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•lüG P E U P L E S INDO-EUROPÉENS,
géant est 6|)oiivanté par le bruit inaccoutumé (|ui se fait sur la giaco,
il vient souveiit à la surface pour voir ce qui s'y passe ou nage sournoiseuioiit
outre deux eaux. S'il vient à toucher il la perche dont le crochet
plonge dans l'eau à une profondeur de 4 it 5 sagènes, il faut beaucoup
d'adi'esse et d'a^nlité poni- retirer très-vite le crochet, de manière h pouvoir
saisir le poisson sous le ventre. Il arrive souvent que le ])oids d'un
si gros poisson brise la perche et que le fugitif va se pi'cndrc au crochet
d'un voisin, qu'il brise également en cherchant ii fuii', ce qui
néanmoins lui réussit rarement; car des harpons étant enfoncés partout
dans le (louve, le passage d'un si grand poisson produit m émoi génér
a l ; tous les pécheurs sont attentifs à remarquer l'endroit oii remue la
perclie, et souvent le fuyard, repris avec do grands cris de triomphe et
t i r é sur la glace malgré ses efforts pour échajiper, vient tomber entre
les mains dos marchands, qui attendaient impatiemment une si belle pi-oie.
« C e t t e singiilièi'O vie de péclieui' a nn attrait si particuliei' pour l'obs
e r v a t e u r étranger qu'il ne pent se lasser de regarder ni d'admii'or
les façons alertes et l'intelligence que déploient les Kozalcs dans cette
opération si importante pour eux. II arrive quelquefois que par une forte
g e l é e , lin des leviers en fer tombe dans le fleuve par une des ouvei--
t u r e s pratiquées sur la glace. Cet incident n'est pour eux que la moindre
des choses : le premier Kozak venu se dépouille de ses vêtements,
se fait passer une corde autoui- dos reins, iilonge au fond de l'eau, retrouve
le levioi- et est ramené par ses camarades sur la glace ; il se
rhabille promptement, fait le signe de la croix, avale ¡¡arfois une gorgée
d'cau-de-vie, et retourne tranquillement ii sa i^êche, comme si rien ne
s ' é t a i t passé. >
L a pèche au harpon se divise en grande et eu petite pêche ; toutes
deux durent phisienrs joui's et sont interrompues pendant un court int
e r v a l l e nécessaire pour renouveler les vivres.
Sept mille Kozaks piTimcnt habituellement une part directe à cette
pêche, qui jouit parmi eux d'une gi-ande populai'ité, car elle foui'iiit aux
pins pauvres le moyen de s'enrichir assez promptement. S'il faut on
ci'oii'c la tradition, il anivai t autrefois que par une seule ouverture dans
la glace on retii'ait jusqu'à quarante poissons; aujourd'hui encore, dans
des circonstances favorables, on peut, avec une chance iieureuso et beaucoup
d'adresse, gagner 100 roubles en un quart d'heure. Jjorsqu'un yatov
est épuisé, les Kozaks se rendent vei-s celui qui on est le plus rapproché,
.sur des chevaux qui les attendent au rivage, et continuent
ainsi successivement l'exploration de tous les yatovs, jusqu'à ce qu'ils
soient arrives ÎL une limite marquée pai- eux, auprès de laquelle, avant
l ' o u v e r t u r e de la pêche, on a tondu à travers le fleuve des tilets où
viennent se prendre les poissons échappés au harpon, f^e bagrenié (la
pèclie au harpon), dont le produit est destiné à la coui- impériale, ne
dure qu'un jour et se pêche dans un seul yatov non loin d'Ouraish. C'est
un ancien usage qui date des premiers temps de la colonisation des ICozaks
de l'Oural, et qui subsiste comme témoignage de leur soumission à
l ' a u t o r i t é du tsar blanc. Pendant la pêche, un officier et quelques troïkas
a t t e l é s de rapides coursiers attendent sur le rivage ; les ])oissons et le
caviar réservés pour ronipcrenr sont immédiatement charges et sont ainsi
emportés au gi-aiid galop des chevaux, courant jour et nuit, jusqu'à St-
Pétersboui'g, d'oii les messagers ne reviennent jamais sans rapporter de
riches cadeaux.
Considérons maintenant les pêcheries des Kozaks de l'Oural sous le
point de vue du partage des produits de la pêche.
Ce partage n'existe pas pour les ]iriscs aux filets sur des canots ni
pour celles au har])on, non plus que pour les prises qu'on nomme pêches
akhannes; diaque individu garde ce qu'il a pris, et cet usage a été int
r o d u i t en raison de la simplicité des ustensiles que ces genres de pêche
exigent ainsi que de la participation directe et personnelle que chacun
y prend. Seulement, en ce qui concerne la pêche au harpon, où le hasard
joue un plus grand rôle, on rétablit l'équilibre par de petites associations
oïl les intérêts sont réunis en commun. Dans tous ces modes
de pêche, la richesse individuelle ne donne aucune préi'ogative, chaque
Kozak ayant non-seulement le droit mais encore la possibilité d'y
p a r t i c i p e r . 11 en est tout autrement pour les divei'ses pêcheries pouilesquelles
les ustensiles sont relativement si coûteux que chacun n'est
pas en état de se les procurer. Il est juste alors que ceux qui, pai'
leurs déboursés, fournissent à toute l'association kozake les moyens
d'effectucr une bonne pêche, aient une plus gi-ando part dans les bénéfices.
De ce nombre sont toutes les péclieries avec dos filets de ti'ait
(niévods), qui sont fort chers, car ils coûtent souvent jusqu'à 1,000 roubles.
Pour cette sorte de pêche, la p;irt de bénéfices n'est pas attribuir
à chaque individu isolément, mais à diaque potito association appartenant
au même filet, ce qui i-end évidemment nécessaire un autre mode
do ré|)ai'tition. C'est ainsi que jiour la pêche au lilot on automne, chaiiiie
filet garde en sa possession les poissons qu'il a pris : le propriétaire
s ' a d j u g e cinq parts ; chaque Kozak qui a aidé à la pêche reçoit une
p a r t ; et quand le pi'opriétaire du filet a contribué lui-même au trav
a i l , il pi'Ciul une sixième part. Lor.=;quc des officiers sont présents on
persoime à la pêcho, l'officier suhaltei-ne reçoit deux parts ot l'ofiicier
s u p é r i e u r ti'ois. Pour chaíjue travailloui- non kosak (c'est presque toujoui's
un Kirghiz) on réserve une ])ai-t que reçoit poui- lui le maitre
qui lui a payé le prix do son service. Les ofliciers jouissent de gi-ands
avantages dans toute ])êcho faite au lilot, car ils sont on état de louer
pour leur compte nn plus grand nombre de travailleurs, et leur présence
d'ailleurs leur vaut aussi une plus grande part. Ce dédommagement
loui- est accordé poui- les indemniser en quelque sorte de ce qu'ils
ne reçoivent aucune solde de la caisse militaire pour leur activité de
service dans le pays même.
On a calculé que, sans compter la consommation do poisson qui se fait
sur les lieux, le commerce a ou à sa disposition, dans chacune des dernières
années qui viennent de s'écouler, 1-10,000 ponds de poissons rouges,
900,000 pouds de poissons noirs, 14,500 ponds de caviar et 300
ponds de collc de poisson. Dans les années les plus l'écoiites, le revenu
que donne le poisson noir a augmente en raison des soins tout particuliers
apportés aux opérations de la pêche; mais, par conti'o, le bénéfice
SUI- los poissons rouges a diminué. Il avait, on effet, dans la seconde
moitié des années 1S30 îi 1840, ¡irodiiit jusqu'à 270,000 ponds do poissons
et 33,000 pouds de caviar, tandis que les poissons noirs en avaient
fourni on tout 5 à G00,000 pouds. Eu 1S47, 23,139 Kuzaks avaient
])articipé au partage de la pêcho; et on 1S55, 25,497. Mais en 1852,
13,IGS soulomont y ]u-ii'ent jiart. Lo chiflVe moyen du revenu s'éleva,
dans les années 1851 à 1353, à envii'on 1,150,000 roubles, do sorte que
chaque membre do l'association kozake on général reçut 47 roubles
8 2 copecs; et ijuc 115 roubles C4 co])ccs furent la part assignée à chacun
de ceux qui avaient assisté à la pêche.
Lorsque le gord (barrage) de Goiiriev existait encore, rafiluonce des
sevrougos était si considérable (ju'ii fallait les efi'rayer par des coups
de canon; aujourd'hui, la manièi'C dont la pêche se fait au printemps
a beaucoup diminué l'aflincnce du poisson rouge ; mais comme, par compensation,
sa valeur vénale a augmenté en proportion, le revenu est resté,
par le fait, ])i-esqno le même qu'autrefois. Il faut néanmoins, à cet égard,
se ra])pelor que le taux de l'argent a récemment baissé ot que le nombre
des Kozaks a considérablement augmenté, ce qui a du nécessairemont
amoindrir le revenu de chaque individu. Malgré cela, le ])roduit
des ])êchcrios est toujours d'une grande importance. Los Irais sont d'ailleurs,
on général, frès-insignifiants, chaque Kozak travaillant tout à la
fois comme maitre et comme ouvrier. Kn évaluant les fi'ais de la pêche
à 175,000 roubles par an, il reste encore pour toute l'association kozake
un bénéfice d'un million do roubles, sans faire entrer en ligne de
compte les 46,800 roubles qui sont attribués à la chaiicelloric militaire,
comme nous l'avons dit plus haut.
Dans les autres branches du système économique des Kozaks do r()ural
on retrouve une organisation ))arcilie à celle de la pêche, quoique un pou
modifiée, pour l'usufruit des pi'airios, la fenaison et ragriciilturo. A propos
de la fenaison, Ilaxthausen raconte ce (|ui suit ;
« La i'eiiaison est contrôlée par l'ataman et ses adjoints; l'ataman indique
le jour de l'onvertiirc pour la coupe des foins ; ce jour est ordinairement
fixé au 1" juin. Un officier est ensuite placé comme surveillant
à chaque endroit où se trouvent des prairies importantes. Tout Kozak
au service actif — et celui-là seul en a le droit — se rend alors où bon
lui semble et choisit la pj-airie qu'il veut faucher pour s'en a])proprior le
foin. Tous ont déjà, dès la nuit précédente, occupé la place qu'ils se
sont eux-mêmes assignée. Dès l'aurore, l'oflicier donne le signal, ot chacun
commence à faucher sou contingent; mais, pendant cette journée, il
ne fauche qu'un cercle autour de la place qu'il a choisie. Ce ijue reii-
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