
activité du même organe. La modestie , le défaut de bonne opinion
de soi-même, l’humilité, la bassesse, sont des suites de son développement
trop peu considérable.
IX. Vanité, ambition, amour de la gloire.
Historique.
Pendant que je m’occupois à vérifier dans les hospices pour les
aliénés , ma découverte sur l’organe de l’orgueil, je rencontrai une
aliénée qui s’imaginoit être reine de France. Je m’attendois à lui trouver
l’organe de la fierté; mais au lieu de la proéminence ovale allongée à
la partie moyenne supérieure postérieure de la tête, j’y trouvai un
enfoncement très-sensible, et de chaque côté une proéminence ronde
et assez grosse. Cette circonstance m’embarrassa' d’abord.
Cependant je m’aperçus bientôt que le genre d’aliénation de cette
femme différoit absolument de celle des hommes fous par orgueil.
Ceux-ci sont sérieux, calmes , impérieux, élevés, arrogans, affectent
une majesté mâle. Même dans la fureur la plus prononcée, tous leurs
mouvemens, toutes leurs expressions portent l’empreinte du sentiment
de la puissance et de la domination qu’ils pensent exercer sur les
autres. Chez les aliénés par vanité, tout porte un caractère différent,
qui se manifeste par une vanité inquiète, un babil intarissable, les
prévenances les plus affectueuses,l’empressement d’annoncer une haute
naissance et d’inépuisables richesses; des promesses de faveur et d’honneur,
en un mot un mélange d’afiectation et de ridicule.
Dès ce moment, j ’ai rectifié mes idées, relativement à l’orgueil et à
la vanité.
L’orgueilleux est pénétré de son mérite supérieur, et traite du haut de
sa grandeur, soit avec mépris, soit avec indifférence, tous les autres mortels.
L’homme vain attache la plus grande importance au jugement des
autres, et recherche avec empressement leur approbation.L’orgueilleux
compte que l’on viendra rechercher son mérite; l’homme vain frappe à
toutes les portes pour attirer sur lui l’attention, et mendier quelque
peu d’honneur. L’orgueilleux méprise les marques de distinction qui
font le bonheur de l’homme vain ; l ’orgueilleux est révolté par les
éloges indiscrets ; l’homme vain aspire toujours avec délices l’encens
même le plus ïhaladroitemeut prodigué. L’orgueilleux ne descend
jamais de sa grandeur , même dans la plus impérieuse nécessité ;
l ’homme vain s’abaisse jusqu’à ramper, pourvu qu’il puisse arriver au
but. La fierté, l’orgueil, l’esprit de domination ne sont le partage que
d’un assez petit nombre d’individus, au lieu que le domaine de la
vanité, de l’amour-propre s’étend, au moins jusqu’à un certain degré,
sur tous les hommes, etc., etc.
Ceci peut suffire pour montrer que l’orgueil et la vanité sont deux
qualités fondamentales différentes, et qu’il faut admettre pour chacune
d’elles un organe particulier.
Histoire naturelle de la vanité, de l ’ambition dans
l’homme.
La vanité, l ’ambition, l’amour de la gloire sont des modifications
de la même qualité fondamentale, qui reçoit des dénominations diverses,
selon le plus ou moins de valeur des objets sur lesquels elle
s’exerce. La femme place sa vanité dans la parure ; l’homme d’état, son
ho nneur dans les emplois ; le soldat sa gloire, dans la défense de la patrie.
Ce sentiment est aussi général qu’il est bienfaisant, et pour l’individu
et pour la société ; c’est un des ressorts les plus puissans, les
plus louables, les plus nobles , les plus désintéressés , qui déterminent
le choix de nos actions.De combien de faits éclatans, de généreux
dévouemens, defforts admirables, l’histoire dé l’espèce humaine se-
roit-elle privée sans l’influence de cette qualité !
Dès la première enfance, nos parens, nos instituteurs ne sauroient
employer, pour nous stimuler au travail et aux bonnes actions, un
mobile plus efficace que celui de l’honneur, de l’ambition, de l’ému