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par le feu les ennemis (1e la patrie, n’agissent-ils pas conformement à
leur devoir?
De cette manière, l’expression instinct du meurtre pourroit s’excuser,
même dans le cas a i l ’homme tue son semblable, car jamais personne
n’a dit que ceux qui mettent ainsi à mort les individus dont il faut délivrer
la patrie , commettent des homicides.
Le besoin de se nourrir de chair suppose, à la vérité, dans la plupart
des cas, l ’existence de ce penchant, mais ce besoin seul, comme je l’ai
déjà prouvé plus haut, est insuffisant pour le produire, et par conséquent
l'expression sens ou instinct carnivore ou carnassier peut
sembler insuffisante.
En conséquence de ces observations, j’aurois désiré de conserver
ma première dénomination. Mais comme la multitude sera toujours
tentée de confondre le meurtre avec l’homicide, je préfère le nom
d'instinct carnassier.
Le penchant de destruction ou destructivité que M .le docteur Spurz-
heim propose, est une acception trop générale et trop étendue de l’instinct
carnassier. M. Spurzheim fait dériver du même penchant les actes de
quereller, de pincer, de casser, de rompre, de déchirer, de brûler,
de mordre, de dévaster, de démolir, de renverser, etc. L ’architecte qui
démolit pour construire, le jardinier qui arrache un arbre pour en planter
un autre, peut-on les accuser de destruction? Quel seroit l’animal, soit
frugivore, soit carnivore privé du penchant de destruction? Du reste,
cette dénomination ne réveille aucunement, dans l’esprit du lecteur,
l ’idée de la qualité dont je viens d’exposer l ’histoire naturelle.
Peut-être que, soit moi même, soit mes successeurs, nous réussirons
à déterminer plus exactement la force fondamentale. Pour le présent,
il me suffit que le lecteur sache exactement ce que j’entends par la
qualité qui nous occupe, et comment le développement graduel de son
organe peut devenir successivement la cause matérielle du penchant à
tuer son semblable.
Si l’homme avoit assez de force d’esprit pour reconnoître la véritable
place qui lui est assignée dans la nature, il découvriroit encore
nu cerveau. 249
ici une sage institution. Si pendant quelques siècles seulement l’espèce
humaine vivoit dans une paix profonde, elle inonderoit à elle seule
toute la surface du globe; tous les animaux seraient déplacés; tout
équilibre seroit rompu dans la nature; son ordre seroit complètement
interverti. C’est pourquoi la guerre a pour les nations civilisées comme
pour les nations sauvages, des attraits si singuliers, qu’ils.semblent naître
et vivre pour elle, et qu’elle est de toutes les passions celle dont ils
font le plus de parade. Il est constant que les premières idées de religion
furent des idées .guerrières ; qu’un des premiers attributs que les
hommes donnèrent à Dieu, fut celui de Dieu des batailles, Dieu des
armées.
Partout je reconnois et je révère une puissance suprême, et je me
soumets à ses lois. Que ces hommes si glorieux de conduire à la boucherie
les nations contre les nations, qui font égorger leurs semblables
par milliers, sachent qu’ils n’agissent point de leur propre chef, que
ç’est la nature qui a placé dans leur coeur la rage de la destruction ;
que, sans s’en douter, ils ne sont qu’un instrument qu’elle emploie pour
atteindre son but 1 Ne nous montre-t-elle pas ailleurs cette même intention
de maintenir l’équilibre dans l’univers par la peste, les inondations,
les tremblemens de terre, enfin par tous les maux répandus
sur l’espèce humaine?
Siège de l’organe carnassier, et apparence extérieure
de cet organe dans le crâne de l’homme.
L’on ne doit pas s’attendre à trouver chez tous les meurtriers un grand
développement de l’organe carnassier.
Il est des circonstances malheureuses dans lesquelles un organe même
médiocrement développé peut recevoir une incitation telle , qu’il en
acquiert un haut degré d’activité. Tous ceux qui dans le délire de la
fièvre parlent en vers ne sont pas poètes. Nous voyous souvent des
personnes dont la conduite a toujours été irréprochable , commettre,
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