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ne s’abstiendroit pas de voler; nous ajoutâmes que ce qu’il y auroit
de mieux à faire, seroit de le tenir pour toujours dans une maison de
sûreté. Nous fîmes part de nos motifs à ceux qui nous accompagnoient ;
ils compulsèrent le registre des écrous, et trouvèrent, à leur grande
surprise, que ce jeune garçon avoit, dès sa plus tendre enfance, montré
le penchant le plus opiniâtre au vol. Nos adversaires profitèrent de cette
occasion pour mettre dans le plus grand jour ce qu’ils vouloient trouver
d’effrayant et de dangereux dans ma doctrine. Condamner, disent-ils,
à une détention perpétuelle, un jeune garçon, parce qu’il a commis un
vol, qu’y auroit-il de plus cruel et de plus contraire à l’humanité »?
« Quelle raison eûmes-nous de donner ce conseil ? Nous avons déjà
fait voir que l’on doit considérer l’homme sous deux rapports; d’abord,
comme ayant des qualités communes avec les animaux, c’est-à-dire
celles de l’ordre inférieur; ensuite, comme étant doué du caractère
de l’humanité, ou de qualités d’un ordre supérieur. Nous avons montré
^aussi que l’homme, par le moyen de ses qualités supérieures , est en
état de dompter et de diriger ses penchans d’un ordre inférieur. Mais,
si les qualités de l’ordre supérieur sont comprimées d’un manière extraordinaire
, au point que leur action ne puisse avoir lieu , tandis que
celles de l’ordre inférieur sont, au contraire, très-actives, alors la partie
animale de l'homme domine exclusivement, et la chair ou les désirs brutaux
tiennent en sujétion l’esprit ou les dispositions des propriétés supérieures
qui sont à peine ébauchées. 11 arrive, avec une telle organisation
pour les fonctions de lame, qui tiennent à un ordre supérieur, ce qui
a^ieu pour chaque organe dontle développement est défectueux , c’est-
à-dire qu’il en résulte une imbécillité relative, et par conséquent l’incapacité
d’agir moralement, tandis quê les penchans brutaux agissent
avec la force la plus énergique. Un tel individu se trouve dans la
nécessité absolue d’agir d’après l ’impulsion du penchant qui le domine,
et son organisation le met souvent moins en état de se dompter,
que ne l’est un animal bien organisé. Cette imbécillité n’exclut pas
toujours d’autres propriétés bien actives qui sont communes aux animaux,
telle que la ruse; de manière que ce même individu , tout en
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s’abandonnant à une inclination perverse et irrésistible, semble, sous
ce rapport, agir avec réflexion et délibération. C’est par là que les
idiots les plus stupides trouvent souvent les moyens les plus adroits de
satisfaire leur brutale lasciveté ou tout autre penchant déréglé ».
(< Telle étoit la position du jeune voleur dont nous venons de parler.
Les organes supérieurs n’avoient qu’un développement défectueux;
l’organe, au contraire, dont l’activité trop grande conduit au vo l,
avoit acquis un haut degré de développement et d’énergie; et cette
qualité malfaisante étoit encore secondée par l’activité de la ruse. Cet
homme étoit petit et trapu ; son front étoit très-bas, déprimé en arrière
immédiatement au-dessus des sourcils, très-échancré latéralement au-
dessus des yeux, mais large et saillant vers les tempes. Sa physionomie
n’annonçoit aucune attention pour les choses raisonnables; l ’on n’y
découvrait que la ruse et la malice..Etoit-il donc bien difficile de conclure,
de l’organisation de cet imbécile, qu’il devoit être incorrigible
? ‘ ».
J’ai parlé, dans l’historique du penchant au vol, d’un jeune homme
de quinze ans, demi-imbécile et incorrigible, mon dans la maison de
correction de Vienne.
«.....Nous avons vu, dans la prison de Berne, un garçon de douze
ans, mal organisé et rachitique, qui ne peut s’empêcher de voler ; ayant
ses poches pleines de pain, il dérobe encore celui des autres. A Haina
les préposés nous entretinrent long-temps d’un voleur obstiné, nommé
Fe.sselmayer, qu’aucune punition corporelle n'avoit pu corriger. Il
voloit dans la prison tout ce qu’il rencontrait, et ou lui avoit mis au
bras un billot, marque d’ignominie, qui avertissait de se défier de lui.
Avant de le v.oir, nous conjecturâmes quelle devoit être son organisation.
Notre attente fut confirmée au premier coup-d’oeil. Il pa-
roissoit avoir environ seize ans, quoiqu’il en eût vingt-six. Sa tête étoit
ronde, et à peu près de la grosseur de celle d’un enfant d’un an. Cet
individu étoit en outre sourd et muet, ce qui arrive fréquemment dans,
1 T. I I , Sect.III, p. i85, 186.