
qualité ni aucune faculté quelconque, pour laquelle il existe un organe
dans le cerveau; en d’autres termes , on ne connoissoit encore aucune
faculté ou qualité primitive, en tant qu’elle est une fonction de l’en*
cépliale. Quant aux organes eux-mémes, on avoit, à la vérité, recueilli
à ce sujet quelques rêveries, mais on n’avoit pas eu une seule idée déduite
de l’observation, et justifiée par l’expérience. Je me trouvai donc
seul dans un désert, plongé dans la plus profonde ignorance, ou plutôt,
ce qui est bien pis encore, muni de connoissances fausses. Hors de moi,
je ne trouvai partout que superstitions, préjugés, obstacles et persécutions.
Mais j’avois déjà trop observé la nature pour ne pas suivre la
lueur, même incertaine, qui s’étoitofferte,à mes regards. Je vais exposer
à mes lecteurs les moyens à l’aide desquels je suis parvenu à découvrir
les qualités et les facultés fondamentales de l’ame, ainsi que le siège de
leurs organes.
Premier moyen.
Souvent je disois à mes amis : indiquez-moi les forces fondamentales
de l’ame, et je trouverai l’organe et le siège de chacune. J’ai trouvé, en
effet, bien plus de difficultés à résoudre le premier problème que le
second. Dans ce moment encore, je connois des organes de certaines
manifestations de l’ame , qu’il m’est impossible de ramener à leur force
fondamentale; et il existe des qualités ou des facultés dont je ne suis
pas en état de dire si ce sont des forces fondamentales propres, (suige-
neris ) ou bien s’il faut les considérer comme des modifications d’autres
qualités ou facultés, ou bien comme résultat de l’action de plusieurs
forces fondamentales.
Dans ces recherches , l’essentiel est cependant toujours d’être à la
piste de la force fondamentale, car ce n’est que pour elle qu’il existe un
organe. Mais comment la reconnoître, cette force fondamentale ? Dans
l’homme, on déduit toutes les facultés de l’entendement, et l’on ramène
tous lespenchans à la volonté. L’homme est architecte, musicien,
mathématicien , orateur ou poète , uniquement parce qu’il a appliqué
son entendement à l’architecture , à la musique, aux mathématiques,
etc. Il se livre à l’amour, il prend soin de ses enfans, il fait la
guerre, il tue , il vole, parce que telle ou telle est sa volonté. Or, s’il
en est ainsi,pourquoi admettre d’autres forces que l’intelligence et la
volonté, et pourquoi chercher des organes pour d’autres facultés que
pour celles-là?
Si dès le commencement de mes recherches, mes idées avoient eu la
marche que leur donna plus tard la suite même de ces recherches, j’au-
rois pu trouver dans les brutes, la solution de plus d’une difficulté.Mais
relativement aux animaux aussi, l’on pari oit d’instincts, et l’on croyoit
avoir tout dit. Quel parti prendre dans cette incertitude ? Je regardai
donc comme très-incertain tout ce que l’on croyoit savoir jusque-là,
parce que les idées reçues me mettoient de toutes parts en contradiction
avec la nature. Je me livrai tout entier à l’observation, attendant avec
patience les résultats qu’elle me fourniroit.
Dabord, je m'en tiens uniquement aux idées et aux expressions
reçues dans la vie commune. J’ai pensé, de tous temps, que le langage
ne fait que rendre au dehors par des sons, ce qui se passe dans l’intérieur
de 1 homme ; or, l’on parle souvent de personnes qui sont musiciens
nés, poetes nés, qui possèdent un talent inné pour l’architecture, etc.
Ces façons de parler ne supposeroient-elles pas des forces fondamentales?
Ce sont les sujets doués de semblables talens, que je m’attachai
d abord à observer, ppur découvrir si leur talent appartient à la nature,
ou s il est le résultat de l’éducation et des connoissances acquises. Lorsque
je metois convaincu qu un talent distingué et bien reconnu pour
tel, est surtout l’ouvrage de la nature, j’examinois la forme de la tête
de l’individu, et je l’imprimois dans ma mémoire.
J ai dit, dans la préfacé du premier volume, comment je suis parvenu
a reconnoître ceux de mes condisciples qui avoient une grande facilité
à apprendre par coeur. J’aurois donc dû savoir qu’il n’y a pas de faculté
ou de qualité qui se prononce par la forme de la tête, toute entière.
Mais le nombre d’observations que j’avois faites jusque-là, n’étpit