
deux chefs de rebelles, père et fils ; chez l’un et chez l’autre les organes
de la fermeté et de l’orgueil étoient très-fortement développés. Plusieurs
autres détenus, pour cause d’insubordination avoient la même organisation.
L’organe delà hauteuret du penchant à dominer est développé
d’unemanière étonnante dans le crâne du sculpteur Ceracchi,Pl. LXIX,
fig. 6 , que je conserve dans ma collection ; cet individu fut guillotiné à
Paris. Déjà à Vienne, où j’étoîs médecin de sa famille, cet homme s’étoit
prononcé de la manière la plus révoltante contre tout ce qui est revêtu
d’autorité, et principalement contre le pape. Il oublioit son art pour
ne faire que rêver aux moyens de détruire les monarchies. Ces hommes
renverseraient tous les trônes pour s’ériger eux-mêmes-' en despotes.
Ainsi l’organisation confirme ce que l’histoire de tous les temps nous a
enseigné sur le but des révolutions : ôtez-vous de là que je n iy mette.
L’influence des circonstances extérieures est très-sensible sur cet
organe comme sur les autres. On remarque généralement que les habi-
tans des montagnes sont plus fiers que les habitans de la plaine ; qu’ils
ont un plus grand amour de l’indépendance, et sont plus disposés à la
révolte. Aussi dans nos voyages n’avons-nous trouvé nulle part l’organe
de l’orgueil plus généralement développé à un très haut degré que chez
les Suisses. Qui ne connoit l’inflexible orgueil des habitans de certaines
provinces de l’Espagne?
Jusqu’ici, j’ai parlé de l’orgueil, de la hauteur, du penchant à dominer,
de la bonne opinion de soi-même, de l’arrogance, de l’esprit
d’indépendance. Mais à quelle qualité fondamentale se rapportent
toutes ces modifications? Avant de prononcer sur cette question, il
faut que le lecteur discute avec moi un point très-douteux. Ici encore §
je m’en tiendrai uniquement aux faits; e t , dès que nous Serons arrivés
à la limite où les faits nous abandonnent et laissent le champ ouvert
an raisonnement, je subordonnerai de grand coeur mon propre jugement
à la sagacité du lecteur; et cela d’autant plus volontiers, qu’il
n’en peut rien résulter de défavorable pour l’organologie.
Sur l’instinct (jui dirige les animaux dans le choix des
lieux (juils habitent.
Apres avoir donné mon attention à l’orgueil, comme qualité particulière,
et à son organe chez l’homme, je voulus voir si mes observations
se confirmeraient chez les animaux. J’examinai donc les têtes des
animaux dont on a coutume de dire qu’ils sont'fiers : par exemple des
cheveaux de race, du coq, du paon, etc. Je ne trouvai chez aucun
d eux un développement remarquable des parties cérébrales correspondantes
à 1 organe de l’orgueil chez l’homme; mais je trouvai bien
un développement considérable de ces parties dans des animaux chez
lesquels je n aurois jamais songé à le chercher, c’est-à-dire chez ceux
qui séjournent sur les hauteurs, sur les montagnes, et qui se tiennent
volontiers dans le haut des airs, chez le.chevreuil, le chamois, le bouquetin,
chez certaines espèces d’aigles et de faucons; et ce qui me frappa
le plus, lapartie cérébrale en question étoit d’autantplus développée,
et la proéminence allongée d’autantplus saillante, que ces animaux
ont leur demeure habituelle sur des lieux plus élevés.
Que le lecteur s’imagine l’étonnement où me mit un semblable phénomène.
La prédilection des animaux pour les hauteurs au physique
dépendre des mêmes parties que l’orgueil, disposition morale , chez
l'homme! Voilà ce qui doit paraître à tout le monde aussi invraisemblable
et aussi inadmissible que cela me le parut au premier abord à
moi-meme.
Jemesuis fait la loi de communiquer la marche de mes observations
ainsi que la manière dont elles ont fait naître mes opinions. Des opinions
qui n’ont pas pour base des faits, sont sinon fausses , du moins
très-hasardées, Le naturaliste doit par conséquent être moins sensible
au reproche d’avoir mal interprêté les faits, qu’à celui de s’en rapporter
au seul raisonnement. Je commence par dpnner quelques détails sur