourd'hui quels furent les premiers habitants
de la Livonie polonaise. Lithuaniens, Esthoniens, Lettons et
Slaves luttèrent jadis pour la possession de ce tei'ritoire et se divisèrent
entre enx plus radicalemeot à la suite de la conquête des provinces
baltiques et de l'extension du christianisme, ne laissant dans cette cont
r é e que les Lettons issus de la fusion des Lithuaniens et des Finnois.
Ceux-ci devini-ent les esclaves des chevaliers allemands qui, entre autres
places fortes, fondèrent Dunabourg en 1277. Dans cette contrée inhospitalière
et peu peuplée, couverte de vastes forêts, les Lettons forment,
dans les campagnes, la majeure partie de la population, qui compte aussi
beaucoup de Russes de la Russie-Blanche, une aristocratie et une petite
noblesse (chlaldita) polonaise assez nombreuse; dans les villes, les juifs
sout en majorité.
Dans le district de Lioutsine, la population se compose presque exclusivement
de Lettons, ainsi que dans les districts de Rejitsa et de Douabourg
; mais la partie sud-est contient beaucoup de Russes de la Russie-
Blanche. Ces Lettons ne se distinguent par leur extérieur en rien de
leurs frères des frontières de la Couriande et de la Livonie ; ils ont le
môme teint terreux, la même expression de souffrance, la môme struct
u r e grêle, mais un visage boursouflé, empreint de crainte et d'iiumilité.
Ils sont de petite taille et semblent peu robustes. Dans l'intérieur du
pays, il existe une race de plus haute stature, issue du mélange avec
les Russes, ou représentant peut-être le type primitif du peuple, comme
on peut l'observer aussi dans l'intérieur de la Livonie. L'insalubrité des
liabitations, isolées au milieu de forêts marécageuses, a beaucoup contribué
à empêcher le développement physique des indigènes.
Excessivement flegmatiques par tempérament, les Lettons de cette
coiitrée sont dépourvus de toute énergie, paresseux, stupides, fort adonnés
à l'ivrognerie, malpropres, larrons, mais fervents catholiques. Abrutis
par le servage et habitués h se courber sous l'oppression la plus
dure, ils sont liumbles et rampants, et en même temps faux et sournois,
ce qu'il faut peut-être attribuer aussi en partie aux funestes effets
de l'eau-de-vie. Chaque famille vit isolée, ne travaille que pour satisf
a i r e les besoins tes ])Ius misérables, dépense ce qui lui reste d'ai'gciit
i\ se procurer de l'eau-de-vie, et vit ainsi insoucieusement au jour le
jour. Sous le joug de son clei-gé catholique et sans iustriiction aucuue,
le Letton de ces districts tient avec opiniâti'Cté aux ancieniies coutumes,
e t toute intelligence est moi'te en lui ou plutôt n'a jamais été développée.
L e costume est simple, mais commode : la tête est couverte d'une
casquette de fourrure ou de drap, avec des oreillettes pendantes; le
cou reste le plus souvent ù. découvert. En été, on porte un habit de
vadmal gris, et en hiver, une pelisse de mouto)i. Les jambes sont enveloppées
jusqu'aux genoux , et au lieu de souliers de cuir on en fait
en aubier de tilleul. J.es vêtements des femmes sont pi-esque les même.s
que ceux des hommes, sauf qu'elles ont la tête couverte d'un mouchoir et
qu'elles marchent le plus souvent nu-pieds. Des bottes et des souliers île
cuir sont des objets de grand luxe, i'armi les gens aisés, on commence
il employei' des toiles imprimées, surtout poui- les mouchoirs et les tiiblier.
f. Les enfants n'ont qu'une chemise poui' tout vêtement, Les femmes
ue coiuiaissent point la parure; mais essuie-mains et gants jouent chez
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