
J’ai démontre, dans le volume I I , section de l'organe de l’ame,
page 213 et suivantes, que les mesures que l’on a prétendu trouver pour
les (acuités intellectuelles des animaux et de l’homme, sont inadmissibles.
En effet, toutes les recherches sur la grandeur absolue du cerveau,
sur la proportion de cet organe au corps entier, aux nerfs, à la
moelle-épinière, à ses parties entre elles, à la face, au cou, ainsi que les
recherches sur la ligne faciale de Camper, et la ligne occipitale de Dau-
benton, sont de nature bien plutôt à retarder les progrès de nos con-
noissances sur lés fonctions des parties cérébrales, qu’à les avancer.
- Quelques physiologistes pensèrent que les lésions et les mutilations
de 1’ encéphale, soit opérées à dessein, soit accidentelles, sont le seul
moyen de nous faire connoître les fonctions du cerveau, ainsi que de
ses parties intégrantes; et, de nos jours encore , les sayans protestent
contre les preuves que je donne de l’existence de telle ou telle qualité
ou faculté fondamentale, et de son organe, par la raison que ces
preuves ne sont pas fondées sur de semblables mutilations, et sur les
dérangemens qui en seroient résultés.
Mais pour que des expériences de ce genre pussent répandre de la
lumière sur les fonctions des parties cérébrales, il faudroit le concours
de plusieurs conditions impossibles à remplir. Il faudroit que l’on.pût
restreindre tout l’effet de la lésion à la seule partie sur laquelle porte
l ’expérience; car, si la commotion, l ’hémorrhagie, l’inflammation, etc.,
affectent d’autres parties encore, que pourra-t-on conclure? Pour être
sûr que l’on a entièrement détruit un organe, il faudroit que l’on
connût d’avance, avec exactitude, tant son étendue que tontes ses
origines; mais les organes ne sont pas placés tout entiers à la surface du
cerveau; les fibrilles nerveuses des circonvolutions ne sont pas épanouies
dans un plan horizontal, comme dans l’hydrocéphale complet;
elles plongent au contraire perpendiculairement vers leurs appareils
de renfort, et vers leurs origines, tels que les soi-disant corps striés, les
soi-disant couches optiques, et les soi-disant cuisses du cerveau, etc,
Ainsi, comment détruire un organe quelconque sans léser aussi ceux
qui l’avoisinent, et sans causer la mort de l’animal ? Il faudroit pouvoir
effectuer qu’un animal dont on a blessé et mutilé le cerveau , fût encore
dispose a manifester les facultés dont les organes n’ont pas été
lésés ou détruits. La captivité seule suffit pour réduire au silence tous
les instincts de la plupart des animaux. Dans la captivité^ l’éléphant ne
songe point à s’accoupler; le rossignol, au milieu même de ses amours,
interrompt ses chants lorsqu’on le prive de la liberté. Il faudroit que
l’on fût le maître, en lésant ou en détruisant une partie cérébrale, de
troubler uniquement les fonctions animales de cette partie, c’est-à-dire
le penchant ou la faculté qui en dépend^ et de n’entraver nullement les
fonctions vitales du cerveau, Gar,lorsqu’après une commotion, un coup
de taille ou de pointe , une incision , etc., il y a inflammation, étourdissement,
paralysie, vertige, délire, manie, démence, convulsions;
comment avec ce dérangement des fonctions vitales du cerveau, les fonctions
animales d une de ses parties, pourront-elles encore se manifester?
Dans de semblables expériences violentes, il faudroit détruire le même
organe aussi complètement dans l ’un des hémisphères que dans l’antre.
Mais jusqu ic i,. aucun des physiologistes qui ont entreprisses mutilations,
na eu égard à la circonstance que tous les organes encéphaliques
sont pairs, que chaque hemisphere en contient un congénère à celui de
de l’autre hémisphère. J’ai déjà montré plus haut, en traitant de l ’organe
de l ’ame, combien on a mal jugé, de tous temps, les lésions du cerveau
et les suites qui en résultent. Ces observations suffisent pour prouver
que de semblables expériences, qu’en dernier lieu encore Sir E. Home
a proposées1 d’un ton à faire croire qu’elles étoient de son invention,
ne pourront jamais conduire à la découverte des fonctions d’une partie
cérébrale quelconque,
Je ne tarderai pas à prouver que la nature nous offre un moyen bien
meilleur, dans la composition différente des encéphales des diverses
espèces d’animaux.
Il n’y avait donc jusqu’ici rien de fait pour frayer le chemin à une
découverte quelconque de cette nature, On ne connoissoit aucune
1 Philosoph. Trans.for the year 1810, Parsn. p. 469,
III,