
vois le soldat se redresser, se pavaner en défilant sons les yeux des
femmes; lorsque je vois tant de peines, tant de mouvemensque se don*
nent des hommes insignifians pour obtenir un titre, un cordon, etc ,
c’est alors que la question me paroüt décidée : lequel est le plus vain,
de l’homme ou de la femme?
11 s’ensuit de toutes ces considérations, que le sentiment de l’amour-
iropre, de la vanité, de l’ambition , est une qualité fondamentale,
nhérente à l’espèce humaine, et fondée, par conséquent, sur un organe
particulier du cerveau.
Vanité, amour de Vapprobation chez les animaux.
Les animaux aussi sont avides de louanges et d’approbation. Avec
quelle ivresse le chien reçoit-il nos caresses, nos éloges ! combien le
cheval n’est-il pas sensible aux marques d’affection; quelle ardeur ne
mettent-ils pas dans leurs courses à devancer leurs rivaux ? Tout le
monde sait que dans le midi de la France on attache un bouquet aux
mulets, lorsqu’ils ont bien travaillé. Le châtiment le plus pénible qu’on
puisse leur infliger, c’est de leur ôter leur bouquet et de les attacher
derrière la voiture. J’avois un singe femelle, qui toutes les fois qu’on
lui donnoit un mouchoir, s’en drappoit et trouvoit un plaisir extraordinaire
à le voir traîner derrière elle, en queue de robe de cour. L’une
de mes chiennes n’étoit jamais plus heureuse que lorsqu’elle portoit mes
pantoufles dans sa gueule. Enchantée de cet honorable fardeau , elle
se rengorgeoit et coniournoit tout son corps; plus je lui criois : belle
Stella, belle Stella! plusses mouvemens deve noient vifs; elle alloit d’une
personne à l’autre pour se faire admirer. On eût dit une petite paysanne
qui, vêtue d'un habit neuf, s’achemine vers l’église, tortillant les .hanches,
la tête haute, le cou tendu, la poitrine avancée, pour attirer sur
die les regards envieux de ses compagnes. Cette même chienne, qui
étoit habituellement très-vive et très-caressante, s’abandonna tout-à-
coup à une morne tristesse : quoique je pusse faire pour l’animer, elle
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D U C E R V E A U . 3 s g
restoit couchée dans un coin. Au bout de deux ans de mélancolie, elle
reprit brusquement sa première gaîté et me fit des caresses avec sa vivacité
et son amabilité ordinaires. Dans le courant de la même journée
j’appris qu’un écureuil que j’avois dans la maison depuis deux ans, ve-
noit d’être tué. Jamais courtisan inquiet, vain et jaloux, ne fut navré
plus profondément que ne l’avoit été cette pauvre bête de la présence
de l’animal étranger. Les oiseaux aussi sont enchantés du ton caressant
de leur maître; ils se balancent d’un côté à l’autre, s’approchent de
lu i, battent des ailes et lui expriment leur plaisir par de doux accents.
Aliénation de la vanité.
Déjà dans l’état de santé le vaniteux se fait illusion de qualités dont
il est dépourvu. A ses yeux il n’y a rien de plus important au monde
que lui. Cette fonction doit être d’autant plus déréglée dans l’état d’aliénation.
Dans l’exposition delà découverte, j’ai rapporté deux exemples
qui prouvent suffisamment que le sentiment de la vanité peut être
dans un état d’excitation, indépendamment des autres qualités. Tous
les hospices pour les aliénés fournissent des exemples de ce genre.
Je donnai des soins, il n’y a pas long-temps, à une demoiselle fort
estimable, qui avoit toujours attaché un grand prix à la bienveillance
de sa maîtresse, dame d’un rang très-élevé. Dans son aliénation, indépendamment
de certaines idées fixes relatives à des intrigues d’amour,
elle s’imaginoit être puissamment riche elle-même,, et d’un rang très-
distingué. Elle commença par donner toute sa garderobe, puis elle
parcourut différens magasins , et fit empiète d’étoffes qui ne conviennent
qu’à des princesses.
De tout ce que je viens de dire, il résulte que la vanité, l’ambition ,
l ’amour de la gloire, ou de son diminutif, la gloriole, est un sentiment
qui doit avoir son.organe particulier dans le cerveau.
Siège de l'organe de la vanité, et apparence extérieure
de cet organe.
Cet organe est formé parles circonvolutions du cerveau marquées xi,
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