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124 P E U P L E S INDO-EDROPÉENS.
cliuse lamentable (jiic île renconÎTcr alors ces mallicurcux affamés, souvent
eiicoi'e atteints de maladies contagieuses. En automne, on mange
beaucoup de choses aigres, des raves, des champignons, etc. Le poisson
est cojisidôrd comme uue friandise. Le gruau, fait de blé non parvenu
h malurilé, est très-estime, mais eu général on emploie peu de sel.
C'est mnlheureusement le goiit de l'eau-de-vie qui est le plus l'cpandu ;
il joue au l'ôle important dans la conclusion de toute affaire, mais coûte
toujours fort cher à celui qui accepte de sou hôte; sous prétexte d'hosp
i t a l i t é , cette boisson dangereuse.
Les femmes lithuaniennes ont eu général une existeuce fort pénible :
elles assistent les hommes en toutes choses, et lorsqu'elles sont enceintes
même elles accomplissent jusqu'au dernier moment les plus durs ti'avaux
domestiques et champêtres. Une femme sur le point d'accoucher ne reçoit
jamais l'assistance d'un médecin; seulement, lorsque la délivi'ance est
diflicile, la sage-femme lui tient uue lumière devant le nez et frappe
avec un balai contre le plafond de la cabane. Aussitôt que l'oeuvre est
terminée, on fait boire à la pauvre nvère épuisée de l'eau-de-vie chaude
mélangée d'ai-gile rouge, d'hydi'omel, de poivre et de beurre. Après
deux ou trois jours, raccnuchée j'opreud ses travaux, allaite elle-même
son nourrisson et passe auprès de hii la plupart dos nuits sans sommeil.
L'enfant est préalablement lavé dans l'eau froide ])ar la sage-femme, eu
souvenir de Laouma on Laïma, déesse de la fertilité animale et végétale
, et pendant une année entière on l'cmmaillotte sans chemise dans
des langes.
Les mariages d'inclination sont rares. Los parents marient leurs enfants
par calcul, et des entremetteurs et entremetteuses arrangent l'affaire.
Néanmoins les cérémonies d'une noce, notamment celles de la
consécration dos liançailles, sont solennelles et touchantes. La mauièi-c
dont les cierges brûlent h l'église est interprétée comme un pronostic
heureux ou umihcui'cux pour l'avenir des nouveaux époux. La vii-ginité
de la fiancée est tenue en grand honneur, et l'état contraire ne demeure
jamais seo'ct.
Le Lithuanien termine sa pénible carrière souvent privé des choses
les plus indispensables à l'existence, avec la ti'iste conviction que ses
derniers jours sont une charge pour sa famille, aux soins de laquelle il
incombe entièremeut. Si quelqu'un meurt à la fleur de l'âge, c'est une
perte sensible pour ceux qui restent. La coutume des pleureuses est
encore eu usage, et lorsque dans la parenté il n'y a pas de femmes, on
en ione d'étrangères pour accompagner en gémissant le cercueil jusqu'à
la tombe. Au cimetière, le cercueil est ouvoit, ou dit adieu au défunt;
puis, quand il a été descendu dans la fosse, on boit de l'eau-de-vie, et
de retour à la maison on s'assied à la table du festin. Lorsque les jeunes
gens sont contraints de ])artir pour le service militaire, les femmes de
leur parenté font entendre des chants semblables à ceux des funérailles.
Parmi les solennités religieuses et champêtres, la kekiris (en russe
koupalo, en polonais soboutek), qui se célèbre l'avant-veille de la fête de
saint Jean, est sui'tout remarquable et date encore du temps du paganisme.
A cet effet, on s'assemble en masse, on allume des feux par-dessus lesquels
on doit sauter, puis on sacrifie sur les hauteurs à la déesse Lado,
en chantant : Lado, lado, di dou mousou dévé. (Lado, Lado, notre grande
déesse.) La même chose a lieu dans l'Ailemagne septentrionale et parmi
les tribus finnoises de la Russie, où, de nos jours encore, on allume sur
les hauteurs des feux autour desquels on reste assemblé jusqu'au lendemain
matin. Les Lithuaniens croient que pendant la nuit de la St-Jean
les arbres et les animaux parlent entre eux, et cette nuit-là ils ne
laissent pas de chevaux dans les pâturages, afin que les démons qui galoppent
vers Kiev ne puissent pas les enlever. Le lendemain matin, on
ramasse des herbages qu'on bénit et que l'on conserve pour servir de
curatifs.
L a veille de Noël, on prépare un festin composé de différentes espèces
de farines, de pois, de gruau de froment, de seigle ou autres, et, en
commémoration de la crèche oii naquit le Messie, on met du foin sous
l a nappe. Tour la fétxï des Rois on écrit sur toutes les portes C. M. B.
(Caspar, Melchior, Baithasar), et tout est aspergé d'eau bénite. Entre
la fôtc de Noél et celle des Rois, on ne se livre à auccn travail après
le coucher du soleil, mais on se réunit pour dire la bonne aventure,
usage qui remonte également au temps du paganisme ; on tue aussi pai'-
tout un porc pour la fête de NoCl. A Pâques, une table abondamment
couverte de toute espèce de mets est préparée dans une chambre à part
pour les pcrsonues de la maison et pour les visiteurs.
Gomme on peut le remarquer chez tous les peuples de moeurs inculte.'^
e t simples, les Lithuaniens ont nue antipathie prononcée pour les médecins
et préfèrent s'adresser à leurs znakhars et znakharkas (érudits),
et mieux encore it leurs clairvoyants et aux paysans médecins, qui ne
prescrivent le plus souvent que de l'eau-de-vie mélangée d'eau pure et
d'herbages. On donne fréquemment aux femmes enceintes de l'ambre
pulvérisé, on leur fait aussi avaler une abeille vivante, et dans des cas
extrêmes on leur fait boire l'urine d'un étalon, tandis qu'on recouvre
leur corps de feuilles fraîches de bouleau. On fait sur les blessures des
fumigations de toile carbonisée, et les hémorragies sont arrêtées au
moyen do toiles d'araignée.
Outre le violon qu'ils tiennent des Polonais, les Lithuaniens ont encore
la cornemuse (volynka), une longue bûchette sur laquelle est tondue
une corde de fer (dsin-dsiniss), et un sifflet de terre glaise (malinoka).
Mais l'instrument national est une flûte ou plutôt un sifflet d'écorce de
palmier, qu'ils nomment vamsdiss.
Les Lithuaniens se distinguent par une grande obéissance aux ordres
de leurs seigneurs et de l'autorité, et tout clief de famille est honoré
e t respecté; la mère do famille lui est entièrement soumise, quoique cependant
on voie dans quelques ménages la femme souveraine maitresse.
Les Lithuaniens, habituellemont paisibles et pieux, sont parfois aussi
obstinés. Ils manifestent pour le foyer paternel un gi-and attachement.
Leur défaut capital est une passion effrénée pour l'eau-de-vie. C'est
dans cette boisson alcoolique que le Lithuanien triste, taciturne et souvent
affamé, noie son chagrin. Les juifs établis dans les nombreux
petite bourgs trouvent leur avantage à donner à ce vice tout ie développement
possible, tenant presque tous un cabaret et sachant par l'eaude
vie acheter au pauvre paysau qu'ils hébergent toutes les denrées à
un taux excessivement bas. 11 n'y a pas très-longtemps encore que tontes
les auberges publiques et autorisées se trouvaient entre les mains des
j u i f s , qui sont les conseillers, les guides, les prétendus bienfaiteurs du
Lithuanien indigent, auquel ils fournissent h cj-édit les objets nécessaires
il son existence, et sui'tout l'eau-de-vie, jusqu'il ce qu'il ne lui reste plus
absolument rien. Toutefois la sollicitude des propriétaii'es et l'exemple
s a l u t a i r e du clergé exercent une heureuse influence sur la moralité des
pauvres paysans.
L a connaissance de la lecture et de l'écriture est plus répandue parmi
les Lithuaniens que parmi les habitants de la Russie-Blanclie leurs voisins
(Russines). La moitié d'entre eux sait lire les livres de prières imprimés
en langue litimanicnne, connaissance qu'ils ne peuvent acquérir
qu'au foyer domestique et par leur propre zèle.
Les traditions, chants et proverbes des Litliuaniens se sont conservés
en grand nombre et sont une preuve évidente de rintelligence dont ce
peuple est doué. Souvent, par une expi'cssion inattendue et instantanée,
le ])aysan manifeste une grande expéi'ience et uue profonde connaissance
de la vie, et l'on se demande avec étonnement où et comment cet être
grossiei- et si dénué a pu acquérir tant do savoir et de bon sens.
Généralement on dépeint les Lithuaniens, de même que les Busses
de la Russie-Blanclie, comme des êtres lourds et dépourvus d'intelligence;
cependant, malgré leur apathie et leur apparente stupidité, ils donnent
fréquemment la preuve des qualités contraires. Le Lithuanien, qui entend
des proverbes depuis son enfance, leur accorde une confianco absolue,
Beaucoup de ti'aditions historiques qui manquent aux Slaves se sont
perpétuées parmi les Lithuaniens ; leurs légendes ont une certaine valeiu'
poétique, une tendance moi'ale, et répondent en tout point au goût de
ce pcu])lc pour lo merveilleux.
Les Yatviagnes, voisins immédiats des Litvines du côté du midi et
probablement leurs fi'ères de race, se distinguaient par un caractère
très-farouche. Ayant ])crdu complètement leur langue et leurs moeurs
nationales, leurs descendants parient aujourd'hui le dialecte russe de lu
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