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l O i PEUPLES INDO-EUROPÉENS.
quelque utilitó. Parmi les raskoliiiks, les partisans d'une scctc ne mangent
iiiòine pas avec ccnx il'iinc auti'C secte; lorsqu'un Kirghiz entre
ilnns la cliainLi-e, o]i voile les images des saints. Le tabac est sévèremont
défendu comme inie substance diabolique provenant d'une plante
impure. Les raskolniks ont des écoles- particulières dans lesquelles, depuis
le matin jusqu'au soir, on enseigne uniquement k apprendre par
coeui'; mais malgi'é tout ce qne l'on peut raisonnablement trouver à crt-
Uquer dans ce singulier système d'enseignement, ces écoles ont au moins
produit un résultat, c'est que les sectaires savent presque tous lire,
La ])0sscssi0n d'un grand teiTitoire, des rapports fréqncnts avec l'int
é r i e u r de la Russie et nn commerce d'échange assez considérable avec
les Kirghiz, oiïrent aux Kozaks de l'Oural diverses branches d'industrie
susceptibles de s'accroître dans de vastes proportions. En attendant, la
pèche dans l'Oural et sur les côtes de la mer Caspienne est encore ])our
eux la mine la plus j)roductivc et olire dans son exploitation l'intéi-essant
tableau d'une oi'ganisation analogue ii celle de l'ancienne administration
communale russe, bien digne assurément, ])ar sa singulai-ité, de
captiver rattention.
T-a pòche des Kozaks de l'Oural produit nn bénéfice équivalent à la
cinquième partie du revenu de tonte la mer Caspienne, et qui, non com-
])ris la consommation qni se fait sur les lieux, rapporte environ 1,200,000
j'oubles. T,a source principale de cette richesse pi-ovient de l'Oural, qni
est le seul, parmi les fleuves remarquables de l'Europe, qne l'on utilise
exchisivcment ponr la pòche, à laquelle on a sacriQé tous les autres
avantages que l'homme tire ordinairement des cours d'eau. En conséquence,
l'Oural représente en quelque sorte le tableau de la vie primitive,
viei'ge encore de toute sociabilité. Les enti'aves de la civilisation
semblent avoir respecté cette indépendance du fleuve autant que celle
dos Kozaks ses habitants, qui forment avec lui un ensemble plein d'harmonie
dont les destinées sont tellement unies entre elles qu'aucune des
])artics qui constituent cet ensemble ne saïu'ait subir une réforme quelconque
sans que toutes les autres n'en ressentent à l'instant le contre-coup.
Les Kozaks de l'Oural, qui i-eprésentent l'antique commune russe, se soutiendront
dans leur état exceptionnel tant que rien n'entravera le libre
cours de l'Oural; mais leur organisation tombera aussitôt que la vapeur,
qui nivelle toutes choses, aura envahi ce beau fleuve et l'aura soumis
à sa puissance. L'action rapide de cette force in-ésistible, en se développant
sur cette grande ligne qui sépare l'Europe de l'Asie, épouvant
e r a , par son fracas et sa fumée, les délicieux poissons de l'Oural et
finira par les détruire. C'est aloi's. que les relations de la vie communale
et les moeurs jiatriarcales de la Russie ancienne disparaîtront, absorbées
dans l'uniformité des moeurs de la Russie actuelle, et feront place à l'eslirit
industriel de notre époque, (|ui agit si ]niissamnient sur tous les
enfants de l'Europe. Puisse le coeur iie pas payer un joui- ce que la tòte
y gagnera!
L e fleuve Oui-al ne connaît ni navires, ni radeaux, ni moulins i\ eau,
ni fabriques; aucun canot ne glisse sur ses ondes, à moins qne ce ne
soit iionr en retii-er les poissons qu'il livre si libéralement à l'avidité
de l'homme. Sur nn parcours de ôOO vei'stes il n'existe que deux passages
à travers le fleuve : un pont près d'Ouralsk et nn bac près de
Gouriev; ce sont les deux points oîi le conimei'ce d'échange avec les
Kirghiz-Kaïssaks est le plus considérable. A ]jai-tir d'une centaine de
verstes an-dessus d'Ouralsk, jusqu'à la mer Caspienne, en y comprenant
nue grande partie de cette mer, ainsi que tous les fleuves et lacs du
pays des Kozaks, et mémo ceux qui touchent à la steppe des Kirghiz,
le fleuve Oui-al appartient exclusivement, ainsi que le territoire qui en
dépend sur la rive di'oite, à, la totalité des Kozaks de l'Oural, et aucune
portion de cette propriété générale n'est distraite en faveur d'un individu
quelconque ou même d'une commune au détriment des autres.
Danilevski s'exprime à cet égard dans les termes suivants : ^ On ne
trouve nulle pai't aucun mode de répartition aussi légal et aussi juste,
pour la jouissance des dons de la nature que l'homme recueille à son
profit, sans ótre tenu à aucun efi"ort pour en augmenter le produit, que
sur le fleuve Oural; c'est \k que, dans des régions inhabitées, l'association
kozake, agissant sur un terrain libi'e, d'après sa propre volonté
e t sans aucune restriction, donna, sur une vaste échelle, un libre essoiÌL
cette idée mère inhérente aux tribus slaves, sur l'usage et la jouissance
des propriétés en commun. Mais lorsque cette propriété consiste
en un cours fluvial de 600 verstes, en une partie de mer de 9,000 verst
e s carrées et beaucoup de rivières et de lacs, dont le possesseur est
représenté par une société de plusieurs milliers d'individus, l'exploitation
d'ime semblable propriété doit être basée sur une administration trèssage
pour ne pas devenir arbitraire et rester équitable pour tous. >
Les particularités de cette exploitation commune dans des proportions
colossales nous frappent aussi bien sous le rapport des différents modes
adoptés pour la pòche que sons celui des diverses manières dont se fait
le partage du gain. Il existe pour tous les cas possibles des règlements
sévères et précis, conformes aux circonstances de lieu et de temps, et
strictement exécutés, nonobstant quelques abus de peu d'importance.
Les statuts qui concernent la poche, et qui sont encore à présent eu
vigueur, ne sont nullement basés sur des lois théoriques; mais ils se
sont depuis longtemps établis pai' l'usage et, développés par la pratique,
sous l'influence de toute l'association kozake, dans les assemblées des
communes (cei-cles kozaks), où l'on traitait généralement toutes les affaii'os,
celles relatives ii la pèche aussi bien que les autres. La tradition
e t une constante habitude ont identifié la loi avec l'existence et l'intér
ê t de chaque individu, de telle sorte qu'elle apparaît, non comme un
élément hétérogène et hostile, mais comme un droit et un bienfait pour
tous les membres de l'association. La loi et les règlements font donc
p a r t i e intégrante de l'existence du Kozak ; ils reflètent exactement son
droit et sa position comme membre de toute la confrérie. Quoique
l'administration militaire des Kozaks de l'Oui-al se soit chargée de la
surveillance et de l'initiative des décisions sur les affaires de pòche, elle
n'introduit cependant de changements ou de modifications dans les coutumes
établies que du consentement des Kozaks et conformément aux
circonstances.
Les principales espèces de poissons que l'on pèche dans les eaux du
pays des Kozaks de l'Oural consistent en poissons rouges (c'est la meilleure
qualité) : l'esturgeon grand et petit avec ses variétés, le chip et
la sévronga ; et en poissons noirs (qualité plus ordinaire) : le sandat (en
russe soudak), la brème, le sazan (sorte de carpe), etc.
Les Kozaks nomment yatovs les endroits particuliers du fleuve où se
rassemblent les poissons ; ils diffèrent pour les poissons rouges et ponr
les noirs. Tant que l'eau n'est pas couverte par la glace, les poissons se
montrent dans ces yatovs souvent k la surface de l'eau, surtout le matin;
lorsqu'elle commence à geler, ils plongent, sans aller cependant jusqu'au
fond. Tant que la glace reste transparente, c'est-à-dire lorsqu'elle n'est
pas encore couverte de neige, les Kozaks chargés de la garde du fleuve
se trahient sur le ventre jusqu'au yatov et fi-appent violemment la glace
avec un bâton, afin de reconnaître la quantité de poissons qu'elle recouvre;
ceux-ci, efì'rayés par le bruit, remontent immédiatement du
fond de l'eau à la surface et se tournent de côté en appliquant leurs
ouïes à la glace, comme pour reconnaître la cause de ce bruit qui trouble
leur tranquillité. Presque tont le poisson qui se ti'ouve dans le yatov
est pris en liivei- avec le harpon. On a remarqué que les poissons qui
viennent on été et en automne dans le fleuve y séjournent durant tout
l'hiver et ne s'en retoui'neut pas si vite que ceux qui y viennent au
p r i n t e m p s ; c'est à cette particulaiùté qu'on attribue la difl'ércnce qui
existe entre la pèche du printemps et celle de l'hiver.
Les pêcheries des Kozaks peuvent être considéi'ées sous deux points
de vue dUTérents, celui du produit et celui de la répartition du gain,
On peut ainsi les diviser, premièrement, en pêcheries où les intéressés
se rassemblent à des termes et en des lieux fixes, afin de se livrer fi
leur industrie sous le contrôle d'un chef, ataman des pêcheries ; secondement,
en opéi-ations où chacun pèche pour son propre compie ou s'associe
à quelques autres (artel) pour partager ensemble les pi'ofits. Ces
dernières exploitations ne sont assujetties à aucune surveillance particulière
ni en généi'al aux l'èglements sévè]'es auxquels les autres sont soumises.
Poui- celles-ci, en efl'et, l'époque où la pêche doit s'ouvi'ir et se
terminer est toujours fixée avec une exactitude extrême, d'une part
pour ne pas interrompre l'immigration des poissons dans l'Oui'al, et
d ' a u t r e part, pour donner aux Kozaks le temps de se préparer convenablement
à cette importante industrie.
A cette catégorie appartiennent tontes les pêcheries im[)ortantes. Celles
qui se font sur l'Oural ou on pleine moi' donnent le produit le plus
considérable. La seconde catégorie des pêcheries, non soumise à un
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