
meme les espèces qui voient aussi bien le jour que la nuit , tels que
le grand-duc, le petit-duc et la chouette , ont tous la tête et le cerveau
beaucoup plus larges que les oiseaux de jour, qui vivent également
d animaux, comme le grand vautour, plusieurs espèces d’aigles
et de faucons. Le pigeon, beaucoup plus gros que la petite espèce de
chouette , a la tête plus étroite que celle-ci. L’engoulevent, qui ne vole
que dans le crépuscule , quoique plus petit que le coucou, a la tête
plus' large. Il est donc probable que c’est le plus ou moins grand développement
de l’organe de la circonspection qui détermine les animaux
à chercher leur nourriture ou la nuit ou le jour.
Qu’est-ce encore, dans l’organisme , qui inspire aux animaux la prévoyance
de poser des sentinelles, et d’avoir des éclaireurs? C’est au
moyen de l’organe de la circonspection que la nature leur a révélé cette
ingénieuse précaution. Tous ces animaux ont la partie cérébrale qui
est affectee à la circonspection, très-développée , et la région du crâne
correspondante très-large. La tête de l’oie sauvage et celle de l'outarde
sont dans cette région plus larges que celle du cigne ; la tête du chevreuil
est plus large que celle de la chèvre ordinaire et du bouc; la tête du
chamois est encore plus large que celle du chevreuil. La tête de la
spatule [Plataléa Lin.) est, dans cette région, singulièrement large;
aussi cet oiseau est-il tellement circonspect, que les chasseurs réussissent
rarement à s’approcher assez près de lui pour qu’ils puissent le
tirer. Le moineau de nos jardins et de nos maisons, qui, quoique très-
hardi, reconnoit dans 1 instant, et évite tous le.s pièges que l’homme
peut imaginer, a également la tête très-large , et beaucoup plus large
que d’autres oiseaux plus gros, mais moins circonspects.
La nature se sert encore d’un artifice, qui a toujours fait mon admiration,
Elle parolt attacher un plus grand prix à la conservation des
femelles, qua celle des mâles; celles-là sont douées de circonspection
à un plus haut degré que ceux-ci. 11 m’est arrivé de tuer jusqu a vingt
écureuils, sans que daqs ce nombre il y eût une seule femelle, quoique
ce ne fût pas dans la saison où elles sont retenues par les soins que
demandent leurs petits. J’ai pris, pendant trois ans, dans mon jardin,
quarante-quatre chats, parmi lesquels il n’y avoit que cinq femelles.
Pendant un hiver, on tua dans deux provinces de la Virginie, cinq
cents ours, au nombre desquels il ne se trouva que deux femelles.
M. le lieutenant-général, comte de Girardin, capitaine des chasses du
roi, chargé du service de grand-veneur, a fait dresser un état des loups
tués dans soixante-un départemens du royaume , depuis le premier
janvier 1816, jusqu’au premier juillet 1S17. Il résulte de cet état, qu’il
a ete tue i 8q4 loups, et 522 louves1. Chez les chamois, l’animal
conducteur est toujours une femelle ; et il n’y a pas de doute qu’elle
I Je sais bien que l’on explique cette différence, en disant qu’il nait en general
beaucoup plus de males que de femelles ; quand même cela seroit aussi
exact qu’on le soutient, ce qui ne peut être, on n’expliqueroit pas encore
par-là celte disproportion entre le nombre des mâles et celui des femelles que
l’on parvient à détruire.
Comme dans plusieurs provinces de France, beaucoup d’enfans sont dévores
par les loups ; je puis bien me permettre quelques réflexions. Les gardes-
chasse n’ont-ils pas un intérêt particulier à conserver les louveteaux et surtout
les louves, afin de les ménager pour les grandes chasses? En second lieu , on
croît avoir pris les mesures les plus efficaces contre la multiplication des loups,
en promettant des récompenses. Encore en ce moment, S. Ex. le ministre dé
l’intérieur, M. Laine, vient d’adresser une instruction relative à la destruction de
ces animaux, et accorde pour prime, i8fr.pourunelouvepleine, i5fr.pourune
louve non pleine ; 12 fr. pour un loup, et 6 fr. par louveteau. L’expe'rience de
tant d’années auroît dû avoir démontré parfaitement l’insuffisance de pareils
moyens. En effet, attendre de ces gens-là qu’ils détruisent tous les loups, ce
seroit exiger qu’ils renonçassent à un capital qui leur rapporte chaque année.
Au lieu de les récompenser, il seroit bien plus dans l’intérêfde' l’humanité|
après avoir donné à chaque garde - chasse un temps limité pour détruire
tous les loups de son canton , de lui faire payer une amende rigoureuse par
chacun de ces animaux qu’on trouveroit sur le territoire confié à sa surveillance.
II en est encore de même dans les pays, où les hamster font dans certaines
années dé très-grands dégâts.